Klem Ellil, zéro virgule de Taoufik Jebali sera donnée ce soir à l'ouverture du Festival International de Hammamet. Des retouches et des améliorations ont été apportées par le metteur en scène pour adapter la pièce à l'espace. Car, sur la scène élizabéthaine de Hammamet, on a droit à une nouvelle version, beaucoup plus théâtrale. L'effet est tout simplement magique. A ne pas rater! Conçu, voilà un demi-siècle, pour être un festival de création, de recherche et d'expérimentation, dans le domaine du théâtre, de la musique et de la danse, le Festival International de Hammamet a offert pendant cinquante ans, à tous les arts du spectacle classiques et modernes, un champ d'expression qui suscite et appelle des créations nouvelles, servies par des artistes de renom. C'est pourquoi cette édition se tient sous le signe du retour aux sources. Celles de la vocation purement culturelle, comme l'avait pensé et clamé haut et fort ses illustres fondateurs et comme l'avait porté contre vents et marées, ses différents directeurs. Ainsi, dans cette session assez symbolique et singulière, le programme qui accueille à bras ouverts chant, musique et spectacles, fait la part belle au théâtre. D'ailleurs, l'ouverture ce soir de la cinquantième édition assurée par la pièce Klem Ellil, zéro virgule de Taoufik Jebali, est un choix bien réfléchi et qui s'adosse à un argumentaire intelligent. D'abord, à Hammamet, il ne s'agit pas cette année de célébrer uniquement un festival, mais surtout une œuvre architecturale unique en son genre, à savoir, le théâtre concu par Paul Chemtov. Et comme on ne peut honorer un théâtre que par une œuvre dramatique, le choix s'est porté sur une pièce de théâtre. Donc à Hammamet, il ne s'agit pas d'une scène simple, mais d'un théâtre qui constitue la synthèse de la scène antique et de la scène élizabéthaine. De la première il conserve la conception circulaire qui enveloppe le héros dans l'attention de tous. Des plateux de l'époque shakespearienne, il maintient l'élargissement de la scène aux lieux divers qui permettent la représentation simultannée de l'action dramatique. Secundo, l'inauguration du Festival International de Hammamet en 1964, a été assurée par la pièce Othello de Aly Ben Ayed. La version arabe de cette pièce a été considérée par les spécialistes comme un tournant capital dans l'histoire du théâtre arabe. La traduction du Dr Khemiri mettait, pour la première fois, une pièce écrite dans la langue classique à la portée de tous les spectateurs. Tertio, quand il était encore un jeune comédien et un jeune metteur en scène, Taoufik Jebali a trouvé à Hammamet, un giron propice pour apposer son cachet dramaturgique et exposer au public une nouvelle vision théâtrale. Aujourd'hui, il est considéré comme l'une des icônes du théâtre en Tunisie et dans le monde. Le fait qu'il se produit à Hammamet, porte un double hommage. Celui adressé à cette scène qui a toujours fait la part belle au théâtre, alors qu'il était le parent pauvre des autres festivals. Celui adressé à toute la famille du quatrième art, acteurs, comédiens, metteurs en scènes, dramaturges, écrivains, décorateurs, musiciens, etc. A travers Klem ellil, zéro virgule, le dramaturge Taoufik Jebali poursuit sa prospection du souffle tunisien par le biais d'un questionnement philosophique profond d'un angle de vue artistique. Jebali se place toujours dans la même démarche intellectuelle, celle d'un observateur, d'un artiste-philosophe qui prend de la distance de tout ce qui l'entoure. C.B.N. (*) Après la représentation de la pièce Othello en 1964, un bal a été donné à Dar Sébastien Synopsis Dans une morgue, trois corps s'animent pour découvrir que la répression leur a fait perdre leurs traits et que, désormais, ils portent le même visage. Ils ne se rappellent que d'un seul mot «citoyen». Dans cet espace fermé, emblème de la mort, ils ont été à la recherche d'une identité perdue. Recherche qui rappelle celle d'un pays envahi par des êtres étranges, des carnivores qui dévorent même le corps du martyr... Ils transforment la mort en un chemin de vie et les tombeaux en un terrain de guerre et de terreur... Mais voici qu'aujourd'hui le «zéro virgule» signe d'une époque où la vérité a été malmenée au profit du mensonge et de l'obscurantisme collectif ; époque que les services secrets «amis» ont nommée : «La Révolution du Jasmin».