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Tunisie: pour une nouvelle stratégie de développement de l'élevage
Publié dans Leaders le 19 - 11 - 2021

Par Ridha Bergaoui - La crise de la covid-19, suivie de la reprise de la croissance mondiale et une demande accrue se sont accompagnés d'une augmentation très sensible des prix des matières premières et des frais de la logistique. Ils ont mis à nu la fragilité de nos élevages et sa grave dépendance face aux conjonctures mondiales.
Les prix du maïs et du soja connaissent une augmentation continue qui s'est traduite par une hausse des prix des produits d'origine animale (viandes, lait et œufs) et un mécontentement aussi bien des éleveurs, qui considèrent que les prix de vente sont peu rentables, et le consommateur, dont le pouvoir d'achat ne cesse de s'éroder, et qui considère ces même prix exagérés et hors de portée.
Jadis peu consommés, les produits animaux sont devenus de nos jours essentiels. Viandes, surtout blanches (poulet et dindon), œufs et lait sont de nos jours considérés des produits stratégiques de première nécessité, indispensables pour la plupart des consommateurs.
A l'origine, un régime alimentaire simple mais monotone
Jusqu'à l'indépendance, le régime alimentaire du Tunisien se caractérisait par la simplicité et la monotonie. Ce régime dépendait essentiellement des disponibilités régionales. Au Sud, les dattes étaient l'aliment principal. Au Nord, la nourriture était à base de céréales et de légumineuses. Dans les régions côtières, les olives et l'huile occupaient une place prépondérante ainsi que le poisson. Le régime comportait également un peu de viande de mouton et quelques œufs selon disponibilité.
Le couscous (au mouton, poisson ou simplement aux légumes) était le plat principal. Assida, bsissa, zammita, rfissa et autres plats traditionnels… occupaient également une place importante. Du lait aigre, du beurre , du miel et quelques fruits de saison complétaient les repas des Tunisiens.
En règle générale la ration était pauvre et insuffisante, surtout dans les régions de l'intérieur et au Sud du pays. Elle était déficitaire en protéines et des cas de malnutrition et sous-alimentation étaient très fréquents.
Les fêtes familiales (naissance, circoncision, mariages, retour du pélérinage…), le mois de Ramadan et les fêtes religieuses (Aïd el Kebir et Aïd de fin du jeûne), Mouled, Ras el Am, Achoura… représentaient une occasion pour se régaler et consommer du couscous au mouton et des pâtisseries traditionnelles.
Un changement des habitudes et une diversification du régime alimentaire
Dés l'indépendance, les différents plans quinquennaux de développement prévoyaient une augmentation progressive de la consommation des viandes et du lait pour combler le déficit protéique de l'alimentation et se rapprocher des modèles alimentaires occidentaux, synonymes de modernité et de progrès. L'intensification des cultures et des élevages étaient un objectif essentiel pour augmenter les disponibilités alimentaires et assurer la couverture d'une demande de plus en plus importante.
Dés 1970, la création des élevages avicoles intensifs, industriels, encouragée par un système de subventions et de prêts à faible taux d'intérêt, a permis le développement de ces élevages et la disponibilité du poulet et des œufs à des prix intéressants pour le consommateur.
L'amélioration du niveau de vie, l'augmentation des disponibilités alimentaires ainsi que la variété des produits ont permis la diversification du régime et la couverture des besoins alimentaires. L'urbanisation, la scolarisation, le changement du mode de vie et l'émancipation de la femme ont conduit à la consommation de produits industriels (jus, yoghourt, eau en bouteille…) et le développement des repas hors foyer. La restauration rapide et les fastfoods ont connu un grand développement, le poulet et l'escalope de dinde représentant l'élément central des repas servis dans ces gargotes.
D'un régime basé essentiellement sur le blé dur et les légumineuses, on est passé à un régime beaucoup plus diversifié avec une place importante du pain industriel, des pâtes, de la viande et des œufs. La consommation de lait et produits laitiers sont considérés importants pour une bonne santé. Fruits et légumes sont consommés toute l'année.
