L'éradication du terrorisme commande une approche globale où le sécuritaire, le politique, le culturel et le social sont impérativement indissociables L'extirpation du terrorisme, sous toutes ses formes, s'étant imposée aujourd'hui comme une priorité nationale et une responsabilité collective, l'on se demande, face aux différentes initiatives, comment agir en symbiose afin que l'effort national en la matière aboutisse aux résultats que tout le monde attend. En plus clair, la création imminente du pôle antiterroriste (sécuritaire et juridique) annoncée par Mehdi Jomâa lors de sa conférence de presse du 19 mai dernier peut-elle être complémentaire de la conférence nationale sur le terrorisme que les participants au Dialogue national ont décidé de tenir dans les jours à venir, en réponse à l'attaque terroriste ayant ciblé, en début de semaine, le domicile de Lotfi Ben Jeddou, ministre de l'Intérieur ? Comment éviter que cette conférence ne se transforme en une joute oratoire pour condamner certaines parties politiques accusées de complaisance à l'égard des terroristes et oublie l'essentiel, à savoir mettre au point une stratégie concertée à court, moyen et long termes dans le but d'éradiquer l'hydre terroriste ? L'exemple de l'échec de la conférence nationale contre la violence politique tenue il y a un peu plus d'un an étant toujours présent du fait de l'erreur commise par les organisateurs de cette conférence qui voulaient désigner, à tout prix, un responsable et un unique responsable de la violence qui sévissait à l'époque dans le pays. Pour le chercheur spécialisé dans le domaine du terrorisme et des mouvements islamiques, «l'idée de tenir une conférence nationale sur le terrorisme est à saluer, dans la mesure où elle permettra aux participants de parvenir, en confrontant leurs idées et leurs approches, à un consensus sur la méthodologie à suivre en vue de combattre le terrorisme. C'est aussi une opportunité pour démontrer que la société civile et politique est désormais une partie prenante dans tout ce qui est entrepris en matière de lutte contre les terroristes et qu'il n'est plus question de stratégies élaborées dans les bureaux clos et qu'il faut exécuter à n'importe quel prix». Naceur Héni pense que «le pôle antiterroriste annoncé par le chef du gouvernement et qui sera avant tout sécuritaire et juridique représente une composante de la stratégie nationale de lutte contre le terrorisme». La sécurité globale nécessite la mise en place d'une stratégie à court, moyen et long termes où «le sécuritaire, ajoute-t-il, est incontournable du culturel, du social, de l'éducatif et du politique. En d'autres termes, développer les services de renseignements, parfaire l'analyse des informations collectées et renforcer les ressources humaines exerçant au sein de l'institution sécuritaire en veillant à leur formation et recyclage continus ne peuvent être indissociables d'une politique volontariste de lutte contre la pauvreté et la marginalisation dans les quartiers populaires où les terroristes trouvent un terrain favorable pour recruter à souhait». Il en est de même «pour notre système éducatif qu'il importe de réformer en urgence dans l'objectif de réconcilier le Tunisien avec son authentique identité, celle d'un citoyen tolérant, ouvert et acceptant l'autre. Certes, c'est un travail de longue haleine mais il est indispensable pour que nos jeunes puissent échapper aux sirènes des jihadistes wahhabistes qui viennent leur promettre monts et merveilles et les poussent à se compromettre dans des guerres avec lesquelles ils n'ont aucun rapport, sous le faux prétexte de servir un islam jihadiste étranger à nos mœurs et à notre conscience religieuse vieille de plusieurs siècles». L'impératif de la sécurité culturelle L'institution culturelle, qui a marqué le pas au cours des trois dernières années, est appelée, elle aussi, à sortir de sa léthargie et à s'impliquer, avec courage et audace, dans la lutte contre le terrorisme. «Aussi, nos intellectuels et nos créateurs doivent-ils se sentir concernés par la guerre médiatique et le harcèlement des réseaux sociaux auxquels se livrent les jihadistes soutenus par l'argent que certaines parties du Golfe font couler à flots pour développer la sédition et faire perdurer la discorde. Impliquer ces mêmes créateurs et intellectuels dans le sursaut national contre le terrorisme est aussi impératif qu'urgent dans la mesure où la sécurité intellectuelle est aussi importante que la sécurisation des frontières ou le démantèlement des cellules dormantes». Reste maintenant à savoir si les conclusions qui couronneront la conférence nationale sur le terrorisme seront prises en considération par le gouvernement Jomâa. La question est à poser, surtout que les spécialistes et les experts ne cessent de répéter qu'ils sont disposés à offrir leur savoir-faire aux autorités ainsi que leurs études et recherches. Malheureusement, leurs offres restent encore sans réponse.