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Ahmed Néjib Chebbi: le dernier combat
Publié dans Leaders le 13 - 06 - 2014

Quand il s'agit de juger ses anciens alliés, Ahmed Néjib Chebbi ne fait pas dans la nuance. L'UPT? Le Front du salut? Le Dialogue national? «Des coquilles vides, ils ont fait leur temps», explique-t-il avec un brin de mépris.
Cela est dit sur le ton de l'évidence. Sur sa lancée, il tire sur tout ce qui bouge. Il ne fait pas bon être aujourd'hui en désaccord avec le président d'Al-Joumhouri. Il renvoie dos à dos Nidaa et Ennahdha, «deux partis obnubilés par le passé», alors que son parti «est tourné vers l'avenir», s'en prend à Béji Caïd Essebsi, «un homme que j'aime bien…mais avec qui je n'ai pas d'atomes crochus…», répond du tac au tac à Hamma Hammami, l'ancien compagnon de lutte qui l'avait appelé à plus de constance, en lui rappelant que «charité bien ordonnée commence par soi-même», justifie la motion de censure contre Amel Karboul et Ridha Sfar et le retrait du Bloc démocratique à l'ANC.
L'homme enchaîne les virages à 180° avec la dextérité d'un champion de formule 1 au risque de désarçonner ses amis qui ont bien du mal à se retrouver dans sa dialectique. Heureusement qu'il y a les inconditionnels qui n'hésitent pas à se livrer à des contorsions intellectuelles pour justifier le nouveau positionnement de Si Néjib. Il se targue d'être le seul à avoir une pensée politique qui se résume en 5 points : la restauration de l'autorité de l'Etat, la sécurité, l'amélioration du pouvoir d'achat, l'emploi des jeunes et le développement régional.On tombe en pamoison devant l'originalité de ces propositions. Quand on lui objecte qu'en agissant de la la sorte, il risque d'affaiblir l'opposition, il répond que l'histoire lui donnera raison, comme elle l'avait fait pour ses prises de position antérieures : son opposition à la dissolution du RCD et à l'article I5 dont les dispositions ont été reprises dans l'article 167 de la loi électorale, entre autres.
Mais on n'a rien dit si on n'a pas parlé des ambitions présidentielles de Chebbi : une idée fixe qui, à mesure qu'on s'approche des échéances électorales, a tourné à la monomanie. A 70 ans, il estime qu'il est bien placé pour s'installer à Carthage pour le prochain quinquennat, malgré les 2% d'intentions de vote dont le créditent les instituts de sondage. Ce serait une belle consécration pour lui Il suffit de recueillir 800 000 voix pour accéder au second tour où il retrouvera…Si Béji. «La partie est jouable», estime-t-il. Il y a quelque chose de pathétique à voir Ahmed Néjib Chebbi s'escrimer à nous faire partager son optimisme alors que la situation est bien plus compliquée.
Les élections, c'est réellement le fil d'Ariane qui peut nous aider à voyager à travers le labyrinthe de sa pensée et du coup, cela donne de la cohésion et de la cohérence à ses actes et ses déclarations. Les renversements d'alliances, l'agressivité à laquelle il ne nous avait pas habitués, les fanfaronnades s'insèrent tous dans une stratégie de conquête du pouvoir.
Ahmed Néjib Chebbi, le leader incontesté du parti Al-Joumhouri revenu à son identité PDP, va certainement livrer à la fin de l'année l'ultime combat d'une vie politique bien remplie. Car sa religion est faite, même s'il n'a pas encore annoncé sa décision, même si son parti ne l'a pas désigné officiellement. Ce sera chose faite dès que la date des élections sera connue, nous précise-t-il. Au passage, il note qu'il est favorable à des dates séparées pour les deux scrutins avec en premier l'élection présidentielle qui sera déterminante et entraînera le reste.
C'est évident que pour lui et pour son parti, cette élection sera prioritaire. Il s'en explique longuement : selon la Constitution, le président de la République aura des attributions importantes, dont celle, essentielle, d'être le garant de l'application de la Constitution. Celle-ci est encore à l'état de texte. «Il faut la mettre en œuvre, surtout mettre en œuvre les libertés et les droits énoncés par la Loi fondamentale, mais aussi installer les instances indépendantes prévues par la Constitution et également défendre l'identité du pays». Selon lui, c'est ce vaste chantier confié au président de la République qui sera le sien, dès sa prise de fonction à Carthage. Le chef de l'Etat jouit de la «légitimité populaire» acquise aux élections, ce qui lui donne une primauté, d'autant que lorsqu'il assiste au Conseil des ministres, c'est lui qui le préside.
