De la FTT au ministère des Sports, en passant par les clubs, les entraîneurs et les parents, le système bloque et la relève se fait rare. Rien n'aura changé, le tennis tunisien continue de plonger si bas avec un nombre de joueurs performants qui diminue d'une année à une autre. Nous vivons toujours le syndrome «Jaziri et Jabeur», deux brillants joueurs qui cachent une énorme forêt de ratages. Malek Jaziri et Ons Jabeur et qui après? Nous posons cette question depuis des années sans qu'il y ait une réponse convaincante. Les performances de Malek Jaziri et de Ons Jabeur escamotent encore un constat alarmant : la relève se fait rare, les quelques joueurs qui ont choisi de passer par une carrière professionnelle souffrent encore ou finissent par disparaître complètement. On vous répète la question: y a-t-il un système efficace pour orienter les quelques talents valides vers une vraie carrière professionnelle ? Pourquoi le décor est-il vide hormis ce que font Malek et Ons? Ces questions sont si complexes. Un seul article ne suffira pas pour toucher à tous les aspects du problème. De la FTT (qui demeure le premier responsable de la programmation de l'élite) au ministère des Sports (pourvoyeur de fonds fondamental pour les programmes de l'élite), en passant par les clubs de tennis (qui privilégient le tennis de loisirs à celui de compétition), les joueurs eux-mêmes et surtout leurs parents (qui veulent tout faire au point d'étouffer leurs enfants), les entraîneurs formateurs, tout le monde a une part dans cette régression du tennis d'élite en Tunisie. Le constat est effrayant, surtout du côté des féminines où la quantité et la qualité des joueuses d'élite sont loin d'être rassurantes. Que faire alors? Changer d'approche Malek Jaziri et Ons Jabeur ont réussi, chacun à son niveau, parce qu'ils avaient un talent fou et certain, bien capitalisé. Ils avaient surtout un long souffle et un bon encadrement de la part de la DTN de l'époque. Aujourd'hui, franchement, l'entité technique à la FTT a perdu de sa valeur et de sa compétence. Le poste de DTN, poste-clé, a été fragilisé depuis des années avec un inconcevable nombre de départs et d'arrivées. La FTT est-elle obligée de faire le suivi et la gestion de l'élite? Ça c'est certain, mais jusqu'à un certain âge comme on le fait dans le monde entier. La DTN a complètement raté sa vocation avec des programmes et des plans légers pour détecter les talents de 8 à 12 ans, puis pour aider le joueur ou la joueuse à aborder le circuit «pro». Les circuits nationaux ou régionaux, les championnats arabes et les autres «produits» peuvent-ils aider à produire des champions? L'expérience dit non. Ceux qui veulent réussir doivent exercer à l'étranger et se mesurer au monde impitoyable du tennis de haut niveau. La FTT et le ministère doivent revoir leur façon de gérer l'élite. C'est un système à changer en grande partie, en collaborant plus avec les clubs et les entraîneurs-formateurs. du côté des clubs, c'est un vrai carnaval. Le circuit élite n'existe pas au vrai sens du terme et s'il existe, il est broyé par le tennis de loisirs et le circuit des tournois nationaux de faible niveau. On a besoin d'aller plus vers une approche où les fonds limités doivent être administrés vers les joueurs qui ont un vrai potentiel, vers les clubs qui collaborent avec la DTN. Le tout avec un choix minutieux du programme du jeune talent et un suivi de ce qu'il fait comme performances. Arrivé à un certain âge, à un certain palier, celui du statut professionnel ATP ou WTA, la FTT doit se désengager petit à petit. C'est le rôle du joueur lui-même de réflechir à sa carrière en personne avec l'appui d'un staff adéquat. Le ministère peut intervenir pour financer une partie de cette carrière; la FTT peut apporter un appui «technique», mais c'est le joueur professionnel lui-même qui doit rentabiliser son talent et y aller tout droit. Un joueur de haut niveau jusqu'à 18 ans est parrainé par son club et par la FTT qui doivent mobiliser des sponsors et multiplier les tournois pour permettre à ce jeune de se faire un nom. Après, c'est une autre approche. Malheureusement, la FTT perd de vue des joueurs de haut niveau qui choisissent les études universitaires Outre-Atlantique en général au détriment d'une carrière professionnelle. Parents étouffants L'un des problèmes dont souffre l'élite du tennis est le rôle des parents des joueurs. Disponibles, soucieux de suivre les performances de leurs enfants, bailleurs de fonds de la carrière de leurs enfants, les parents se transforment souvent en un problème lorsqu'ils pénètrent le chapitre technique. Ils interfèrent dans tout à tort et à raison dans la plupart des cas. Ils veulent gérer la carrière de leurs enfants comme ils le voient eux-mêmes, en voyant en leurs filles et garçons des Serena Williams ou des Roger Federer, et empêchent les dirigeants et surtout les entraîneurs de faire leur travail. Le phénomène est mondial : des athlètes finissent par se perdre à cause des interférences de leurs parents qui gèrent leurs carrières. En tennis, ce phénomène est général. Aujourd'hui, la DTN et les clubs (qui commettent de nombreuses erreurs fatales) sont otages en partie de la pression des parents. Une bonne partie livre une course effrénée pour imposer leurs enfants en sélection. Parfois, ils ont raison (certains d'entre eux dénoncent l'injustice envers leurs enfants), souvent en empêchant les joueurs de bien se placer au niveau mondial. Un joueur professionnel a besoin d'un staff compétent qui sait lui offrir les conditions de réussite. Il a besoin souvent de se libérer et de vivre les aléas et les moments de gloire lui seul. Et sans être protégé à chaque fois.