Lors d'une conférence de presse tenue en début semaine à son local basé à Tunis, Hezb Ettahrir a fermement annoncé avoir donné des consignes à ses militants pour qu'ils ne se soumettent plus aux ordres de la police. Selon Imed Eddine Haddouk, membre du bureau politique du parti, les jeunes d'Ettahrir font l'objet, depuis quelques temps, « d'harcèlements policier et juridique pour des raisons banales et à cause d'affaires fabriquées de toutes pièces. » Expliquant que le parti ne peut plus rester de marbre face à ces « persécutions », il a annoncé que ses collègues et lui ont officiellement décidé d'ignorer les forces de l'ordre et de laisser la justice trancher dans l'affaire. Toujours selon le concerné, les familles des jeunes d'Ettahrir qui sont en état d'arrestation organiseront des sit-in devant les locaux de la police afin que leurs enfants soient libérés. Pour finir, Imed Eddine Haddouk a exigé que son parti ne soit plus jugé que sur la base du décret 87 de l'année 2011 régulant le travail des partis. Par ailleurs, et toujours lors de cette conférence, Mohamed Chouikh, membre du même parti, est revenu sur la question du retour des terroristes tunisiens des zones de conflit. Selon l'intéressé, l'Etat tunisien aurait signé, en 2014, un accord avec l'Union européenne qui l'oblige à recevoir tous les migrants et tous les terroristes sur son territoire. Et d'ajouter que les autorités tunisiennes sont en train de construire une grande prison à la Guantanamo qui hébergera tous ces revenants. Deux axes extrêmement graves ont été exposés lors de ce point de presse : une désobéissance sécuritaire de la part des bases du parti et de ‘sérieuses' accusations contre l'Etat tunisien. Le plus beau dans l'histoire c'est que tout cela sera fait, toujours selon Hezb Ettahrir, dans le respect total de la loi. Voici donc un nouveau concept, purement tunisien, où la désobéissance prend un aspect légal qui respecte l'Etat de droit. Ettahrrir nous a habitués à ses sorties peu conformistes prenant, toujours, des formes de défiance explicite de l'Etat. En août dernier, il avait magistralement ignoré le verdict du Tribunal de première instance de Tunis stipulant le gel des activités du parti pendant trente jours. Quelques heures après l'annonce dudit verdict, Ettahrir avait organisé une conférence de presse au sein de son siège de l'Ariana. A l'époque, on nous avait expliqué que ce gel d'activités survenait suite à une plainte déposée par la présidence du gouvernement et qu'il s'agissait de la dernière étape avant la dissolution totale du parti. Depuis, plus aucune nouvelle n'a été donnée sur cette affaire et pourtant, ce ne sont ni les occasions ni les raisons qui manquent aux autorités pour qu'elles daignent enfin mettre un terme définitif à la problématique de ce parti. Un parti qui n'aurait jamais dû voir le jour dans une Tunisie prônant l'Etat civil et interdisant à tout parti politique d'exercer sous l'égide d'une quelconque idéologie. Seulement voilà, Ettahrir a eu du bol puisqu'il a réussi, en juillet 2012 (époque du premier gouvernement de la Troïka), à obtenir son autorisation après qu'elle lui ait été refusée en mars 2011. La question aujourd'hui est de savoir s'il suffit à un quelconque parti de détenir cette fameuse autorisation pour faire ce qu'il entend et annoncer, publiquement, ses intentions de désobéissance ou bien est-ce qu'il demeure obligé de respecter les lois, la Constitution et le régime en place. Ettahrir a toujours été clair dans sa ligne politique à cause de laquelle il a d'ailleurs refusé de prendre part aux différentes élections organisées depuis la révolution. Ce parti refuse la démocratie et œuvre à l'instauration du Califat non seulement en Tunisie mais aussi dans le Maghreb. C'est à se demander si les autorités n'y voient que du feu !