Par M'hamed JAIBI Malgré la forte pression de dernière minute de ses bases, le parti Nida Tounès a fini par entériner le subtil dosage que recèle le gouvernement définitif proposé par Habib Essid, lequel sollicitera aujourd'hui même l'aval de l'Assemblée. Un gouvernement de relance de l'entreprise Tunisie, avec une petite dose d'islamistes lui assurant le vote du groupe parlementaire nahdhaoui. En fait, et le rejet implicite de la première mouture le prouve bien, le gouvernement n'aurait pas pu se passer de l'appui d'Ennahdha, dans la mesure où le soutien du Front populaire s'est avéré fort hypothétique et extrêmement fragile. Composé de onze formations à forte consonance idéologique, le Front pose trop de conditions et n'offre aucune garantie. Certes, l'implication d'Afek Tounès, en plus de l'UPL, aurait suffi à s'assurer une petite majorité, mais cela aurait été au détriment de l'option sociale à laquelle tient Nida, en écho aux attentes populaires et aux objectifs de la Révolution, et en faveur d'une lecture sans nuances des recommandations de la finance internationale quant aux nécessaires «réformes de structure». Le gouvernement Essid II a maintenu, contre vents et marées, son ministre de l'Intérieur pourtant très contesté (sauf par Ennahdha), il a ajusté le premier tir, trop «techno», par un partage des ministères économiques où Slim Chaker et Yassine Brahim tiennent désormais le haut du pavé, il a laissé tomber l'ancien candidat UPL au ministère du Tourisme et il a écarté Khedija Chérif dont les islamistes ne veulent pas. A travers un seul ministre et des secrétaires d'Etat aux pouvoirs habituellement plutôt symboliques, Rached Ghannouchi est en mesure de commercialiser sa thèse de «gouvernement d'union nationale» et les bases de Nida Tounès se prévaloir d'avoir «empêché le pire» : un véritable partage du pouvoir. Mais le fait est là, Ennahdha est partie prenante de l'investiture du gouvernement Essid et pourra, le jour «j», lui retirer sa confiance.