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L'odyssée d'une Tunisienne qui l'a échappé belle
Sécurité — Situation des Tunisiens en Libye
Publié dans La Presse de Tunisie le 02 - 08 - 2014

Deux jours sans boire ni manger, 9 heures d'attente devant les stations-services, règlements de comptes sanglants et meurtriers restés impunis, 10 heures de détention entre les mains des insurgés, Warda en a décidément vu de toutes les couleurs. Et c'est par miracle qu'elle a pu enfin rentrer au bercail. Récit émouvant d'une Tunisienne vivant en Libye, qui n'en revient pas encore...
«Je n'aurais jamais cru que je rentrerais un jour indemne en Tunisie». C'est en ces termes qu'elle entame son récit qui a tout d'une odyssée digne d'un film d'action fraîchement sorti dans les salles de cinéma de Hollywood. Warda Z., 68 ans, veuve, puisque c'est d'elle qu'il s'agit, n'en revient pas encore. Et c'est naturellement avec toutes les peines du monde qu'elle a pu se prêter au jeu des questions-réponses. Elle qui semble encore visiblement traumatisée par les dures épreuves de son aventure rocambolesque.
«Tout a commencé, se remémore-t-elle, avant le mois de Ramadan 2014, lorsque les espoirs engendrés par l'émergence de la branche armée de Hafter commençaient à s'amenuiser comme peau de chagrin. C'est que le général en retraite qui a juré de mener la vie dure aux dizaines de groupuscules jihadistes qui sévissaient en Libye n'a pas fait long feu, en se mettant à collectionner les revers, après un départ tonitruant et prometteur. Venu en sauveur, Hafter a fini par rentrer dans les rangs, d'où le regain de tensions, d'anarchie et de chaos dans le pays. A Tripoli où je vivais depuis les années 70, nous allions en faire l'amère expérience».
Sans foi ni loi
Début Ramadan, commence le calvaire pour Warda. Habituée à aller faire quotidiennement ses emplettes dans la supérette du coin, elle s'aperçut, un jour, que rien ne sera plus comme avant. L'heure est désormais à une terrible pénurie des denrées alimentaires matérialisée par des étalages dégarnis et poussiéreux. «Un jour, deux, trois sans, ça peut aller, mais rester une bonne semaine sans pain, sans huile, sans lait, sans pâtes, c'est trop», déplore Warda qui précise qu'elle a dû se rabattre tantôt sur les voisins pour s'approvisionner en quantités limitées, tantôt sur le marché noir florissant où les produits alimentaires de première nécessité sont écoulés au triple de leurs prix réels. Seuls les barbus armés de kalachnikovs étaient épargnés par cette souffrance.
Eux qui, lorsqu'ils pointent dans un magasin, sont illico presto servis sans la moindre hésitation, sans même prendre la peine de faire la queue. Un jour, j'ai appris que «Am Mokhtar», notre vieil épicier du quartier, a été abattu d'une balle dans la tête, tout simplement parce qu'il n'avait effectivement plus rien à vendre aux jihadistes qui n'y croyaient pas. D'ailleurs, tuer est devenu, en Libye monnaie courante à la portée de tout le monde. Au point qu'au terme de chaque assassinat, le meurtrier ne pense même pas à prendre la poudre d'escampette, persuadé qu'il n'y a personne, alors là personne, qui oserait l'arrêter ! Mais, ce n'est pas fini, car les hors-la-loi qui sévissent partout à Tripoli ont également transformé les stations-services en chasse gardée. Là où, le doigt sur la gâchette et l'air crispé, ils dirigent, à leur guise, les opérations de ravitaillement en produits pétroliers. Quitte à vous obliger à patienter pendant...toute la journée pour avoir enfin droit à quelques litres d'essence pour votre véhicule.
Et malheur à celui qui ne s'exécute pas, car il y a toujours une arme prête à faire instantanément mouche, pour un oui ou pour un non».
Pour Warda et ses semblables, le «feuilleton de la terreur» est riche en autres épisodes les uns aussi dramatiques et apocalyptiques que les autres. Ecoutons-la : «Durant le dernier mois de Ramadan, murmure-t-elle les yeux mi-clos, le cycle infernal de l'anarchie a atteint son apogée. En effet, outre les pénuries non-stop des produits alimentaires et pétroliers, on ne pouvait plus circuler en ville où ne se croisaient que milices armées et véhicules de combat sous un ciel que déchiraient des tirs sporadiques dont on ne comptait plus les balles perdues et les dégâts collatéraux. Et si l'on se hasarde, par miracle, à aller dans une banque, il faut avoir les yeux grands ouverts et la témérité d'un kamikaze pour y parvenir. Une fois atterri à la banque, inutile d'insister : pas question de retirer tout votre argent, et vous êtes à la merci du banquier qui vous verse ce que bon lui semble. En cas de protestation, ce dernier vous renvoie au portier barbu et armé qui vous somme de dégager immédiatement la piste, sous peine de passer de vie à trépas. Et en l'absence des institutions de l'Etat et d'un pouvoir dissuasif, on n'a qu'à obéir aux ordres».
