Par Nabil BEN AZOUZ M. Chafik Sarsar, président de l'Isie, a déclaré dernièrement qu'organiser ces élections le même jour était possible, du moins techniquement. On ne lui en demandait pas tant. Surtout Ennahdha. Car c'est justement ce que cherche cette formation politique pour «noyer» la présidentielle dans les législatives et espérer ainsi gagner ces dernières. Son but, c'est de rendre aphones tous les présidentiables. Elle ne veut que d'un régime parlementaire. Et elle sait que M. Béji Caïd Essebsi, que tous les sondages donnent gagnant, peut remporter la présidentielle, haut la main. Et si en plus on lui donne du temps pour préparer les législatives, il risque fort de faire coup double. Surtout, si en plus un pacte électoral ou un programme commun liera toutes les forces civiles et tous les démocrates de l'opposition entre eux. Ces derniers commencent petit à petit à comprendre que c'est leur seul salut pour espérer gouverner demain. La présidentielle, c'est la rencontre d'un homme avec une Nation. Une adhésion totale à ses idées et à sa vision de l'avenir. Un moment de symbiose. Et très souvent les électeurs donnent, logiquement, à celui qu'ils auront choisi, les moyens législatifs nécessaires pour appliquer son programme et gouverner ainsi le pays. Ce schéma donne des sueurs froides à Ennahdha. Donc la concomitance des deux élections la laisse espérer gagner les législatives en minorant la présidentielle pour laquelle elle n'a personne de charismatique capable de la gagner. C'est de son propre aveu. D'ailleurs, elle hésite encore à en choisir un dans ses rangs. Espérant en dernière minute négocier avec une personnalité politique hors de son parti, qui pourrait lui assurer des voix en plus pour la victoire aux élections législatives. Par ailleurs, inutile de faire l'historique des régimes parlementaires de par le monde, pour dire que ce système n'apporte qu'instabilité et gabegie. Voire, pire : la guerre. Rappelez-vous juste de la France durant les années 1950 lorsque René Coty, président sans pouvoir réel de la IVe République à régime parlementaire qui traversait une grave crise, a été chercher un « militaire », à savoir le Général De Gaulle. Il l'a supplié de prendre les rênes du pouvoir, acceptant aussi son idée de faire adopter la Constitution de la Ve République, quasi présidentialiste, mais surtout de sauver le pays devenu instable (21 gouvernements en 12 mois) et ingouvernable à cause justement de ce régime parlementaire. Rajouter à cela, une situation de guerre civile en Algérie, la défaite de Dien Bien Phu et du début de la lutte armée en Algérie où le FLN a justement su profiter de cette instabilité parlementaire pour lancer son combat pour l'indépendance. Sortir également les arguments financiers pour dire que séparer ces deux scrutins coûterait cher, c'est vouloir faire d'insignifiantes économies de bouts de chandelle. Pour la stabilité de notre pays, donnons du temps au temps. Parfois, il faut savoir en perdre pour en gagner. Que coûteraient quinze jours ou même un mois de temps qui sépareraient les deux scrutins ? Au bout, c'est notre chère Tunisie qui en sortirait gagnante. Stable et heureuse. Cette question de concomitance des deux élections est éminemment politique. L'opposition ne doit pas dormir sur ses lauriers. La majorité des Tunisiens ne veut plus de cette instabilité qui dure depuis deux ans (terrorisme, assassinats, «incapacité» de gestion économique, sociale et diplomatique, atteintes diverses à notre propre identité...), puisque nous sommes justement et de fait sous un régime parlementaire. N.B.A.