Carthage en point de mire
L'élection présidentielle, il s'y prépare sérieusement. Quelle équipe le secondera dans sa campagne?. Elle est déjà formée, nous dit-il, composée de jeunes de moins de vingt-cinq ans. L'équipe rapprochée compte une coordinatrice, une chargée com, une chargée des études ainsi que des responsables régions et réseaux. Elle est plutôt féminisée (3 sur 5). Trois poids lourds en font partie en tant que conseillers: Ali Hachani, diplomate chevronné et ancien ambassadeur de Tunisie à l'ONU comme conseiller diplomatique, un militaire à la retraite, le colonel-major Mahmoud Mzoughi en tant que conseiller défense et sécurité, et Taëb Houidi en qualité de conseiller économique. On ne peut être plus clair que dans sa tête, il est déjà candidat. Comme huit autres au plus, pronostique-t-il.
Parmi eux, il y aura Moncef Marzouki et Mustapha Ben Jaafar à qui il ne demande pas de démissionner pour mener leur campagne électorale, car aucune disposition dans la loi d'organisation des pouvoirs publics ne les y contraint. «Il faut être vigilant pour qu'ils n'utilisent pas les deniers de l'Etat dans leur campagne électorale», se contente-t-il de répondre à notre interrogation.
Ne demandez pas à Néjib Chebbi s'il croit vraiment en ses chances alors que la plupart des instituts de sondage le créditent de 1 à 2% des intentions de vote. Il est sûr d'accéder au moins au second tour et pour convaincre son interlocuteur, dubitatif, il ne fait pas dans la modestie: «Les Tunisiens me respectent», nous confie-t-il. Il a eu l'occasion de le constater à chacune de ses visites à l'intérieur du pays. Le sondage que son parti a commandé et qui se base sur un choix de noms de «candidats potentiels» et non sur une réponse spontanée des sondés a fini par emporter sa conviction. Joignant le geste à la parole, il sort son stylo et un bout de papier sur lequel il inscrit les noms des deux pôles du paysage politique tunisien que sont Nidaa Tounès et Ennahdha, crédités chacun de 30% des intentions de vote.
Entre les deux, il inscrit les 40% d'indécis. C'est parmi ceux-là (2 millions si l'on s'en tient à la proportion d'électeurs en 2011) qu'il compte réunir le chiffre magique que les Américains appellent le «winning number», qui tourne autour de 800.000 voix. Lequel chiffre permettra à celui qui l'obtient d'être qualifié au second tour. Selon toute vraisemblance, son adversaire sera le président de Nidaa Tounès, Béji Caïd Essebsi. Cette hypothèse n'est pas celle qu'il aurait souhaitée mais «contre mauvaise fortune on fait bon cœur», a-t-il l'air de dire. Avec BCE, «un homme qu'il respecte et qu'il affectionne, mais…». le courant ne passe pas. Et c'est peu dire.
Il y a incompatibilité totale entre les deux hommes et puis, Nidaa Tounès, comme d'ailleurs Ennahdha, est un «parti qui regarde vers le passé», alors que lui et son parti sont tournés vers l'avenir. Mais à l'évidence, il convoite les voix islamistes. Il rappelle leur combat commun pendant les années de braise. «Ils m'ont toujours trouvé à leurs côtés dans les épreuves qu'ils ont endurées», confie-t-il. Il paraît convaincu qu'Ennahdha ne présentera pas de candidat à l'élection présidentielle, car le mouvement islamiste craint non seulement de ne pas être au second tour mais par-dessus tout, il a une appréhension terrible d'être vaincu à plate couture.
Ahmed Néjib Chebbi est convaincu que le prochain président sera «un représentant des forces modernistes» par opposition aux forces que sont les islamistes —mais sans qu'il le dise pour ne pas les effaroucher— et les gens de Nidaa Tounès formé de destouriens nostalgiques de Bourguiba. Il se voit bien en cet homme-là. Car il se considère comme l'homme qui n'a jamais renié son histoire personnelle d'opposant historique à la dictature, celle de Bourguiba comme celle de Ben Ali, ni les valeurs sur lesquelles il a fondé ses choix politiques.
Ces valeurs, il tient à les détailler, ce sont les «libertés et la démocratie inclusives, c'est-à-dire pour tous»; «la quête de l'équité et de la solidarité sociales»; «un patriotisme sourcilleux chevillé au corps fait de fierté envers tout ce que représente la Tunisie, son histoire, sa culture, sa langue»…, «l'attachement à la modernité et au progrès». Dans son combat pour ces valeurs, il dit qu'il n'a pas d'idéologie, mais une «pensée politique» qui le guide. Ainsi en 2011, contre Ennahdha, il n'a pas mené un combat contre les idées que le parti islamiste a prônées mais «contre l'hégémonisme et le conservatisme» qu'il a représentés.