La grande traversée du désert
20 juillet 2014 : Warda, n'en pouvant plus, commence à penser à la fuite. Mais, pour pouvoir rentrer en Tunisie, c'est à un saut dans l'inconnu qu'elle était conviée. «Il fallait, se souvient-elle, réussir à retirer tout son argent de la banque, pour ensuite trouver un moyen de transport sûr pour la grande et dangereuses traversée du désert menant à la frontière tunisienne. Heureusement que ma fille aînée était là pour me secourir, en versant deux mille dollars cash à un banquier corrompu qui me délivrera mon argent pris injustement en otage !
Plus tard, on nous a, ma fille et moi, orientées vers un jeune louagiste libyen rendu crédible et fort prisé par les candidats à l'évasion, grâce à son étroite collaboration avec les jihadistes d'Ansar Echaria. Et c'est au bord de sa 4x4 qu'on a pris la route, non sans lui verser, au préalable, la bagatelle de mille dollars par tête. C'était à prendre ou à laisser, et c'est évidemment à notre corps défendant qu'on a conclu la transaction, pourvu que nous sortions de l'enfer libyen».
Que nenni ! Car la traversée qu'elles croyaient naïvement sûre et sécurisante ne sera pas une promenade de santé, mais plutôt une odyssée qui torturera le cœur le plus froid du monde. Faisant péniblement machine arrière pour rassembler les péripéties de son aventure, Warda nous indique qu'elle avait frôlé la mort en cours de route. «D'abord, se souvient-elle, au sortir de Tripoli où on a dû, la peur au ventre, traverser pas moins de huit faux barrages policiers où, outre la fouille de la voiture et des bagages, on nous bombardait de questions non-stop, qui sur nos origines, qui sur notre situation sociale, qui sur nos relations avec le régime de l'ex-dictateur, qui encore à deux heures passées à la merci de l'humeur du jour du terroriste qui nous retenait. L'un d'eux, pour nous libérer, a exigé et obtenu 500 dollars, alors qu'un autre n'a trouvé mieux que de nous confisquer la roue de secours de la voiture. Qu'à cela ne tienne, puisque l'essentiel était de poursuivre le chemin. Cependant, le pire était à venir.
En effet, à notre arrivée aux portes de la ville de Zouara tombée, elle aussi, aux mains des groupuscules jihadistes, deux jeunes barbus armés de mitrailleuses nous intimèrent l'ordre de nous arrêter, avant de nous sommer de descendre du véhicule. Après nous avoir dévisagés, ils confisquèrent tous nos papiers, ainsi que tout l'argent en notre possession. Les traits tirés, ils nous obligèrent ensuite à les suivre pour nous conduire dans une maison menaçant ruine.
A l'intérieur, il y avait quatre autres barbus dont le caïd qui, chapelet à la main, nous lança, d'emblée, ce missile : «Vous, les loups sauvages du «Taghout» (allusion faite à Kadhafi), vous allez, si Dieu le veut, connaître le même sort que lui. «La bombe lâchée, il donna, ensuite, l'ordre à ses hommes de nous ligoter, ma fille et moi, alors que notre chauffeur, dont on ignorait le sort, aurait été détourné vers une destination inconnue. Notre détention dans une pièce sombre, sale et aux odeurs nauséabondes, durera dix heurs. Notre peur était telle que la mort nous guettait à chaque instant. Et puis, je ne sais par quel miracle tombé du ciel, l'un de nos «geôliers» s'amena pour nous annoncer la bonne, l'incroyable nouvelle, à savoir que le caïd a décidé de nous gracier, au nom des raisons humanitaires.
Notre stupéfaction sera encore plus grande lorsque les hommes de cette milice armée, décidément imprévisibles, nous feront embarquer dans une voiture partie en trombe. Vers quelle destination ? C'est seulement après deux heures de panique et d'anxiété que le chauffeur barbu, qui n'avait pas pipé mot durant le trajet, nous lâcha à quelques dizaines de mètres du poste frontalier de Ras Jédir». Ouf de soulagement...


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