L'Institut Supérieur des Sciences Humaines de Tunis (l'ex-Lycée Ibn Charaf) vient de créer six nouveaux mastères, ce qui élève à dix le nombre total des mastères créés dans ce petit établissement perçu jusque-là comme de moindre envergure académique que la Faculté des Lettres de la Manouba et que la Faculté des Sciences Sociales du 9 Avril. Les nouveaux mastères sont créés dans les spécialités suivantes : psychologie du travail (mastère professionnel créé dans le cadre du projet Tempus), psychologie de l'enfant et de l'adolescent (mastère professionnel), les études culturelles d'anglais (mastère de recherche LMD), Anglais et relations internationales (mastère professionnel), l'esprit maghrébin en langue, littérature et civilisation arabes, littérature et langue françaises (tous deux mastères de recherche LMD). Seul le projet de mastère « langues et civilisations anciennes » a été refusé en cette année de la Révolution qui a vu les mouvements de grève, les sit-in et les protestations des étudiants donner leurs fruits afin que soient ouverts plus d'horizons aux diplômés du régime LMD. « C'est, nous explique M. Taoufiq Aloui, directeur de l'Institut, dans la logique même de l'appellation LMD, on ne peut pas s'arrêter à la licence seulement mais il faut ouvrir la voie pour des études de mastère et de doctorat. Je me félicite de ces nouveaux mastères pour la création desquels l'institut a présenté plusieurs demandes sur plusieurs années. J'ose espérer maintenant que cet acquis sera suivi par un autre, à savoir la création dans notre établissement d'une école doctorale. 10 mastères et une école doctorale, cela donnera une autre stature à l'Institut Ibn Charaf au sein duquel on déplore néanmoins qu'il soit le seul établissement de la capitale qui ne soit pas doté du cadre ni des moyens susceptibles de lui permettre la publication des thèses, articles et livres des enseignants chercheurs. Merci donc à la révolution et aux étudiants qui ont contribué à leur manière au rayonnement futur de leur institut ! ». Nous avons par ailleurs appris que l'inscription aux mastères au titre de l'année universitaire 2011-2012 a commencé ; à ce sujet, la direction de l'institut supérieur des sciences humaines de Tunis informe les candidats que les pièces à réunir dans les dossiers d'inscription sont les suivantes: une copie de la carte d'identité nationale, une copie conforme des diplômes (baccalauréat, maîtrise et licence), un relevé des notes de l'année universitaire écoulée, trois photos d'identité, un formulaire d'inscription dûment rempli (à retirer auprès de l'administration de l'Institut) et deux enveloppes timbrées portant l'adresse du candidat.
Le Mastère, et après ?
Si la création à l'Institut Ibn Charaf de six nouveaux mastères réjouit sa direction et répond favorablement aux revendications des étudiants, quelques problèmes anciens risquent de se poser de nouveau au début ou au milieu de la prochaine année universitaire. D'abord, on sait qu'en tête des requêtes pressantes des étudiants qui ont justement milité pour les mastères cités, figure le rejet de la sélection dans les candidatures aux études de troisième cycle. Ils revendiquent en effet un passage automatique de la licence (ou la maîtrise pour les repêchés de l'ancien régime d'études) au mastère. Saura-t-on absorber tout le flux des candidats ou bien choisira-t-on la confrontation avec les étudiants en refusant certaines candidatures. Il y a des portes qui, une fois ouvertes, sont très difficiles à fermer et même à entrebâiller. Or, en 2011, on a concédé plusieurs « droits » aux étudiants, parfois même en contournant les textes officiels et en les interprétant chacun à sa façon. Sur un autre plan, il faut penser au taux d'employabilité qu'offre le système LMD aussi bien pour les mastères professionnels que pour les mastères de recherche. S'agira-t-il là encore d'accentuer l'inflation et la dévaluation des diplômes supérieurs ? Le risque est grand plus tard que le feuilleton « tous chômeurs ou étudiants » (Abdessalem Mahmoud dans le bulletin « l'universitaire », juin 2009) se poursuive, dans la mesure où la réalité du marché de l'emploi sera plus difficile les années à venir qu'on consacrera sans doute à résorber le chômage des « vieux » diplômés. Ce n'est guère pour jouer aux Cassandre que nous rappelons ces difficultés, mais nous ne voulons pas continuer à tourner dans un cercle vicieux ni à promettre la lune à nos jeunes pour plus tard les abandonner au milieu des ténèbres !