L'exposition de sculptures en métal au Parc du Belvédère est issue du premier «Symposium international de sculpture sur métal» en Tunisie... Mais aussi d'une expérience originale. A une époque de surproduction et de consommation, le monde moderne est «générateur de déchets». Utiliser les métaux de récupération dans la création artistique est donc une démarche à valeur écologique et respectueuse de l'environnement. C'est dans ce sens que le «Symposium international de sculpture sur métal», première manifestation artistique internationale consacrée à la sculpture sur métaux recyclés, a été créé. Il s'agit d'une rencontre entre artistes, professionnels du recyclage des métaux, suivant le cheminement d'un projet artistique depuis la récupération jusqu'à la réalisation de l'œuvre. Dans un cadre verdoyant, des sculptures modernes et contemporaines, fruit de cette rencontre, ont été plantées dans une partie du parc du Belvédère. Une belle exposition qui ne manque ni d'originalité, ni de savoir-faire, a regroupé le travail de 15 artistes (7 tunisiens, 7 français et 1 suisse) durant le Symposium international de sculpture sur métal, qui s'est déroulé, donc, pour la première fois en Tunisie du 21 au 26 avril dernier et a été organisé à l'initiative de l'Association tunisienne pour l'art environnemental, présidée par Mourad Habli, artiste lui-même et résident au Château d'Autrey (Résidence d'Artistes) en France. Le travail s'est déroulé au sein de la Société de recyclage et de valorisation des métaux, à Hinchir Lihoudia, El Mourouj. Les artistes, à savoir Anita Rumpf (Suisse), Emmanuelle Baudin (France), Hamadi Ben Neya (Tunisie), Hbyba Harrabi (Tunisie), Michel Laurent(France), Mohsen Jeliti (Tunisie), Mylène Peyreton (France), Nadia Zouari (Tunisie), Najet Gherissi (Tunisie), Odile Vuillemin (France), Pascal Bejeannin (France), Stéphane Bouchon (France), Valéry Raphat(France), Yosri Bahrini (Tunisie) et Yves Delessard (France) se sont mobilisés durant 5 jours pour créer des œuvres aussi riches qu'intrigantes les unes que les autres. Des objets quelconques, retirés de la ferraille, sont récupérés, détournés de leur premier usage puis ramenés, par un savant assemblage, à une nouvelle vie, contemplative et combien plus belle que l'ancienne. Issus de l'activité agricole, de l'automobile ou de l'industrie, brisés, rouillés, tordus, usés, les déchets ont un passé, un message. Ramassés et triés selon leurs formes ou leurs matières, puis travaillés et assemblés par soudure, ces métaux condamnés entament ainsi une nouvelle carrière et le défi du recyclage est alors relevé. Cependant, le projet n'a pas été facile à réaliser. Le budget de 5.000 DT, alloué par le ministère de la Culture — alors que les métaux seuls ont coûté 4.000 DT —, n'a pas suffi à couvrir les frais. Les artistes confient qu'ils ont dû payer de leur poche pour parvenir à achever cette opération. Le geste est d'autant plus méritoire qu'ils offrent leurs sculptures à la Ville de Tunis. L'expérience a démarré déjà avec force et enthousiasme du côté français : «J'avoue que c'est bien la première fois que je prends l'avion avec, dans ma valise, un poste à souder, une meuleuse, un marteau à boule, des brosses métalliques et une paire de chaussures de sécurité», confie l'artiste Michel Laurent. Et, en évoquant son expérience à «Hinchir Lihoudia» : «J'avais comme chacun de nous, 4 jours devant moi pour aboutir à une sculpture de plusieurs mètres de haut. La découverte, au fond de la casse, d'une belle poutrelle IPN 180 de 7 mètres de long, rouillée à souhait, m'a convaincu de réaliser un arbre. Il ne fallait donc pas traîner! Malgré le matériel apporté sur place, le challenge portait aussi sur le fait de travailler avec les moyens du bord. Ici, je n'avais pas mon fidèle poste plasma. Il a donc fallu apprendre à me servir du chalumeau oxycoupeur, occasion d'échanges avec les ouvriers de la casse. Au terme de 40 mètres de découpe, avec l'aide précieuse des pros de la ferraille pour apprendre à doser les mélanges oxygène/gaz et manier la torche, je dois dire que le métier est bien rentré !» 13 œuvres au total, donc, ont été réalisées afin de sensibiliser le public et mettre l'art à la portée de tous. Par ailleurs, ce projet montre qu'il est possible de valoriser des produits recyclés pour en faire de véritables œuvres d'art et porter dans le même temps un nouveau regard sur la société de consommation. La bonne nouvelle est que cette exposition est la première étape d'un futur parcours de sculptures à travers le Parc du Belvédère.