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Pourquoi tant de précipitation ?
Tribune - Accès à la propriété immobilière pour les étrangers
Publié dans La Presse de Tunisie le 19 - 05 - 2014


Par Olfa HAMDI (*)
Au cours d'un Conseil ministériel, il a été récemment décidé de faciliter l'octroi de l'autorisation du gouverneur pour l'achat de biens immobiliers en Tunisie par des étrangers. Le Premier ministre, Mehdi Jomâa, voulant mettre les points sur les i au sujet de cette décision qui a sans doute inquiété les Tunisiens, réplique : «La loi n'a absolument pas changé, nous avons «juste» défini un nouvel intervalle de temps nécessaire à l'obtention de l'autorisation qui est de 3 mois (à la place de 3 ans, voire plus)... La raison en est : la promotion de l'investissement ».
Face à cette décision néanmoins importante, je ne peux certainement pas juger les intentions du Premier ministre Jomâa. Cela dit, du simple fait de ma citoyenneté, je suis en mesure de, au moins, me poser des questions sur ses priorités en tant que chef de gouvernement. Et là, de par cette décision ainsi que les autres grands sujets choisis par ce gouvernement dans les différents secteurs dont je cite, à titre indicatif, la réintroduction du sujet de la normalisation avec l'Etat d'Israël sous plusieurs formes et la question énergétique et notamment la question du gaz de schiste, il est clair que les priorités de l'ordre exécutif de ce gouvernement, à ce jour, négligent les exigences et besoins de la phase transitoire pour laquelle ce gouvernement a été désigné en premier lieu. Rappelons le sujet de la revue des nominations, la préparation des élections et le reste de la feuille de route. En effet, cet agenda ministériel tente en quelque sorte d'aborder et de décider sur des sujets d'ordre national voire générationnel, que beaucoup de Tunisiens jugent trop importants pour être délégués par un gouvernement, rappelons-le : de « non-élus ».
Face au silence douteux de l'ensemble de la classe politique ainsi que de plusieurs acteurs de la société civile, je pense que certains justifieront ce silence par un ensemble de deux ou trois grandes raisons : une inquiétude pour notre économie dite « malade » nous obligeant à maintenir le silence, une sorte d'intimidation face à cette compétence « technocrate » qui a succédé à un gouvernement dont le bilan a été jugé catastrophique et enfin, une nouvelle approche de gouvernance politique choisie par les « grands » de la scène : rester au siège arrière, la responsabilité est beaucoup trop lourde pour être assumée par un seul parti politique. Certes, il s'agit d'un gouvernement composé de compétences dans leurs industries respectives. Mais, rappelons quand même que ce qui leur manque pour être en mesure de se prononcer sur de grands sujets qui touchent mon avenir, ton avenir et celui de nos enfants, c'est bien la « compétence populaire » qui se traduit par la capacité de représenter une volonté nationale et qui ne peut être issue que des élections. Sur ce, je tente à travers cet article d'opinion de dire : il n'est toujours pas trop tard pour le gouvernement de Mehdi Jomâa de réviser son agenda exécutif et d'aligner ses priorités sur celles du peuple et des acteurs de la société civile, et qu'il n'est jamais trop tard ou trop tôt pour nous, citoyens et maîtres de notre destin, de nous rappeler que seul le gouvernement est en mesure de s'ajuster à la volonté populaire et non le contraire; de nous rappeler qu'une économie faible est un symptôme et non une cause et que le support des grandes puissances mondiales, notamment des Etats-Unis, au chef du gouvernement Jomâa et sa délégation n'a certainement pas été promis pour la personne de Mehdi Jomâa ni pour son équipe, mais surtout pour la personne de notre société civile et ce qu'elle a accompli tout au long de ces dernières années.
Finalement, rappelons-nous, société civile comme gouvernement, enfants de la même patrie, que notre dignité consiste à prendre en main notre devenir et qu'il n'y a pas que la dictature institutionnelle qui va a au contraire de cette dignité ; apprendre à faire des concessions générales importantes sous des termes génériques de l'ordre de « la sécurité » et « le tourisme » comme au temps de Ben Ali ; « l'économie » ou « l'investissement »ces derniers mois ne nous mènera certainement pas vers la dignité. Nul peuple n'est riche et prospère sans des mécanismes clairs de conservation de sa dignité. Le premier de ces mécanismes est le droit le plus basique du public de prendre son temps pour comprendre, entendre et éventuellement décider à travers des élus sur des sujets qui concernent son avenir.
