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Quand l‘inadaptation des jeunes diplômés résulte d'une mal-formation !
Publié dans Leaders le 18 - 12 - 2015

Le système éducatif tunisien révèle de nombreuses heures de cours, des enseignements fondamentaux plus qu'assimilés, mais indéniablement des méthodes d'enseignement obsolètes et à revoir. C'est ce qui apparaît dans le rapport - OCDE “Regards sur l'éducation 2015”. Il ressort que ce n'est pas la quantité des cours qui en constitue le point faible, mais c'est plutôt la répartition du temps de travail des élèves et étudiants. Ils ne fréquentent les bancs de l'école qu'entre 162 jours et 185 jours par an en moyenne, du fait des nombreuses vacances scolaires et d'une semaine réduite à 4,5 jours.
Mais le paradoxe de l'école tunisienne est que si la Tunisie est un pays où la scolarisation est possible et largement diffusée dès l'âge de 3 ans, elle est aussi l'un des pays du monde à consentir le moins de dépenses, financièrement parlant, pour les élèves (entre 6.000 et 8.000 euros). C'est moins que l'Italie, le Chili ou le Mexique, et très en deçà de ce que dépensent la Suisse (16.407 euros) ou les Etats-Unis (13.858 euros). Or l'étude de l'OCDE nous enseigne qu'il est urgent de revoir la qualité de des enseignements ainsi que les méthodes didactiques et pédagogiques. Pour ce faire il faut encourager les enseignants à investir dans leur métier et cela doit passer nécessairement par une meilleure rémunération entre autres choses. Mais ce n'est pas tout. Il faut aussi mettre en place une façon différente d'enseigner aux élèves qui tient compte davantage du rythme personnel de chacun.
Il faut aussi renforcer la formation continue des enseignants, augmenter les moyens des établissements situés dans des zones défavorisées, limiter la taille des classes et le nombre d'élèves par classe avec un maximum de 15. En effet plus il y a d'élèves et moins l'enseignant pourra contrôler sa classe et maintenir la discipline. Il est donc primordial d'éviter les classes surchargées.
Mais l'école tunisienne souffre aussi d'un désaveu flagrant et du manque de confiance croissant des parents surtout pour les institutions scolaires publiques. Cela se traduit par un phénomène dramatique de décrochage scolaire d'abord et par une migration vers l'éducation privée ensuite. Concernant l'abandon du circuit éducatif, la Tunisie a connu une progression record avec plus de 100 000 élèves pour la rentrée 2012-2013, 110 000 en 2013-2014. Pour ce qui est des inscriptions dans le privé la Tunisie a connu cette année 22 000 inscriptions de plus.
Dans un autre domaine, il est à constater que les écoles tunisiennes envoient plus d'étudiants à l'étranger qu'elles n'en accueillent. Ce n'est pas une première, mais plutôt une opportunité financière manquée pour nos établissements toujours en quête de nouvelles sources de revenus ! Les grandes écoles tunisiennes ne s'internationalisent pas car elles ne sont pas visibles dans la vitrine internationale. Accueillir des étudiants internationaux représente indéniablement une manne financière salutaire pour des établissements, qui voient les ressources de l'Etat se réduire comme peau de chagrin. Face à nous, les Etats-Unis génèrent 27 milliards de dollars, en accueillant chaque année près de 800.000 étudiants étrangers et ce, malgré des frais de scolarité exorbitants, (rapport Open Doors de l'Institut de l'éducation internationale américain). Par ailleurs, 20% des étudiants maghrébins vont étudier en France après le Baccalauréat, ce qui constitue une augmentation des effectifs d'étrangers de +35,8% en 2 ans pour ce pays.
Il semble urgent de comprendre quelle est la pierre d'achoppement qui peut exister entre les jeunes et les employeurs lorsque l'on observe un taux de chômage de 24,6% chez les moins de 25 ans. Il faut alors que l'on s'interroge sur les formations académiques pour déterminer si elles sont concrètement en phase avec le monde professionnel. D'autant que des études internationales récentes (rapports du Centre d'études et de recherches sur les qualifications, établissement public français à caractère administratif qui réalise des études internationales dans les domaines du marché du travail, des qualifications et de la formation professionnelle) semblent prouver que non ! Sur le plan des connaissances transmises certes, nous formons des têtes bien pleines, mais tout semble démontrer qu'elles ne le sont pas avec les bonnes compétences. Il ressort de ces études que les jeunes diplômés de niveaux bac à bac+5 sont effectivement plutôt bien formés dans leur domaine de spécialisation. Si nous consultons une base de données métiers, comme celle du « répertoire nationale des certifications professionnelles » (RNCP) français, nous devons admettre que les compétences acquises dans un diplôme reconnu par l'Etat permettent de garantir une base de connaissances avérée.
Néanmoins, si nos diplômés semblent très doués dans leur domaine, ils le sont moins en matière de savoir-être et de savoir-faire en situation professionnelle réelle ou en entreprise. Pour les recruteurs des ressources humaines, leurs faiblesses viendraient, de la défaillance du volet créativité et de l'esprit entrepreneurial ainsi que du défaut grave de compétences pratiques, de sens de l'analyse, d'esprit de synthèse mais aussi d'un manque de maîtrise des langues étrangères. En effet les principales compétences professionnelles attendues par le marché de l'emploi aujourd'hui sont : L'efficacité, l'adaptabilité, la rigueur, le sens de l'organisation, le sens de l'analyse, la sociabilité, la créativité, l'ambition professionnelle, l'esprit d'ouverture, l'esprit de synthèse. Pour ce qui concerne les compétences plus techniques, le niveau est inégal et le bilan mitigé. Les mieux formés semble-t-il seraient les élèves des écoles d'ingénieurs. Un même constat pour ceux qui optent pour les mastères en Sciences fondamentales (de la vie et de la terre, en chimie, informatique, mathématiques…). En revanche les mastères en sciences humaines et sociales (droit, sciences politiques, économie, langues,…) semblent moins efficaces. Si l'on évalue l'écart moyen entre le niveau de compétences générales acquis en formation et le niveau requis dans l'emploi, on obtient des résultats alarmants.
Ainsi l'évaluation de l'écart entre les compétences acquises et celles requises, sur une population de diplômés Bac + 5 en 2014 a révélé un déficit moyen de compétences entre +0,5 et -1,185 selon les spécialités et les critères pris en considération.