Ce passage s'est accompagné malheureusement de pathologie de surconsommation comme le surpoids et l'obésité à l'origine de maladies cardiovasculaires, diabètes, tension et autres pathologies graves.
Les viandes blanches (poulet et dindon) ont connu une forte demande en raison du faible prix de vente comparé aux viandes rouges beaucoup plus chères. Avec l'érosion du pouvoir d'achat, la part de la viande rouge ne cesse de diminuer au profit de la viande blanche pour également des raisons de praticité et de bienfaits santé.
Production et consommation de produits animaux
La production de viandes rouges en Tunisie est estimée à environ 125 000 tonnes dont 60 000t de viande bovine, 60 000t de viande ovine et caprine. La production de viandes blanches serait de 200 000 tonnes dont 130 000t de poulet et 70 000t de dindon. La Tunisie produit également 1 900 millions d'œufs/an et 1 400 millions de litres de lait. Toute cette production est destinée à l'autoconsommation et les échanges (exportations et importations) sont très limités.
La demande en produits animaux ne cesse d'augmenter suite à la croissance démographique, l'urbanisation, l'augmentation du niveau de vie des Tunisiens et les nouvelles habitudes alimentaires. Le développement du secteur touristique, gros consommateur de produits alimentaires, a également contribué à l'accroissement de la demande. En 2008, la Tunisie a enregistré 7 millions de visiteurs avec plus de 38 millions de nuitées. Cette demande est également boostée par une publicité et un marketing agressif des firmes de l'agroalimentaire.
La consommation moyenne individuelle par an serait de 11kg de viande rouge, 17kg de viande blanche (poulet et dindon), 160 œufs et 120 litres de lait. Ces apports semblent suffisants pour couvrir les besoins en protéines animales estimés par la FAO à 7,3 kg de protéines/an ou l'équivalent de 33 kg de viande.
Dans les pays développés, la consommation de protéines animale est beaucoup plus importante. La tendance est à la baisse de la consommation des viandes et la substitution de la viande rouge par de la viande de volaille moins grasse et réputée plus saine.
A titre indicatif, les Français consomment prés de 90kg de viande et de charcuterie dont 25kg de porc, 20kg de volaille, 18kg de bœuf et 3 kg de mouton. La consommation d'œufs est de 217 unités dont 104 en coque et le reste en préparations diverses. Quant à la consommation de lait frais elle n'est que de 48 litres et une forte consommation de fromage (24kg/an/habitant).
Stratégie d'élevage
Juste après l'indépendance, l'un des objectifs du développement était d'assurer un apport satisfaisant en protéines animales (viandes, lait et œufs). Les différents plans de développant visaient le développement l'élevage par l'intensification des systèmes de la production et l'amélioration de l'offre. En parallèle, des encouragements et des subventions étaient accordés aux producteurs et les prix de vente étaient maintenus très bas pour encourager les tunisiens à consommer lait, viande et œufs.
La stratégie d'élevage est basée sur l'intensification, l'augmentation des effectifs des animaux et la vulgarisation de l'usage du concentré. Pour l'élevage bovin, il s'agit de l'introduction et l'augmentation des effectifs des vaches laitières de la race Holstein. Le secteur laitier a été également marqué par l'organisation et la multiplication des centres de collecte du lait et la création d'une puissante industrie de transformation du lait. La stratégie visait également l'encouragement et le soutien de l'élevage avicole intensif. Aussi bien les élevages laitiers qu'avicoles sont de gros consommateurs de concentrés industriels.
Les élevages traditionnels de volaille et de bovins ont été délaissés. Les élevages de moutons, de chèvres et de dromadaires sont restés extensifs si ce n'est la sédentarisation de ces élevages, nécessitant des compléments de concentré, et une bonne couverture vétérinaire.
