Après avoir milité au sein de partis politiques, Houda Cherif, cofondatrice d'Afek Tounès, a préféré rejoindre la société civile. Elle a créé récemment le ConnectinGroup, une association qui veut aider les femmes à accéder aux postes de responsabilité. Le ConnectinGroup sera officiellement lancé demain. Votre association, le ConnectinGroup, a vu récemment le jour. Qu'est-ce qui distingue ce nouveau réseau de femmes tunisiennes par rapport à toutes les autres associations féminines ? Le ConnectinGroup est d'abord un projet avant même d'être une association. Ensuite, et c'est ce qui nous distingue le plus je crois, le ConnectinGroup est non seulement ouvert à toutes les forces féminines mais aussi à tous les hommes qui respectent et valorisent l'effort et le travail de la femme. Il s'agit d'une nouvelle initiative qui vise à concrétiser les droits déjà acquis des femmes tunisiennes en rendant réel et concret ce qui est écrit dans la Constitution ou dans les textes juridiques de manière générale et en sensibilisant les femmes à la nécessité de participer à la prise de décision. Nous voulons valoriser des femmes compétentes dans les divers secteurs de la vie active, des femmes qui donnent l'exemple et montrent la capacité de la gent féminine à gouverner. Nous croyons fermement que cela puisse apporter un nouveau souffle et offrir une nouvelle vision à la gouvernance en Tunisie. Le ConnectinGroup est ouvert à toutes les femmes de profils différents et de disciplines variées, à savoir le droit, les finances, les sciences, les médias, les nouvelles technologies, la santé, l'environnement... C'est un projet qui part de la réalité assez contradictoire. Il part des chiffres et des sondages recueillis au sujet des femmes et de leur présence dans les postes de responsabilité. Il y a peu de femmes dans le gouvernement, pas de femmes recteur ou doyen, pas de gouverneurs femmes, peu de PDG à la tête des institutions publiques... Nous, Tunisiennes, sommes les femmes les plus chanceuses du monde arabe mais seulement sur le papier. Le ConnectinGroup veut en finir avec cela, casser les chaînes et pousser la femme vers les plus hautes cimes. Quelle est votre stratégie pour aider les femmes tunisiennes à accéder aux postes de responsabilité? Le ConnectinGroup œuvre à identifier des compétences féminines dotées d'intégrité, du sens du travail et des responsabilités. Nous essayons par la suite de les sensibiliser à la nécessité de s'impliquer dans la vie publique, de consolider leurs capacités et de les sortir de l'ombre surtout pour celles qui n'ont pas eu la chance ou l'audace de se rendre visibles. L'objectif de ce projet est la création d'un réseau de femmes disposant de capacités et de qualifications qui les rendent éligibles afin d' occuper des postes de hautes responsabilités. Le réseau a commencé au Maroc et se veut un réseau solide de femmes maghrébines. Il ambitionne de s'étaler sur toute la région et même dans le monde car il faut avouer que la situation des femmes dans d'autres pays même les plus développés n'est pas vraiment meilleure. Les jeunes sont également quelque peu oubliés du paysage politique de la Tunisie post-révolutionnaire. Comptez-vous les inclure dans vos projets d'action? Oui. Dans une première phase le ConnectinGroup prévoit de s'occuper de l'intégration des femmes dans la gouvernance mais dans une deuxième phase qui ne va pas d'ailleurs tarder, le ConnectinGroup compte intégrer les jeunes, hommes et femmes, dans l'espoir d'inculquer cet esprit de travailler ensemble et de gouverner ensemble sans aucune considération du facteur genre. Petite à petit, le ConnectinGroup sera présent dans toutes les régions de la Tunisie. Vous lancez officiellement votre association demain, pouvez-vous nous présenter le programme de cette journée? En effet, la cérémonie de lancement du ConnectinGroup, organisée en partenariat avec la Fondation Friedrich Naumann, est prévue demain. La matinée sera officiellement ouverte par Madame Neila Chaabane, secrétaire d'Etat, chargée de la Femme et de la Famille. Au cours de cet événement, nous aurons le plaisir de recevoir nos amies et consœurs marocaines qui étaient à l'origine de cette idée de réseau et d'écouter un panel de femmes leaders, dont Ouided Bouchamaoui (présidente de l'UTICA), Kalthoum Kennou (ex-présidente de l'AMT), Néjiba Hamrouni (ex-présidente du SNJT) et Amira Yahyaoui (présidente de l'association Bawssala). Nous estimons que sans le sens de l'engagement de ces femmes intelligentes et passionnées, la Tunisie n'aurait pas pu réussir cette phase de transition par laquelle nous venons de passer !