Traitons en particulier de cette décision relative à l'accès à la propriété immobilière par les étrangers.
Changer les délais, c'est aussi changer la loi
Contrairement à ce que Mehdi Jomâa a avancé, la loi a bien changé suite à la réduction significative du délai relatif à l'obtention ou non de cette autorisation ; qui plus est une étape importante dans la procédure générale d'acquisition de bien immobilier.
Le facteur temps est en effet au cœur de la loi. Il indique et définit son contexte et il répond à un besoin et à une vocation de l'ordre du stratégique dans la définition même de la loi. Mes compatriotes spécialistes du droit tunisien peuvent certainement se prononcer là-dessus, et je les encourage et appelle à s'y mettre pour éduquer le public comme les technocrates au gouvernement sur cette notion de l'interaction entre le temps et le droit. Cette notion même est au cœur de la séparation de pouvoir entre l'exécutif et le législatif. En guise d'exemple, je vais m'attarder sur le débat ayant récemment eu lieu aux Etats-Unis sur le sujet des permis d'exportation de gaz naturel liquéfié (GNL). En effet, plusieurs entreprises américaines mais aussi internationales attendent depuis des années un permis qui va leur permettre de construire des terminaux de GNL sur le sol américain et de l'exporter à l'international. Dans un débat qui a duré au moins deux ans, il est dit que ce secteur d'activité permettra la création d'emplois aux USA, donc alléger le taux de chômage et renforcer la pénétration de cette puissance au marché mondial. L'institution ayant la compétence d'étudier les applications et d'accorder ce permis est le Département de l'Energie où « DOE », l'équivalent de notre ministère de l'Industrie. Le DOE a accordé quelques permis à quelques entreprises, mais le problème réside dans la durée que l'évaluation des permis, étant de l'ordre d'au moins une année et demie. Ainsi, de là où on est, on imaginerait bien le président Obama, l'homme le plus puissant au monde, décréter par ordre présidentiel au Département de l'Energie de réduire cette durée d'attente. N'est-ce pas ?
La réalité est autre. La décision sur la réduction de la durée accordée au Département de l'Energie pour se prononcer sur la décision relative à des permis de construction et d'exportation du GNL est de l'ordre du législatif. En effet, uncomité de la Chambre des députés, après avoir étudié, débattu avec plusieurs acteurs de la société civile américaine pendant plus de deux ans, a approuvé, il y a plus d'une semaine, un projet de loi pour accélérer les exportations de gaz naturel des Etats-Unis (nouvelle durée proposée de 90 jours après la fin de la période des commentaires publics, une procédure absente chez nous actuellement). Ce même projet de loi doit ensuite passer par le Sénat pour enfin entrer en vigueur.
La leçon que nous devons retenir de cette situation analogue à la nôtre est la suivante : le facteur temps ne relève pas systématiquement de l'ordre de l'exécutif, et ce même quand il s'agit de l'homme qui dirige une des plus grandes puissances au monde!
Là où on est, j‘appelle l'ANC, avec l'aide de l'instance provisoire de contrôle de la constitutionnalité des projets de loi, rappeler à l'ordre l'étendue de notre pouvoir exécutif sur de telles décisions.
De plus, faciliter aux étrangers l'acquisition de biens immobiliers par la réduction de la durée nécessaire pour l'étude du dossier porte d'autres dangers non négligeables. Citons à titre d'exemple: l'impact que cela pourrait avoir sur le paysage démographique futur du peuple tunisien, sur notre capacité de contrôler la situation sécuritaire du pays et finalement sur la capacité des Tunisiens à réaliser un des piliers de ce que j'appellerai notre «rêve tunisien» : devenir propriétaire d'un bien immobilier.
Ces questions d'évaluation d'impact méritent d'être au moins posées. Le législatif est certainement le conducteur principal de cette évaluation. Ainsi, le gouvernement incarnant l'exécutif peut proposer et/ou essayer d'influencer le vote(par le biais de méthodes légales bien évidemment) mais ne peut certainement pas se doter de l'autorité de prendre cette décision.
Au-delà de cette instance particulière, notre pays passe par une transition de la «sphère légale» qui comporte entre autres la question de la «constitutionnalité de l'exécutif». J'appelle ainsi mes compatriotes du droit tunisien, jeunes et des plus expérimentés, à coopérer pour avancer une étude générale mais profonde sur de tels sujets, notamment sur l'interaction entre le temps et le droit.