Très peu a été fait pour améliorer la production des fourrages et l'introduction de produits locaux dans la fabrication des concentrés. L'avoine est la culture fourragère dominante et l'ensilage est très peu pratiqué, on lui préfère le foin qui se prête mieux aux transactions commerciales et au transport.
De nombreuses crises avaient secoués et parfois désorganiser les différentes filières animales. Ces dernières années, une augmentation vertigineuse des prix des intrants et de la main d'œuvre a entrainé une augmentation des coûts de production alors que les prix de vente ont relativement peu évolué. L'Etat intervenait à chaque fois, pour rassurer le consommateur qui se plaint de la détérioration continu de son pouvoir d'achat, pour fixer les prix plafonds ou pour importer et réduire les prix au niveau du consommateur. Cette politique des prix a entrainé la faillite de nombreux petits éleveurs qui ont été obligés d'abandonner l'élevage et de vendre leur cheptel.
Une dépendance face aux marchés mondiaux
En Tunisie la dépendance alimentaire des élevages est devenue très grave. Avec les changements climatiques, la pluie se fait de plus en plus rare, particulièrement au Centre et au Sud du pays, et les ressources fourragères également. En plus les éleveurs ont tendance à utiliser excessivement l'aliment concentré des usines d'aliment du bétail et ont acquis la mauvaise manie de privilégier l'achat du concentré à la culture des fourrages. Il faut enfin préciser que de nombreux éleveurs n'ont pas de terres ou que les surfaces sont beaucoup plus réduites pour alimenter correctement le cheptel entretenu. Quant aux élevages industriels de volaille (poulet, pondeuse et dindon), les animaux sont exclusivement nourris de concentrés très riches en éléments nutritifs afin de permettre des niveaux de production élevés. Enfin, la vache laitière a besoin de grandes quantités de concentrés pour produire une quantité intéressante de lait.
La demande en concentrés, en orge et son est de plus en plus importante. Ces aliments sont devenus indispensables pour le maintien des troupeaux et la survie du secteur de l'élevage.
Malheureusement ces concentrés sont fabriqués essentiellement de maïs, tourteau de soja et de compléments minéraux et vitamines. Ces composants sont entièrement importés. Prés de deux millions de tonnes de concentrés sont fabriqués chaque année et utilisent prés de 1 million de maïs et 0,5 million de tourteau de soja.
Ce sont surtout les Etats-Unis, l'Argentine et le Brésil les principaux pays exportateurs de maïs et de soja. Importer du maïs et du soja était relativement facile jusqu'à la fin du siècle dernier. Depuis, la demande mondiale ne cesse d'augmenter surtout avec l'ouverture de la Chine et le développement des élevages intensifs dans les pays en voie de développement. L'utilisation du maïs et du soja pour la fabrication de biocarburants, devenue rentable avec les prix actuels du pétrole qui dépassent les 85 dollars US le baril, n'a fait qu'empirer la situation déjà délicate de ces deux produits. Ce ci s'est traduit par une augmentation des prix et des difficultés d'approvisionnement.
Conclusion
Depuis l'indépendance, les habitudes alimentaires ont connu des changements importants. Le Tunisien est devenu un grand consommateur de viandes blanches, d'œufs et de lait. Jusqu'ici, notre stratégie est basée surtout sur l'intensification des élevages et l'augmentation de la production pour faire face à une consommation de plus en plus importante et atteindre notre autosuffisance.
Malheureusement les élevages intensifs utilisent des concentrés à base de maïs et de soja importés. Au niveau mondial, ces produits sont de moins en moins disponibles et les prix ne cessent d'augmenter. Nos filières animales se trouvent en difficulté et sont menacées.
Afin de garantir notre sécurité alimentaire et faire face à un monde en perpétuel changements socio-économiques et climatiques, il est urgent de revoir notre stratégie pour un élevage durable et respectueux de l'éthique et de l'environnement.


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