Par Skander Ounaies - Il y a 38 ans, le 1er Octobre 1985, à 10 heures du matin, la Tunisie subissait une lâche attaque aérienne de la part d'Israël, en réponse à son soutien à l'OLP et à Yasser Arafat, qu'elle avait contribué à sauver en 1982, en les faisant sortir du Liban pour échapper à l'opération «Paix en Galilée», menée par Israël, et en les accueillant à Tunis. Toute la presse occidentale va alors retenir «l'exploit technique»: une honte, et passer, en pertes et profits, les morts et les blessés Tunisiens et Palestiniens, avec 50 morts Palestiniens et 18 du coté Tunisien. Encore une fois, Yasser Arafat (Abou Ammar) s'en sortira indemne, car prévenu au dernier moment, son cortège fera demi tour. Dans la matinée, le Président Reagan va approuver l'attaque. Le Président Bourguiba se sentant trahi et humilié par les Américains (rappelons qu'il a été le seul chef d'Etat du Tiers Monde à cautionner la guerre du Viet- Nam), va menacer de rompre les relations de la Tunisie avec les USA, si le Président Reagan oppose son véto à la résolution déposée par la Tunisie au Conseil de Sécurité, pour condamner Israël. Reagan change alors son discours et présente la Tunisie et Bourguiba comme des amis de l'Amérique. La conséquence sera la condamnation à l'unanimité d'Israël, pour la seule et unique fois de son histoire, par 14 voix contre 0, les USA s'étant abstenus, au Conseil de Sécurité, par la résolution 573 du 3 Octobre 1985. Ce succès diplomatique douloureux (une victoire à la Pyrrhus), a été l'œuvre de Diplomates de haut vol, aujourd'hui tous disparus, mais qui demeureront à jamais dans l'Histoire de la Diplomatie de la Tunisie: • Beji Caid Essebsi, Ministre des Affaires Etrangères; • Mahmoud Mestiri, Secrétaire d'Etat aux Affaires Etrangères; • Nejib Bouziri, Ambassadeur de la Tunisie à l'ONU; • et enfin, en dernier lieu, mon regretté père, Moncef Ounaies, Directeur Amériques aux Affaires Etrangères. Je voudrais rajouter deux derniers éléments que beaucoup, aujourd'hui, ignorent certainement: 1) Reagan a été convaincu que Bourguiba, dans son immense déception et fureur vis-à-vis des USA, irait jusqu'au bout, suite à l'appel qu'il reçoit de la part d'un grand ami à lui, acteur et homme du show-biz, qui était également un grand ami à Habib Bourguiba Junior (Bibi, Conseiller de son Père) lequel lui aurait dit texto: «le Vieux (Bourguiba) est fou furieux: c'est du sérieux ,il va le faire (rupture des relations diplomatiques)!!!». 2) Une réunion hautement sensible a eu lieu le 2 Octobre au Palais de Carthage avec les personnages suivants: le Président Bourguiba, Bourguiba Junior, Beji Caid Essebsi, mon regretté père, Moncef Ounaies, et l'Ambassadeur des USA à Tunis, Peter Sebastian. Ce dernier aurait passé le plus mauvais quart d'heure de sa vie de diplomate. Beaucoup de points «très sensibles» ont été abordés lors de cette réunion, très houleuse. Le devoir de réserve et la promesse faite à mon regretté père, m'interdisent d'en dire plus. Enfin, pour la petite histoire, le représentant d'Israël à l'époque à l'ONU était un certain… Benyamin Netanyahu, (surnommé…. Bibi, comme c'est curieux), qui est l'actuel Premier Ministre d'Israël, facho et versatile à souhait, et qui n'a jamais digéré son échec, le seul d'Israël à l'ONU: je pense qu'il doit nous détester à mort !!!! En tant que Tunisien, fier de son Histoire, je reste très étonné que cette lâche agression ne soit pratiquement plus évoquée, que ce soit au niveau officiel, ou au niveau des médias: veut-on gommer l'Histoire??? Honneur aux Tunisiens et Palestiniens morts sous les bombes. Skander Ounaies Professeur à l'Université de Carthage Lire aussi Les recours tunisiens au Conseil de sécurité : 1985 Hammam-Chatt
