Ce fut l'un de ces concerts d'où l'on sort conquis Un pur régal musical offert, samedi dernier, par de jeunes artistes de la scène alternative tunisienne qui, malgré le manque de promotion et de moyens, font honneur à leur art et à tous ces genres musicaux auxquels ils se réfèrent. Et de la promotion il en aurait fallu plus pour cet événement qui malheureusement n'a pas drainé un grand public. Seul un quart des sièges de la salle de spectacle de l'Agora ont été occupés (près de 100 sièges). Cela dénote d'un manque terrible de communication de la part des teneurs des lieux. Ajoutons à cela le prix plus ou moins élevé des tickets n'aidant pas et n'encourageant pas le jeune public (ceux qui sont au courant du moins) à se déplacer. Cerise sur le gâteau, à l'entrée de la salle on nous fait comprendre froidement (le portier) que l'accès «n'est pas gratuit pour les journalistes». Une responsable finit par s'excuser pour nous signifier que nous ne faisions pas partie des journalistes non grata!!!!!Voilà qui en dit long sur l'accueil et la considération réservés au journaliste et à son métier... Les quelques avertis et chanceux qui sont venus ont pu découvrir, in situ, de purs talents qui nous ont donné, ce soir-là, de grandes leçons de groove. Deux noms à retenir et à suivre Old 9 school et ZoNe'Art! Ils nous donnent à écouter leurs maux Introduit par leur jeune manager Wided Zoghlami, Tiga Black na (Anis Mehwech), Mourad Majoul et Chiheb Ben Lakhal, une formation réduite, pour ce spectacle en acoustique du groupe Old 9 School (fondé en 2007), ne tardent pas à rejoindre la scène. Un nouveau titre pour commencer: «Free man», nous chante Tiga sur les rythmes des guitares de ses deux amis et excellents musiciens. Dans une ambiance intimiste, ils nous prennent les mains et nous entraînent au fil des morceaux: entre autres «insén», «système félet», «biben hdid» de l'album du groupe «Bnedem» (être humain) dont les textes, comme le suggèrent les titres, évoquent l'oppression, le mal-vivre, la quête de liberté d'une jeunesse qui doit jongler, pour exister, avec les problèmes sociaux et l'oppression d'un système qui les écarte. On tombe sous le charme de ces rythmes fluides, et authentiques qu'ils nous servent, avec de subtils dosages alternés entre rap, reggae et autre ska et raggamuffin. De nouveaux titres à l'instar de «Gueddech minou laagal» sur le ras-le-bol, l'angoisse sociale et cette envie de plus en plus tenace, qu'ont nos jeunes en Tunisie, d'évoluer sous d'autres cieux car de plus en plus dénigrés chez eux et «Fanni lik» (Mon art est pour toi) qui parle de cet art qui leur permet d'exister, un art tout droit sorti de la rue, de leurs tripes, et de leur besoin de s'épanouir et de créer. Généreux jusqu'au bout, Majoul et Ben Lakhal donnant la réplique (guitare et chœur) au chanteur Tiga Black na (On a tout de même déploré l'absence de Pazaman, (Amin El Amri), l'autre chanteur du groupe qui avec Tiga forme un duo explosif), nous secouent, tout en rythmes, nous sortent de notre hibernation et nous donnent à écouter leurs réalités. Tendons-leur l'oreille... A suivre La deuxième partie du spectacle fut assurée par le groupe de musique alternative ZoNe'Art, qui eux ne sont pas à leur première apparition à l'Agora. Créé en 2012, le groupe fait, également, dans la fusion entre reggae, ragga, ska, roots, flamenco et autres. Leurs textes dénonciateurs, incisifs et parfois provocateurs viennent refléter le mal de vivre des jeunes mais aussi la détermination du mouvement alternatif tunisien. Une agréable découverte de Mehdi Elhamdi et Kiko Cherni, un duo de virtuoses de la guitare qui nous ont séduits avec une technicité, une sensibilité et une énergie épatantes. Un groupe à suivre sur lequel nous reviendrons prochainement!