« Il faut barrer la route à la presse de caniveau pour la mettre hors d'état de nuire», a déclaré Houcine Abbassi Ce n'est pas véritablement un nouveau syndicat qui voit le jour, ce n'est pas non plus un congrès constitutif du Syndicat général des médias qui s'est ouvert hier à Hammamet. Il s'agit en fait d'une scission voulue et choisie du Syndicat général de la culture et des médias, et ce, pour plus d'efficacité. Comme le rappelle Houcine Abbassi dans son allocution d'ouverture : «L'ancien syndicat ne pouvait pas concilier la défense des intérêts de la culture et ceux des médias ». Désormais, chacun volera de ses propres ailes, mais ils retourneront tous au nid, celui de l'union, à chaque fois que des combats communs s'imposent. Sami Tahri, secrétaire général adjoint de l'Ugtt et président du congrès, a indiqué qu'un nouveau bureau exécutif composé de neuf membres (dont un président) sera élu à l'issue des travaux. Neuf membres qui auront pour mission de mettre en application les motions qui émergeront des différentes commissions du congrès. « Lors de ce congrès, il y aura une évaluation du travail du syndicat, l'élaboration d'une motion de politique générale, ainsi qu'une motion relative aux relations extérieures », a affirmé Nabil Jmour, candidat à la présidence parmi une douzaine d'autres. Selon lui, le Syndicat général des médias n'est pas un concurrent du Syndicat national des journalistes tunisiens (Snjt). « Notre relation sera stratégique avec nos amis du Snjt, car nous avons beaucoup de défis dans lesquels nous irons main dans la main, notamment celui de la révision des décrets-lois 115 et 116 ou encore la situation difficile des entreprises de presse publiques », a-t-il indiqué. Signe d'une parfaite harmonie, le terme «relation stratégique» revient également dans la bouche de Zied Dabbar, membre du bureau exécutif du Snjt. C'est donc « l'entente cordiale » entre les deux syndicats qui visent communément, selon le représentant du Snjt, à « asseoir la compétence et le professionnalisme dans le secteur des médias » Abbassi plaide pour de vrais médias alternatifs Appelé à prononcer un discours lors de l'ouverture du congrès, le secrétaire général de l'Ugtt, Houcine Abbassi, a appelé les syndicats à éviter les émiettements, tout en admettant que certains secteurs ont besoin de se concentrer sur leurs revendications spécifiques. « La priorité est d'avoir une stratégie claire chez les différents intervenants afin de mettre en place de véritables médias alternatifs », a déclaré Houcine Abbassi. Pour, lui, bien qu'elle ait franchi des pas importants, la liberté de la presse reste à la recherche de stabilité, et parfois sujette à des tractations politiciennes. Il fustige, en effet, l'émergence, après la révolution, d'une nouvelle « presse de caniveau», dont l'existence n'est pas de servir le secteur des médias, mais de servir les intérêts de partis politiques qui les dirigent en sous-main. Le secrétaire général de l'Ugtt ne se fait pas beaucoup d'illusion, il sait que ce type de médias continuera à exister. Il appelle cependant l'ensemble des intervenants à leur barrer la route en les encerclant pour les mettre hors d'état de nuire. Dans son discours, il a également mis l'accent sur l'importance de la cogestion dans les entreprises de presse. Une cogestion qui, selon lui, ne touchera pas aux statuts des propriétaires. D'un autre côté, Houcine Abbassi concède aux propriétaires l'existence d'une inégalité dans la distribution de la publicité publique et des abonnements. « Il faut qu'il y ait des normes claires et transparentes, une sorte de cahier des charges afin que la publicité publique soit équitablement répartie sur l'ensemble des journaux, selon leur poids économique et social», a-t-il indiqué. Des défis pour l'avenir de la presse Invités à prendre la parole en début de séance, Zied Dabbar, membre du bureau exécutif du Syndicat national des journalistes tunisiens, Amel Mzabi, présidente du Syndicat des directeurs des médias, Taieb Zahar, président de l'Association des directeurs des journaux tunisiens, et Mahmoud Dhaouadi, président du Centre de Tunis pour la liberté de la presse, ont tour à tour exprimé leur vision des défis à venir. Alors que Taieb Zahar estime peu de progrès ont été observés depuis trois ans en déplorant l'absence de transparence dans la distribution de la publicité publique et des abonnements ainsi que l'absence de fonds de soutien pour la presse en crise, Mahmoud Dhaouadi a exprimé son souhait de ne pas faire subir aux journalistes les effets de cette crise. A l'occasion de l'ouverture du congrès, les membres du syndicat ont rendu hommage à Sami Tahri pour son soutien à la presse, notamment lors de la grève de la faim observée par les journalistes de Dar Essabah.