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Mohamed Larbi Bouguerra: Pendant le confinement, la pollution continue
Publié dans Leaders le 01 - 05 - 2020

«Pendant que les citoyens marchent, les lobbys des pesticides avancent et le gouvernement recule.» Communiqué de la Fondation Nicolas Hulot (France)
Comme si le coronavirus ne suffisait pas, voilà qu'on ouvre en Tunisie la campagne de lutte contre les moustiques. « Le ministère des affaires locales donnera le coup d'envoi demain [20 avril 2020] de l'application de la stratégie nationale de lutte contre les insectes dans les 350 communes de la Tunisie » (La Presse de Tunisie du 19 avril 2020)
Comme chaque année et comme si jamais on n'avait tiré les leçons de la campagne précédente !
Les moustiques et autres culicidés n'ont qu'à bien se tenir. Nos astucieux membres de la cellule permanente de lutte contre les insectes se sont dotés cette fois - outre les poisons habituels - de « techniques modernes » (La Presse de Tunisie du 19 avril 2020) comme un système d'information géographique, des avions et même un hydroglisseur pour le Sijoumi ! Et le représentant de la mairie de Tunis, faisant montre d'une science entomologique up to date, menace « les moustiques urbains et ruraux » (sic) de la force de frappe de sa puissante et vénérable institution.
Toujours les mêmes erreurs?
Mais on lui fera remarquer que moustiques des villes ou moustiques des champs sont arrivés sur cette terre quelques millions d'années avant Homo erectus et ont résisté, au cours des âges, au froid sibérien, aux chaleurs étouffantes, aux éruptions volcaniques, aux tremblements de terre, aux virus, à de nombreux prédateurs ( hirondelles, martinets, grenouilles, chauves-souris, lézards…)et que les insecticides chimiques que notre bonne ville continue à répandre sur leur tête ne feront qu'enrichir leurs gènes de résistances supplémentaires.
En fait, à force de déverser des insecticides sans s'attaquer aux racines du problème, on fabrique des super-moustiques. Des moustiques super-résistants contre lesquels l'armada de poisons ne servira…. qu'à enrichir les multinationales de la chimie et leurs agents en Tunisie.
Il suffit pourtant de réaliser qu'il faut d'abord traiter les eaux dormantes, les flaques, les égouts qui débordent, les containers d'ordures jamais nettoyés et les ouèds non entretenus pour éliminer une grande partie de ces populations de culicidés qui passent une partie de leur vie dans l'eau sous forme de larves.
Comme si la pandémie ne suffisait pas!
On nous parle des sommes mobilisées mais on ne donne pas la liste des pesticides qui vont venir souiller un peu plus notre environnement avec des résultats, hélas, bien maigres.
En cette période de pandémie, est-il raisonnable d'envoyer dans nos corps, nos aliments, notre milieu, des pesticides toxiques ? Ces derniers peuvent être toxiques pour la reproduction, comme ils peuvent être cancérigènes (prostate, sein, système lymphatique…), mutagènes ou perturbateurs endocriniens. Ils pourraient diminuer les défenses immunitaires des populations fragiles.
Est-il sage, face à la pandémie, d'exposer les enfants, les femmes enceintes, les séniors, les malades atteints d'affections chroniques (diabète, hypertension, surpoids…) à ces composés toxiques ? Ces produits toxiques et les nombreux constituants de leur solution joints aux particules provenant des véhicules à moteur et des industries peuvent exacerber les difficultés respiratoires. On sait, en outre, que ces produits peuvent atteindre le fœtus et affecter son cerveau dans le sein de sa mère, conduisant ainsi à des enfants à faibles QI (Lire Tara Parker-Pope, The New York Times, 21 avril 2011). En Tunisie, par exemple, l'insecticide chlorpyrifos est autorisé en dépit du fait que son action sur le QI des enfants est bien documentée. (Lire la liste des pesticides Homologués par le Ministère de l'Agriculture (Actualisée & arrêtée suite à la réunion de la commission du 18 Octobre 2017). La protection des enfants s'impose d'autant plus qu'actuellement le coronavirus provoque de graves symptômes -notamment cardiaques - dans cette population (Le Monde, 2 mai 2020, p. 2).
Rachel Carson, la biologiste auteur du « Printemps silencieux », disait que « le barrage chimique des pesticides est aussi brutal que la massue de l'homme des cavernes et qu'il frappe de plein fouet l'intime tissu de la vie. » « L'intime tissu de la vie » est atteint non seulement chez l'homme mais aussi sur le reste du Vivant et notamment les ennemis naturels du moustique comme les oiseaux ou les batraciens.
