Nécessité d'un document de consensus national sur les enjeux, les orientations et la vision du développement durable ainsi qu'une instance constitutionnelle spécifique Lors de la tenue, mercredi dernier, de la première journée des Assises nationales du développement durable (Andd) organisées par le ministère de l'Equipement, de l'Aménagement du territoire et du Développement durable, M. Samir Meddeb, expert, a présenté le rapport national sur les Andd. Il s'agit des principaux résultats émanant du travail de quatre groupes représentant les secteurs public et privé, la société civile, les experts et les universitaires concernés par le développement durable. Ces groupes se sont, rappelons-le, penchés sur la stratégie nationale de développement durable, l'état des lieux du secteur et sur son rôle de pivot incontournable dans la politique environnementale. Les débats organisés jusque-là ont permis de ressortir, de décortiquer et de réfléchir sur les solutions applicables aux thématiques intrinsèques au développement durable. L'objectif étant de concevoir, au terme de la conférence, un document de consensus national qui cerne les enjeux et les défis nationaux en matière de développement durable, crée une vision et des orientations communes pour asseoir les bases du développement durable et avancer des propositions de mesures applicables à court et à moyen termes. Les thématiques relatives au développement durable s'articulent autour de six axes majeurs, à savoir les modes de production et de consommation, la gestion des ressources humaines, des écosystèmes et l'adaptation aux changements climatiques, l'aménagement du territoire en prenant en considération la ville et le transport, la qualité de la vie des citoyens et la lutte contre les nuisances environnementales, l'éducation, l'innovation et la gestion du savoir et enfin la gouvernance de l'environnement pour le développement durable. L'orateur a insisté sur l'impératif de réconcilier le développement durable et l'environnement pour maintenir l'équilibre écologique et celui des ressources naturelles. Un équilibre qui implique une restructuration en profondeur à même de résoudre le flagrant décalage entre l'état des lieux et les directives mises en place jusque-là en matière de développement durable. Les causes du grand écart Le syndrome du grand écart entre la réalité et la politique du développement durable touche à tous les niveaux sans exception. Le présent rapport dévoile une exploitation irrationnelle des ressources naturelles et de l'énergie. Cela est manifeste aussi bien dans le mode de construction moderne, jugé comme énergivore, que dans les secteurs stratégiques, notamment le tourisme, l'industrie et l'agriculture. Si le tourisme se présente comme un grand consommateur d'espace et d'énergie, l'industrie, elle, est indéniablement le premier responsable de la pollution marine. Quant à l'agriculture, elle ingurgite, à elle seule, pas moins de 80% des ressources hydriques. L'orateur a attiré l'attention de l'assistance sur l'altération multiple du capital naturel. La désertification et la surexploitation des ressources naturelles convergent vers une dégradation éminente du milieu. Par ailleurs, et en ce qui concerne l'aménagement du territoire, il en ressort de grandes disparités régionales mais aussi entre le rural et l'urbain. Le transport — cette composante essentielle de la vie moderne — ne va pas de pair avec les exigences environnementales. Pis encore, il est qualifié d'énergivore et source d'insécurité routière. Il faut dire que le registre environnemental constitue plus que jamais une gangrène qui influe négativement sur la qualité de la vie et sur l'image de la Tunisie post-révolutionnaire. M. Meddeb a parlé d'un dysfonctionnement de l'espace et d'un dérèglement au niveau de la gestion des nuisances environnementales dont les déchets. L'éducation et la gestion du Savoir ne répondent point aux besoins de la Tunisie actuelle, ce qui enfonce davantage le clou d'un développement durable décalé. Le rapport national met en exergue le problème de la mauvaise gouvernance environnementale. Cette dernière se trouve fractionnée malgré les nombrables stratégies et institutions instaurées depuis les années 80. Dans l'absence d'une vision environnementale claire, cohérente et concordante, les résultats restent bien en-deçà de la performance escomptée. Des ébauches de solutions applicables La solution doit réussir l'équation entre politique verte et développement durable. Cette vision-clé est censée pouvoir résoudre ces problèmes aussi bien à court qu'à moyen terme. En effet, intégrer la politique verte ou écologique dans les modes de consommation et de production permettra de rationaliser l'exploitation des ressources naturelles tout en se soumettant aux impératifs d'un développement durable et prometteur. Pour y parvenir, il convient de réfléchir sur un cadre juridique transitionnel et progressif, privilégiant le recours aux énergies alternatives. Parallèlement, stopper le phénomène de désertification et lutter contre les nuisances environnementales s'avèrent être les solutions garantes d'une qualité de vie meilleure. D'où l'impératif d'asseoir les jalons d'une gestion intégrée des déchets. S'agissant de l'aménagement du territoire, le présent rapport appelle à une meilleure contribution de la société dans l'orientation du domaine de construction vers des modèles économiques de l'énergie et de tabler, désormais, sur le transport écologique. Pour ce qui est de l'éducation et de la gestion du Savoir, il est important de tracer des objectifs concordants entre l'éducation, l'enseignement supérieur, la recherche scientifique, le marché de l'emploi et les priorités économiques. Tabler sur l'économie verte nécessite, incontestablement, la garantie d'une gouvernance environnementale sans failles. Pour ce, il convient de miser sur une approche à la fois participative, inclusive et intégrée et d'instaurer, en toute urgence, une instance constitutionnelle du développement durable. M. Meddeb a insisté en outre sur l'impératif de restructurer le cadre institutionnel en prenant en considération les besoins dans les régions afin de réduire la disparité régionale et celle relative aux milieux rural et urbain.