Faciliter l'octroi de biens immobiliers par les étrangers encourage-t-il l'investissement ?
Même si se poser de telles questions n'est pas à l'ordre du jour de cette phase transitoire pour laquelle ce gouvernement a été désigné, il est important de dire qu'il n'y a aucune étude ou base scientifique solide établissant le lien direct de cause à effet entre faciliter l'octroi de biens immobiliers aux étrangers par la réduction de la durée de l'application et la prolifération de l'investissement étranger dans le pays.
D'ailleurs, la question serait autre si la décision était de définir cette durée pour les entreprises voulant investir dans des projets garantissant la création d'un nombre minimum d'emplois. Là, et même dans ce cas, il restera utile d'évaluer d'une manière objective l'impact général de cette décision, relevant certainement du législatif et non de l'exécutif.
Le moins qu'on puisse dire sur cet argument avancé par le Premier ministre est qu'il s'agit d'un argument faible.
La question d'encourager l'investissement étranger est étroitement liée à la réputation du pays à l'international en matière de stabilité de procédures et d'interactions stratégiques entre gouvernement et entreprises privées. En plus de l'insécurité, s'il y a une chose qui fait fuir les entreprises multinationales, c'est le risque d'expropriation de propriétés étrangères sur le sol national. Sur ce, j'attire l'attention de nos décideurs sur le point suivant : il est plus difficile de défendre la réacquisition d'un bien immobilier vendu à un étranger que de ne pas le lui vendre en premier lieu. Nous courons tous le risque de nous retrouver dans quelques années mains tordues à choisir entre continuer à céder plus de biens et de terres de notre petit pays et aggraver notre réputation dans les cours de justice internationales.
Sur ce point, je renouvelle mes propos qu'il n'est toujours pas tard pour le gouvernement de revenir sur sa décision, ou pour l'ANC de la suspendre, mais surtout pour nos avocats et acteurs de la société civile de tenter la saisie de cette décision au tribunal administratif.
Rappe l: quelles priorités pour le gouvernement de technocrates?
La question des priorités de ce gouvernement est de plus en plus importante à s'attarder dessus. Est-ce par ce genre d'agenda que le gouvernement arrivera à préparer le terrain pour des élections et l'entrée en application de notre démocratie ?
Est-ce raisonnable pour un peuple de s'incliner par des circonstances de court terme (de l'ordre des mois) et se retrouver ainsi à accepter des choix qui relèvent de son existence même, de son identité et de ses générations futures? Le silence ne vaut-il pas le consentement ?
Le service public est un des métiers les plus difficiles; c'est une vocation et un engagement. C'est un métier qui ne pardonne pas les "bonnes intentions" parce que les intentions ne seront pas présentes dans une trentaine d'années pour être jugées; nous paierons certes le prix de nos décisions, nos enfants paieront un plus grand prix.
Nous ne demandons pas au gouvernement Mehdi Jomâa de décider à notre place de ces questions stratégiques relatives à notre identité, nos choix, nos ressources naturelles, notre politique d'emplacement à l'international, enfin notre dignité. La nouvelle constitution est la première des étapes pour en arriver à un stade de maîtrise de notre destin.
Nous sommes conscients que pour faire des décisions aussi faciles que celles faites récemment sous le prétexte ou la bonne intention d'encourager l'investissement, nous n'avons pas besoin de technocrates. Notre revendication est de conserver ce que cette société a bâti par la douleur et le sacrifice depuis la révolution : une image de la Tunisie digne, qui se bat au quotidien certes mais qui aspire à la prospérité indissociable de la dignité.
Réussissez les éléments de la feuille de route, notamment en prenant des décisions courageuses relatives aux nominations, à l'ordre et aux élections. Et nous aurons tout le temps pour décider du sort de nos terres, de nos ressources naturelles et de nos enfants.
J'espère, de tout mon cœur ancré dans cette terre toujours mouillée du sang de ses martyrs, que Monsieur Jomâa n'a pas, au nom des Tunisiens, promis des mesures que nous regretterons tous. Nul ne doit être pressé de vendre la terre sur laquelle on marche !
*(Consultante internationale en management de grands projets industriels et en résolution de disputes commerciales )


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