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Violence dans les stades : vingt ans de prison pour faire taire les gradins
Publié dans Business News le 17 - 07 - 2025

Jusqu'à vingt ans de prison pour un supporter : c'est ce que prévoit une proposition de loi déposée par 26 députés pro-régime. Présenté comme un texte sécuritaire, il révèle surtout une volonté de museler les gradins, derniers bastions de contestation populaire, au moment où les violences policières restent largement impunies.


Une nouvelle proposition de loi suscite une vive controverse sur les réseaux sociaux et dans les milieux sportifs. Déposée le 8 juillet par 26 députés proches de la mouvance présidentielle et transmise hier mercredi 15 juillet 2025 à la commission de l'Education, de la Jeunesse et du Sport, elle est censée lutter contre la violence dans les stades et les enceintes sportives fermées. Officiellement destinée à protéger ces espaces, elle apparaît surtout comme un outil répressif visant à réduire au silence des gradins traditionnellement effervescents.
Les articles de la proposition de loi en disent long sur cette logique punitive et répressive du régime. Les peines vont de six mois à vingt ans de prison, assorties d'amendes lourdes. Un spectateur simplement porteur d'un objet considéré comme "dangereux" – définition si floue qu'un coupe-ongles ou un briquet pourraient être concernés – encourt entre cinq et dix ans de prison, voire jusqu'à vingt ans si les faits se déroulent dans une enceinte fermée. Soit plus que certains assassinats !
La disproportion choque d'autant plus que certains des députés à l'origine du texte n'ont jamais mis les pieds dans un stade. Leur méconnaissance flagrante de la réalité des gradins contraste avec leur zèle répressif. Ces élus, tous issus de la mouvance dite proche du régime de Kaïs Saïed, à l'instar de Syrine Mrabet et Zina Jiballah (sœur de la secrétaire d'Etat des entreprises communautaires) traduisent une philosophie politique où l'ordre prime sur toute autre considération.

Un projet pour soumettre les gradins
L'avocat Sami Ben Ghazi est sans ambiguïté : « Ce projet n'est qu'une politique de terreur méthodique, visant les spectateurs et non la protection des stades. Dans un pays où les violences policières restent impunies, où leurs auteurs sont protégés par des syndicats et des couvertures politiques, le pouvoir choisit d'abattre ses plus lourdes sanctions sur une jeunesse qui voit dans les gradins un espace de liberté et d'expression. Les stades ont toujours été des foyers de contestation et des réservoirs de révolte. Cette loi vise à les dompter, à les transformer en espaces muets et dociles. Ce n'est pas une volonté de justice, mais une volonté de soumission. »
Cette lecture rejoint celle de nombreuses personnes sur les réseaux sociaux, depuis hier, qui y voient un prolongement du climat politique actuel, marqué par une méfiance viscérale du régime envers toute forme d'expression collective. Après les politiciens, les journalistes, les avocats et les militants des Droits de l'Homme, le régime veut maintenant bâillonner les stades.

Omar Laâbidi, symbole d'une justice à deux vitesses
Le secrétaire général d'Attayar, Nabil Hajji, va plus loin en dénonçant une hypocrisie d'Etat. Il rappelle l'affaire Omar Laâbidi, ce jeune supporter du Club africain mort noyé le 31 mars 2018 près du stade de Radès après que des policiers l'eurent poussé à se jeter à l'eau, refusant de le secourir malgré ses cris de détresse. L'un d'eux lui avait lancé cette phrase devenue symbole : « Apprends à nager ! »
Le 12 juillet 2024, la Cour d'appel de Tunis a condamné douze agents à un an de prison… avec sursis, réduisant ainsi la peine initiale de deux ans ferme pour homicide involontaire.
Nabil Hajji ironise sur cette justice à deux vitesses : « Quand tu portes un objet jugé dangereux dans un stade, tu risques vingt ans de prison. Quand ils te tuent, ils n'écopent que d'un an avec sursis. Après ce projet, chaque nouveau stade devrait être construit à côté de deux prisons ! »

L'Europe, entre fermeté et proportionnalité
En Europe, la lutte contre la violence dans les stades est bien réelle, mais elle repose sur un principe fondamental universel de la justice : la proportionnalité des peines par rapport aux actes commis. L'objectif n'est pas de terroriser les supporters, mais de sanctionner strictement les auteurs de violences avérées tout en préservant l'esprit festif des gradins.
En France, les lois prévoient des sanctions graduées : des interdictions administratives ou judiciaires de stade pouvant aller jusqu'à cinq ans, assorties parfois d'amendes lourdes, mais la prison reste exceptionnelle et n'est appliquée qu'en cas de violences graves ou de récidive caractérisée. En Italie, après les années noires du hooliganisme, le "Daspo" a été renforcé, mais il reste une mesure d'éloignement et non d'emprisonnement systématique. L'Espagne suit la même logique, privilégiant la prévention, l'interdiction d'accès aux stades et la dissolution des groupes violents plutôt que l'incarcération massive.
Dans ces pays, la législation fait la différence entre un supporter turbulent et un criminel violent. Les simples débordements ou jets d'objets légers entraînent des amendes ou des interdictions de stade ; seuls les actes mettant réellement en danger des vies (agressions physiques, usage d'armes) justifient une peine de prison.
À l'inverse, la proposition tunisienne met sur le même plan un spectateur qui transporte un objet jugé dangereux et un criminel condamné pour homicide volontaire. Là où l'Europe cherche à protéger les spectateurs sans tuer l'ambiance des tribunes, le texte tunisien donne la priorité à la peur et à la dissuasion par la menace carcérale.

Un texte de plus dans l'arsenal répressif du régime
Cette proposition de loi n'est pas un simple texte sur la violence dans les stades : elle s'inscrit dans un schéma beaucoup plus large, celui d'un pouvoir qui fait de la répression son principal mode de gouvernance. Depuis quatre ans, la Tunisie vit au rythme des arrestations spectaculaires et des procès expéditifs visant des catégories entières de la société : des politiciens emprisonnés pour des positions jugées hostiles, des hommes d'affaires accusés de corruption mais souvent détenus sans jugement probant, des lobbyistes réduits au silence, des journalistes poursuivis sous le fameux décret 54 liberticide, des avocats harcelés pour avoir défendu des causes jugées sensibles, et des militants des droits de l'homme systématiquement diabolisés.
Les gradins ne sont, au fond, qu'une nouvelle cible. Historiquement frondeurs, ils constituent l'un des rares espaces où la colère populaire peut encore s'exprimer sans filtre. En criminalisant jusqu'au port d'un simple briquet, ce texte ne cherche pas seulement à prévenir des débordements : il vise à dompter une jeunesse considérée comme une menace, à transformer des tribunes bouillonnantes en lieux aseptisés et silencieux.
En plaçant la détention d'un objet banal au même niveau qu'un crime de sang, le régime dévoile ses priorités : la contestation est, à ses yeux, plus dangereuse que la violence réelle. Et c'est bien là tout le sens de cette proposition : non pas protéger les stades, mais protéger un pouvoir de plus en plus isolé, qui craint davantage les chants des supporters que les bavures policières.


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