A l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, célébrée dans le monde chaque 25 novembre et soutenue par l'Organisation des Nations Unies, les initiatives se multiplient dans le pays en vue de mettre fin à ce fléau qui ronge la société depuis des générations. A cette occasion, société civile et ministère de la femme réitèrent leur refus catégorique de tout type de violence faite aux femmes, appellent à durcir les sanctions et surtout appliquer les lois en vigueur contre les agresseurs. Des campagnes de sensibilisation et d'information sont également lancées un peu partout en Tunisie afin de rendre leur dignité aux victimes, faire prévaloir leurs droits et faire cesser cette injustice. Célébrant la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, le ministère tunisien de la Femme, de la Famille et de l'Enfance lance, à cette occasion, une campagne de grande envergure visant à inciter les femmes victimes d'abus à témoigner et à dénoncer leurs agresseurs. Intitulée : « Stop ! Ne te tais plus ! Parle ! », elle s'étendra sur 16 jours, soit jusqu'au 10 décembre et comprendra des activités continues visant à sensibiliser le grand public sur la gravité des abus commis à l'encontre des femmes, à changer les mentalités par rapport à ces problématiques, à briser les tabous et à convaincre les victimes à parler et à porter plainte. Cette initiative s'inscrit dans la lignée des efforts fournis par le ministère à protéger les femmes de tout acte d'agression morale ou physique mais aussi de la discrimination à laquelle elle peut être confrontée aussi bien dans le cadre familial que scolaire et professionnel. Des conférences et des ateliers pratiques seront organisés dans le cadre de la campagne « Stop ! » « Non à la culture du viol » Le collectif Chaml a également tenu à célébrer la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes en lançant une campagne intitulée « Non à la culture du viol ». Pas de longs textes ni de discours complexes et usités, le collectif s'est adressé au grand public avec deux illustrations simples et directes. Sur la première, on voit une main de femme forcée par celle d'un homme. Sur la deuxième, il est écrit : « Au lit, à la maison, dans la rue, dans le bus, au travail, de nuit comme de jour, non ça veut dire non. » Un message clair et concis qui rappelle à tous que le viol n'est pas cet acte horrible commis par un agresseur envers une inconnue dans la rue mais peut aussi prendre la forme de relations sexuelles forcées avec l'épouse, la forme d'un attouchement dans les moyens de transport ou encore la forme d'un harcèlement moral et de paroles obscènes et libidineuses. ATFD : le combat continue ! Pour leur part, les militantes de l'Association Tuisienne des Femmes Démocrates (ATFD) ont choisi, à l'occasion d'aborder le thème des victimes des violences sexuelles, entre le vécu et la loi. Lors de la conférence de presse organisée à cette occasion, le débat a tourné autour de la notion complexe et multiple des violences infligées à la femme. De son côté, Ahlem Belhaj a évoqué le traitement médiatique des affaires d'agressions et abus contre les femmes et affirmé que pour certaines victimes, le recours aux médias est le dernier espoir face à l'immobilisme et le manque de réactivité des autorités et institutions compétentes. Mais le fait est que certains animateurs et journalistes, rares heureusement, en quête de buzz et obnubilés par le taux d'audimat, infligent, à leur tour, des violences aux victimes. C'est par exemple le cas de la jeune femme de 17 ans, violée à plusieurs reprises par ses proches, des hommes mariés et à qui l'animateur a proposé de demander pardon pour ce qu'elle a commis et d'accepter de se marier avec un de ses violeurs. Ahlem Belhaj a profité de la présence des journalistes, lors de ce point presse, pour leur demander de soutenir le combat pour la dignité de cette jeune maman célibataire, violée dans sa chair et dont le procès est prévu pour le 29 de ce mois à Kairouan. Par ailleurs, Ahlem Belhaj est revenue sur le nouveau projet de loi relatif aux violences faites aux femmes. Les militantes de l'ATFD considèrent que le texte, dans son ensemble, est une bonne initiative mais émettent des réserves sur certains passages comme celui de l'article 227 où le mariage entre un agresseur et sa jeune victime n'est plus évoqué mais où le viol sur mineure « avec consentement » demeure toujours d'actualité. Ahlem Belhaj s'insurge tout spécialement contre cette partie et se demande si une jeune fille de 12 ou 14 ans peut réellement donner son aval pour des relations sexuelles avec un adulte. Elle déclare enfin que l'ATFD appelle à l'élaboration d'une loi intégrale pour l'élimination de toutes les formes de violences faites aux femmes et aux filles. Dans le monde et selon les statistiques de l'OMS, 35% des femmes ont subi, au moins une fois dans leur vie, une violence physique de la part d'un proche ou d'un inconnu et près de 30% ont subi une agression sexuelle. Par ailleurs, 47,6% des femmes tunisiennes âgées en 18 et 64 ans ont été, au moins une fois dans leur vie, victimes de violence physique soit-elle ou morale. A noter qu'en Tunisie, les abus physiques sont les plus répandus (31,7%), suivis des violences morales (28,9%) et des agressions sexuelles (15,7%)