Une dynamique de victoire
Ahmed Néjib Chebbi fera tout donc pour accéder au second tour, non seulement parce qu'il le rapprochera de Carthage, mais parce que cela va créer une dynamique de victoire qui profitera à son parti. Sur les 800 000 voix escomptées, 400 000 devront tomber dans l'escarcelle d'Al-Joumhouri lors des élections législatives qui s'ensuivront. Ce parti présentera des listes dans toutes les circonscriptions électorales, nous précise-t-il. «Le process» de choix et d'investiture des candidats est en voie d'être mis au point, ajoute-t-il sans trop s'étendre sur la question. Lui, mènera la campagne présidentielle et tous ses efforts y seront concentrés. D'autres dans la direction du parti seront responsables de la campagne législative. Probablement, cette campagne sera conduite par la secrétaire générale du parti Maya Jéribi.
Au fait, où est passée la pasionaria au tempérament de feu d'Al-Joumhoury? Elle se fait discrète ces derniers temps puisqu'on la voit peu sur les médias, lui fait-on observer. Posez-lui la question, nous répond-il, lapidaire. On n'en saura pas plus. Parmi les fidèles des fidèles, il y a certainement son frère et porte-parole du parti, Issam Chebbi, mais aussi Iyed Dahmani, omniprésent à ses côtés et certainement l'un des plus proches collaborateurs s'il accède à Carthage inch' Allah. Ahmed Néjib Chebbi ne renie rien de son passé. Les pages glorieuses comme celles qui prêtent à polémique, pas même d'avoir signé le «Pacte national» avec Ben Ali en 1988 au nom du Rassemblement socialiste progressiste (RSP), l'ancêtre du PDP.
Il n'a pas l'air de regretter, non plus, tout ce qu'il a fait depuis la révolution. Surtout depuis les élections d'octobre 2011.Avoir rompu avec Al-Massar, avoir quitté l'Union pour la Tunisie, le Front du salut et le Dialogue national. Pour se donner bonne conscience, il rappelle où en sont toutes ces entités actuellement. Pratiquement au point mort.
On lui reproche son inconstance. Il n'en a cure. On lui fait grief de la tiédeur de sa position concernant la disposition sur l'exclusion; il s'en défend en rappelant que, lorsque l'article 15 a été inscrit dans le décret-loi portant convocation des électeurs en 2011, «j'ai été le seul à me dresser contre. Nous avons combattu l'exclusion en indiquant que ceux qui étaient accusés parmi les responsables de l'ancien régime devraient rendre des comptes personnellement devant une justice indépendante». «Sur cette question, je n'ai pas changé d'avis», soutient-il. «Je l'ai fait non pas par calcul électoral, mais parce que c'était l'intérêt de la Tunisie», ajoute-t-il. Sur l'interpellation des ministres du Tourisme et de la Sécurité au sujet de l'entrée de détenteurs de passeports israéliens, il n'en démord pas.
C'est d'abord une «pratique démocratique de base» pour mettre les points sur les i et non pour censurer les deux ministres, dit-il, en précisant qu'en plus de cinquante ans de pratique de la motion de censure par la Vème République en France, une telle motion n'a abouti qu'une seule fois à la censure du gouvernement. Il a justifié le fait d'avoir retiré la motion de censure pour y substituer une déclaration que le retrait est possible en Tunisie et que «nous avons eu recours à cette méthode».
Sur tout ce qui s'est passé depuis les élections de l'ANC, il est plus que prolixe, rappelant les faits dans les détails depuis ce soir du 23 octobre 2011 quand il avait félicité les vainqueurs et déclaré que sa place était désormais dans l'opposition et jusqu'au«choix non consensuel» du chef du gouvernement Mehdi Jomaa que «nous avons pourtant soutenu et à qui nous témoignons toujours le préjugé favorable en lui souhaitant de réussir, car sa réussite est celle de la Tunisie», en passant par l'épisode Ahmed Mestiri, défendu mordicus.
Pour lui, «avoir eu raison avant les autres» est une évidence. Même si on lui dit que cela ne constitue pas forcément une qualité pour l'homme politique qu'il est, il reste droit dans ses bottes. Il a choisi son chemin et ce n'est pas maintenant qu'il va changer. Même cette phase «élargissement-rétrécissement» du parti Al-Joumhouri qui s'est soldée par un échec, il ne la regrette pas. «C'est mieux ainsi», l'entend-on dire, car son parti le PDP a gardé son identité. Il ne regrette que la défection de ceux qui étaient ses camarades de parti comme Mohamed Hamdi et ceux qui l'ont suivi (entendez ceux qui ont formé avec ce dernier l'Alliance démocratique), parce que ceux-là font partie de sa famille.
Hedi Behi, Taoufik Habaib, Raouf Ben Rejeb
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Tags : Al-Joumhouri Nidaa Tounes ennahdha Amel Karboul Ridha Sfar ANC RCD Ahmed Néjib Chebbi Béji Caïd Essebsi Hamma Hammami ONU Maya Jéribi Ben Ali


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