Ces données sont édifiantes sur le déficit de compétences des diplômés et du coup il semble que les diplômes doivent être perçus comme inutiles dans la recherche d'un emploi. C'est ce que considèrent 40% des jeunes lorsqu'ils sont interrogés sur la finalité de leur certification. Le diplôme n'est de nos jours qu'une clef pour ouvrir la porte du marché de l'emploi, peu importe comment il a été acquis, avec mention ou sans, ou même laquelle. Ce qui vas jouer un rôle décisif dans la sélection, ce seront les compétences telles que l'efficacité, l'adaptabilité, la rigueur, le comportement au travail et le caractère relationnel de ce comportement. Selon les estimations, ces compétences seraient mieux développées dans les écoles de commerce et leurs diplômés seraient ainsi mieux à même de montre de ces prérequis, contrairement aux diplômés des mastères, notamment des filières scientifiques et techniques, ou d'économie et gestion.
Toutefois ces résultats ne supposent pas la supériorité des formations dispensées par les écoles de commerce. Ces institutions bénéficient tout simplement d'un phénomène de mode et d'une représentation et d'une notoriété positive socialement auprès des diplômés. Si l'accent de la formation est mis sur la compétence de communication, elle est faible sur les compétences spécifiques transversales telles que l'exploitation des données, la communication stratégique l'animation d'équipes, etc. par ailleurs les universités ne faillissent pas et excellent même, pour certaines, dans la transmission des connaissances académiques et méthodologiques. Mais aucune institution n'a de cursus parfait, loin s'en faut. Le problème semble être ailleurs. Notre jeunesse manque de maturité et d'esprit d'initiative. Ils sortent visiblement très savants des écoles, mais ils souffrent d'un grave déficit de savoir-faire et de savoir-être et sont acculturés car ils manquent indéniablement de culture générale. Ces éléments sont difficiles à acquérir et ne peuvent certainement pas l'être sur les bancs des écoles ou des facultés. L'expérience et une culture générale solide se construit tout au long d'une vie dans la confrontation aux problèmes du quotidien et du combat qui y est mené.
Depuis 2008, la loi 2008/19 du 25 février 2008 relative à l'enseignement supérieur dans son titre V prévoit l'évaluation, l'assurance qualité et l'accréditation comme mécanismes fondamentaux pour réaliser les objectifs d'amélioration de l'enseignement supérieur. L'enseignement supérieur a ainsi fait vœu de s'engager dans une démarche qualité et de faire en sorte qu'en 2025, les institutions d'enseignement supérieur tunisiennes soient accréditées en partie en partie dans un premier temps et totalement dans une deuxième étape, ce qui permettrait une visibilité internationale et une reconnaissance au niveau international des compétences acquises par les diplômés. Pour cela, des systèmes de management de la qualité doivent être mis en place au sein de chaque établissement dans le cadre d'un processus d'amélioration continue. Ce processus est défini dans des politiques qualités et des engagements souscrits, qui s'inspirent directement des standards internationaux et des normes et référentiels (ISO 17024, IWA 2, ISO 17025), mis en place. La qualité et la visibilité doivent devenir des impératifs vitaux, dans les prochaines années, pour la pérennité des institutions et du système éducatif tunisien.
Vendredi 18 decembre 2015
Monji Ben Raies
Universitaire
Enseignant et chercheur en droit public
Université de Tunis-El-Manar
Faculté de droit et des sciences politiques de Tunis


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