Si le débat en cours à propos du projet, proposé par le président de la République Beji Caied Essebsi concernant les libertés individuelles est nécessaire et intéressant, il est malheureux de constater encore une fois l'immaturité de certains qui confondent entre critiquer une approche et attaquer la personne avec qui on ne partage pas les idées. Je cible certains qui en appellent même à la violence physique envers les membres de la commission COLIBE oubliant qu'ils auront une responsabilité morale et pénale si jamais quelques inconscients passent à l'acte. De plus, en lisant les commentaires de certains sur le social network on a l'impression qu'ils n'ont même pas lu le projet en sa totalité. En dehors des divergences concernant la dépénalisation de l'homosexualité etde l'égalité entre frères et sœurs dans l'héritage rien ne semble les intéresser. A mon avis la participation au débat ne devrapas s'exprimer uniquement par un choix binaire oui ou non, par un débat citoyen. C'est exactement ce que tente de mettre en place la commission et que les esprits étriqués veulent bloquer à tout prix! Je voudrais ici appuyer et attirer l'attention sur d'autres thèmes qui me semblent eux aussi nécessiter des amendements courageux. Le droit à La nationalité La proposition est de passer de 4 ans de mariage à 2 ans pour que le conjoint puisse avoir la nationalité tunisienne. Apparemment la proposition actuelle améliore le texte précèdent mais si on regarde de près le texte oblige le conjoint à passer ces 2 ans sur le territoire tunisien, c'est à dire si le souscrit est marié à une étrangère ou un étranger depuis bien 18 ans et a vécu à l'étranger, l'épouse ou l'époux ne pourra jamais octroyer le droit à la nationalité. Il faut prendre en considération les années vécues à l'étranger. A titre d'exemple, en Italie on a le droit à la nationalité 6 mois après le mariage s'ils sont vécus sur le territoire italien ou 2 ans si jamais le couple séjourne à l'étranger… Le droit au nom de la mère Un argument à apprécier : ayons le courage et la responsabilité de dire qu'il résoudra pas mal de situations tels les mères solitaires victimes parfois de viols ou abandonnées par la famille, ceci en plus d'aider à rétablir une certaine sérénité psychologique à la mère de manière à permettre à l'enfant mineur de vivre une enfance apaisée. Le Suicide Notre code pénal actuel n'interdit pas le suicide, la modification proposée par les Colibe est d'interdire l'incitation au suicide. Là aussi il s'agit d'un thème à approfondir en prenant l'avis des spécialistes de l'éthique car la médecine est bien en avance par rapport au social dans ce domaine. Certaines maladies non curables amènent le malade à des situations désespérées( je prends l'exemple de patient maintenu artificiellement en vie et n'ayant aucun contact avec le monde extérieur). La limitation ou la non escalade des soins exprimées par les proches est une des raisons et non l'unique pour approfondir le débat autour de ce sujet. Respect des volontés des personnes Le devoir de donner son consentement au corps médical et le respect des volontés des personnes est un grand pas mais manque à mon avis le courage d'affronter le thème du testament biologique !Je m'explique. Avec l'avancée de la médecine certains congèlent leurs cellules (ovules, embryons, sperme) est ce qu'une personne pourrait laisser ses cellules en héritage à son conjoint ou non ? Est ce qu'on pourrait réactiver ces embryons après son décès… ? Droit à la vie privée Les mass-média ont omis de parler de ce paragraphe qui ailleurs constitue une loi. C'est de notre vie privée, de notre intimité quotidienne qu'il s'agit. On est dans un monde où les informations personnelles, notre mode de vie, nos communications les plus personnelles, les plus intimes risquent d'être interceptées, vendues, ou même utilisées contre nous. Les informations de nos communications sur Facebook, nos emails, nos recherches sur internet constituent des traces et emmagasinées sur le big data. Il est important de bien de protéger la vie privée des personnes et ce projet est à saluer mais un approfondissement est bien nécessaire. En me limitant à ces quelques exemples j'ai voulu attirer bien l'attention sur le courage nécessaire de corriger certaines situations aberrantes et d'affronter nos préjugés, nos blocages pour que notre société aborde le futur armée dans un monde qui change à une vitesse jamais connue et qui est à la quatrième révolution industrielle. Le projet est tellement intéressant et pionnier dans le monde arabe qu'il faudrait bien approfondir et élargir le débat à tous les thèmes pour qu'il soit un débat fructueux. Le piège serait de figer ou dévier l'attention du citoyen sur sur un aspect religieux controversé ou sociétal clivant. Reste la question du timing. 2019 est à nos portes, il faut espérer qu'il n'y aura pas de précipitations (de récupération) à traiter ces sujets pour des fins politiques et électorales. Difficile mais pas impossible. Dr Mohamed Adel Chehida
