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Privatiser les médias publics : est-ce la solution ?
Publié dans Leaders le 02 - 05 - 2012

Simple mise en garde en guise d'ultime pression ou réelle menace qui risque de s'exécuter ? Contestant la ligne éditoriale du journal télévisé de Watanya 1 et certaines de ses émissions de débats, Ennahdha n'a pas trouvé mieux que d'appeler à la privatisation de la chaîne et, partant, des médias publics. La persistance des appels, malgré les vives réactions, notamment celles du Syndicat national des journalistes, des syndicats de l'Etablissement de la télévision tunisienne et l'Instance nationale de la réforme de l'information et de la communication (INRIC), a été attisée par la montée du harcèlement exercé par des sit-inneurs contre le personnel de la télévision. Les multiples provocations verbales et physiques ont failli dégénérer en affrontements dangereux, voire une tentative d'intrusion au siège de la télévision, suscitant une levée de boucliers générale.
Si l'appel d'Ennahdha à la privatisation se focalise sur Watanya 1, il s'étend sans doute aux autres médias d'Etat, à savoir les stations radio, l'agence Tunis Afrique Presse et les quotidiens La Presse et Assahafa ainsi que les entreprises de presse confisquées, Shems FM et Dar Assabah (Assabah et Le Temps). S'il n'est plus nécessaire que l'Etat soit éditeur de journaux et propriétaire d'une station radio commerciale héritée du fait de la confiscation, faut-il se délester de chaînes et stations publiques et d'une agence de presse ?
La grande question qui se pose, en effet est la suivante : une démocratie a-t-elle besoin de médias publics ou non et, dans l'affirmative, sous quelle gouvernance et avec quel financement ? Avant de répondre à ces questions, poussons la logique d'Ennahdha pour vérifier son opportunité et sa faisabilité.
La privatisation assure-t-elle l'indépendance totale et l'équité ?
La privatisation est-elle une garantie d'indépendance contre toute mainmise, qu'elle soit politique ou autre ? Rien ne le prouve à ce jour de par le monde. Un média est toujours en ligne avec les orientations que veulent lui donner ses propriétaires. L'histoire de la presse nous montre qu'en France, par exemple, ce sont les tout premiers capitaines d'industrie ayant fait leur fortune avec la révolution industrielle qui se sont empressés d'éditer des journaux (Emile Servan-Schreiber, Les Echos, etc.), tant pour accéder les premiers à l'information économique et boursière, que pour exercer leur influence sur les autorités et l'opinion.
Les autres, Jean Prouvost (Paris Jour), Marcel Dassault (Jours de France) et Robert Hersant (Le Figaro) leur ont emboîté le pas. Idem, avec d'autres générations, pour les radios (RTL, Europe 1…) et télé (TF1, Canal +...).
Question subsidiaire, sur le même registre, les autres médias tunisiens indépendants sont-ils impartiaux à l'égard de tous les partis politiques ? S'agissant d'Ennahdha, la réponse est claire : les médias servent les intérêts de leurs propriétaires.
La privatisation est-elle réalisable et dans quels délais ?
Deuxième série d'interrogations : dans quelles conditions peut se faire cette privatisation, supposons qu'elle soit adoptée, et dans quels délais ? La procédure est inévitable : évaluation financière approfondie et complète par des cabinets spécialisés indépendants, avec une revue rétroactive nécessaire, validation, élaboration des cahiers des charges, adoption par les instances concernées, lancement des appels à candidatures, dépouillement des offres, déclaration d'adjudicataire, passation, etc. Un processus d'au moins trois ans, sinon plus.
Qui financera la télévision privatisée et garantira sa rentabilité ?
Troisième et dernière question, cruciale: qui financera la télévision publique une fois privatisée ? Les charges actuelles de l'Etablissement de la télévision tunisienne dépassent les 50 millions de dinars. Il ne s'agit-là que des frais d'exploitation, sans compter les crédits d'investissements nécessaires tant au renouvellement des équipements qu'à la relance de la programmation et l'innovation technologique en convergence avec l'interactivité. Où aller puiser toutes ces sommes colossales ? Dans les recettes publicitaires ? En baisse, suite à la crise économique, elles ne totalisent pas pour l'ensemble des médias presse, radio, TV et affichage, les 100 MD en brut. Prétendre pouvoir en capter la moitié serait irréaliste. Recourir, ne serait-ce qu'en complément, à la redevance sur la radio-télévision, payée actuellement avec la facture de la consommation électrique? Qui l'acceptera ?
Quel investisseur accepterait aujourd'hui de reprendre la télévision publique, ses effectifs et ses charges et s'aventurer en plus sur un marché publicitaire rétréci? Sans subvention d'équilibre, et qui ne sera pas négligeable, ou un généreux donateur mécène (???), il n'aura pas la certitude d'un retour sur investissement. A moins que…
Qui assurera la mission de service public ?
Revenons à présent à la question de principe posée : l'Etat doit-il privatiser les médias publics? Un rapide benchmarking international montre que ce n'est guère la pratique dans la plupart des pays du monde, à commencer par les démocraties. Bien au contraire, en contrepoids de médias privés, libres de leurs orientations, des médias publics sont promus et soutenus précisément pour constituer des espaces d'indépendance, affranchis de toute tutelle ou hégémonie et incarner une mission de service public. Un rôle d'intérêt général et de première nécessité à l'instar de celui qu'assument l'école publique ou les assurances sociales. Des mécanismes de régulation et d'autorégulation sont mis en place, des systèmes de gouvernancesont installés, un suivi rigoureux est assuré et des ressources publiques sont consenties à partir du budget de l'Etat et, dans certains cas, des régions et autres. C'est notamment le cas de la BBC en Angleterre, de France Télévision en France, de la RAI en Italie, et bien d'autres institutions de par le monde. Toute la question est là. La solution aussi.
Alors, quelles solutions ?
Ennahdha est certainement en droit d'exprimer, comme d'autres, des reproches à l'endroit des médias publics. Aucun parti n'est en fait totalement satisfait de la couverture qu'on lui réserve. Les médias sont, de leur côté, en pleine mutation pour réaliser leur conversion effective après la révolution et s'efforcent de chercher leur voie et leur position d'équilibre et d'indépendance. Les journalistes, longtemps asservis par le régime déchu et à présents affranchis, sont, sans doute, les plus jaloux de leur liberté.
Il y a aussi des progrès à faire en matière de qualification professionnelle, de respect des pratiques et de la déontologie, toute une réforme à entreprendre et une transition à réussir. C'est là le coeur du sujet, le vrai débat à ouvrir. Quelle mission pour les médias de service public ? Quelle gouvernance ? Quels financements ? Et quelles régulations et autorégulations ? Aujourd'hui et plus que jamais, la Tunisie, dans cette phase cruciale de sa transition, a besoin de médias publics de qualité, professionnels, éthiques et indépendants pour soutenir ses pas et accompagner son redéploiement. Un principe qui, au-delà des contingences politiques de certains, réunit en sa faveur le consensus national. L'INRIC, le SNJT, Nombre de partis politiques, d'organisations nationales, notamment l'UGTT, et diverses composantes de la société civile ont multiplié les propositions dans ce sens. Il convient alors d'en faire l'objet d'un vaste débat national, afin d'aboutir à l'architecture qui sied le mieux aux intérêts du pays. Préserver les médias publics, les réformer et procéder à leur ré-engineering, c'est consacrer le service public, le pluralisme et la démocratie.
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