Pour les besoins de la première édition du festival « Visa for music » qui s'est tenue à Rabat du 12 au 15 novembre, Hicham Fellah, délégué général du plus important festival du film documentaire au Maroc (Fidadoc), a assuré une programmation d'une série de documentaires musicaux. C'était l'occasion de lui poser ces questions. Parlez-nous, d'abord, de ce festival Visa for music? Visa for music était le rêve de Brahim El Mazned qui dirige le festival de Timitar à Agadir lors de ses nombreux voyages dans le monde à la découverte de groupes musicaux à produire et il s'est rendu compte qu'il n'y avait aucun rendez-vous musical qui défendrait les artistes du Maghreb, qui participerait à leur promotion et qui accueillerait les programmateurs et les directeurs de festivals du monde. C'est suite à ce constat qu'est né « Visa for music » qui vient d'inverser la donne. Il s'agit de réunir les artistes et inviter les représentants de l'industrie de la musique du Maroc du Moyen Orient et d'Afrique à les découvrir. Il s'agit aussi de donner vie à toute une économie basée sur la création culturelle. Il a fallu un an et demi de travail pour arriver à cette première édition qu'on voudrait un projet structurant et une démarche professionnelle plutôt qu'un évènement ponctuel et passager. Et si Visa for music réussit ce challenge cela permettra l'émergence de musiciens labellisés qui feront les grandes scènes de Mawazine demain. Cette plateforme professionnelle est aussi une première dans la région... Tout à fait, il n'existe aucune rencontre dans la région pensée de cette manière-là avec près d'un millier d'artistes, d'agents de responsables de festivals, de programmateurs, de tourneurs et de producteurs. On espère que cela enclenchera d'autres initiatives dans le genre. C'est un marché au service des artistes et pour les musiques du monde. Mais pourquoi, selon vous, les artistes maghrébins et africains n'arrivent pas à exporter leur musique dans le monde ? Malheureusement, il n'y a pas que la qualité du produit musical qui compte ; il faut savoir se vendre et réussir à toucher ceux qui peuvent produire et distribuer. A côté en fait d'un certain nombre de codes à connaître dans le milieu. Parlons un peu de votre passion, le documentaire. Vous êtes l'un des initiateurs du Fidadoc Le Fidadoc était le rêve d'une marocaine, Nozha Drissi. Elle était une grande productrice de documentaires en France et elle est revenue au pays pour transmettre son savoir-faire et faire connaître la culture du documentaire de création. Cette manifestation a œuvré à montrer des films documentaires du monde entier, s'est adressée à un public jeune. Mais pas seulement, elle avait aussi l'idée, qu'à travers ce festival, des films marocains peuvent être créés et voyager dans le monde. Et c'est une aventure qui dure depuis 8 ans. En janvier 2011, Nozha Drissi a tragiquement disparu dans un accident de la route. Où en sont les choses aujourd'hui ? Le festival grandit mais ne grossit pas. On essaie d'être cohérent dans notre démarche! On veut faire des choses qui aient un sens ! Ce n'est pas un festival glamour, stars et paillettes mais sa principale devise est : « on fait œuvre utile »,on développe un cinéma documentaire qui ne cesse de prendre de l'ampleur dans nos pays. Lorsque j'ai repris le festival suite au décès de Nozha, on était en pleine période de changements et de révolutions dans le monde arabe, et on a assisté à une totale explosion de productions de films documentaires. C'était important pour nous de recevoir, à partir de 2012, tous les réalisateurs tunisiens qui avaient fait les premiers films après le départ de Ben Ali, l'année suivante, on a fait venir le directeur du festival de Damas Doxbox qui est actuellement suspendu à cause de ce qui arrive en Syrie ,et l'année dernière, on s'est penché sur l'état des lieux du documentaire libanais et palestinien. Quelles sont les autres difficultés que rencontre le Fidadoc à part le fait qu'il ne fait pas dans le glamour ? Ce qui est très difficile pour une manifestation comme la nôtre, c'est de trouver un partenariat pluriannuel. On monte progressivement les marches et notre seul partenaire permanent est la chaîne 2M Maroc . C'est vrai qu'au Maroc, on a la chance d'avoir une télé qui soutient le documentaire mais on n'a pas encore le tissu de producteurs qu'il faut, capables d'accompagner les auteurs qui ont le souffle pour mener une si belle aventure qu'est le documentaire. C'est pour ça qu'au Fudadoc, on procède à la formation avec les étudiants des écoles de cinéma à travers des résidences d'écriture durant lesquelles on expertise les projets puis on les envoie dans un marché de coproduction panafricain. Reste à trouver un producteur marocain pour finaliser le projet.