Le plus étonnant est que notre cellule de veille ne souffle mot des pesticides qu'elle compte utiliser pour éliminer les moustiques. On nous dit seulement qu'ils figurent sur la liste approuvée par le Ministère de l'Agriculture (Liste du 18 octobre 2017). Cette liste comporte un certain nombre de pesticides dangereux ou interdits ailleurs. Il suffit de consulter la liste dressée en mars 2019 par le PAN (Pesticides Action Network) des produits « extrêmement dangereux » pour se rendre compte que nombre de pesticides autorisés dans notre pays tombent dans cette catégorie (Propinèbe, Glyphosate et ses sels, Méthiocarbe, Folpet, Paraquat alias Diquat, Phosmet… ).
Sans connaître le nom du pesticide, comment les personnes intoxiquées pourront-elles éventuellement être prises en charge par les services d'urgence s'ils ne savent si l'intoxication ou le malaise est causé par un organophosphoré ou un carbamate (pour lesquels il y un antidote anticholinestérase) ou un organochloré (pas d'antidote) ou un pyréthrinoïde (émulsion lipidique éventuellement) ?
Des avions, encore des avions?
La cellule de veille se propose d'utiliser contre le moustique des avions.
Utiliser des avions d'épandage en zone urbaine ? A-t-on pesé les risques ?
A-t-on déjà oublié le drame du 11 novembre 2019 à la Soukra - le deuxième de l'année - et de l'avion qui s'est abîmé tout près des habitations, entraînant la mort du pilote ?
Depuis l'accident de l'avion d'épandage du 17 juin 2009 au Chaffar (Sfax) avec mort du pilote, il y a eu, en 2015, un autre drame avec mort d'homme à Sidi Ali Hattab à Borj El Amri, puis celui de Cheikh al Oudiyène (Béjà) en 2017 et le 16 avril 2019, l'accident de Sidi Bourouis (Siliana). A-t-on tiré les leçons ? Où en sont les investigations concernant ces accidents ?
En 2018, le Ministère de l'Agriculture a lancé un appel d'offre pour acheter - avec une aide italienne - 5 ULM d'épandage et 3 avions ULM multi-axes destinés à la lutte acridienne et non pour l'épandage anti-moustiques.
En France, les textes précisent : « la réalisation d'un épandage doit normalement « faire l'objet d'une information du public et des syndicats apicoles au plus tard 48 heures avant le traitement et d'un balisage du chantier ». A l'affichage en mairie s'ajoute une obligation de mention du traitement sur la parcelle elle-même.
A noter cependant que les épandages aériens sont interdits en France depuis 2009 suite à une directive européenne et à la loi du 13 juillet 2010. Les préfets pouvaient cependant encore accorder quelques dérogations « à durée limitée lorsqu'un danger menaçant les végétaux, les animaux ou la santé publique ne peut être maîtrisé par d'autres moyens ou si ce type d'épandage présente des avantages manifestes pour la santé et l'environnement par rapport à une application terrestre, conformément aux dispositions fixées après avis du comité consultatif de la protection des végétaux, et après information de la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques. »
Comme on le voit, cet épandage par avion, par hélicoptère ou par ULM est considéré comme exceptionnel par les autorités françaises et, dans tous les cas, seuls cinq pesticides sont autorisés pour l'épandage aérien.
L'article 20 de l'arrêté français du 15 septembre 2014 fixe au 31 décembre 2015 la date à partir de laquelle aucune dérogation ne pourra être accordée pour un épandage aérien.
Qu'attendons-nous pour interdire cette pratique ? Car outre les nuisances et les dangers de l'appareil en vol, les pesticides sont dispersés par la moindre brise et atterrissent sur les riverains et contaminent des milieux qui ne devraient pas être traités.
Il est en outre bien connu que l'épandage par avion atteint à peine 25% de sa cible et qu'au final seuls le propriétaire de l'aéronef et le fabricant de pesticides gagnent dans cette affaire.
La société civile doit agir
Face à tous ces dépassements qui menacent la santé des Tunisiens et l'état de notre environnement, la société civile doit adopter une nécessaire rupture avec cette démarche.
Face à la pandémie, point n'est besoin d'accumuler des résidus de pesticides dans notre milieu et de fragiliser les gens : la rationalité doit, plus que jamais, conduire à écarter les intérêts particuliers. Déjà en 1960, l'entomologiste canadien Anthony W.A. Brown disait : « L'âge d'or du contrôle chimique est fini. »
Il est temps que cette vérité soit entendue par les responsables tunisiens de l'agriculture, de l'environnement et de la santé. Et notre société civile doit mettre fin à cette pollution ! Il s'agit d'un droit de l'homme : avoir un milieu sain et vivable.
On doit arrêter de reculer face aux lobbys des pesticides !


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