Décidément, les « affaires » et les révélations aussi fracassantes que graves se multiplient à une vitesse vertigineuse. La dernière en date étant celle annoncée par le porte-parole de l'armée libyenne, le colonel Ahmed Al Mesmari qui évoque l'existence d'un officier des services de renseignements qataris, exerçant en tant qu'attaché militaire dans les pays du Maghreb, qui aurait financé des terroristes en Libye via la Tunisie Etant révélée par un officiel libyen et impliquant, selon lui, bon nombre de responsables tunisiens, l'affaire mérite d'être prise au sérieux par les autorités officielles, voire par le président du gouvernement, Youssef Chahed en personne, et pourquoi pas le président de la République dans la mesure où ladite affaire touche à la sûreté de l'Etat. Enregistrement de la conférence de presse tenue par le militaire libyen à l'appui, on apprend que l'argent transféré dans le compte du responsable qatari via un compte bancaire tunisien se chiffre à huit milliards de dollars. Et s'il n'y a pas une erreur de transmission chez le colonel de l'armée libyenne, la somme s'avère colossale avec l'équivalent de 20 milliards de dinars tunisiens, soit les deux tiers de notre budget pour l'année 2017. Cet argent aurait été transféré par le biais d'un compte bancaire en Tunisie vers un autre compte au gouvernorat de Tataouine pour finir entre les mains de factions libyennes, logiquement, proches de l'Etat de Qatar, autrement dit Fajr Libya d'Abdelhakim Belhaj. L'officier libyen précise que « des sommes considérables ont été tirées de ce compte à Tataouine sur ordres téléphoniques du militaire qatari au profit de plusieurs personnes, notamment libyennes et tunisiennes dont deux militaires... ». Un expert explique Cette information, qu'on reprend avec les réserves d'usage, vu sa haute gravité, a suscité et suscite encore le buzz à travers les réseaux sociaux et les médias les plus sérieux. Et chacun y va de son analyse et ses interprétations en attendant les détails précis qui ne devraient pas tarder à être divulgués. Une réaction est à mettre en exergue, toutefois, puisqu'elle vient d'un expert économique et financier réputé pour son sérieux, sa crédibilité et sa notoriété, en l'occurrence Ezzeddine Saïdane qui, dans une déclaration sur les ondes d'une radio de la place, a fourni les précieuses explications suivantes. « Habituellement, commence-t-il par dire, la banque tunisienne est censée établir un rapport qu'elle doit présenter à la Banque centrale de Tunisie (BCT) si elle se trouve devant un cas suspect de blanchiment d'argent. Ce rapport est ensuite transféré à la Commission d'analyses financières pour procéder à une enquête approfondie sur les origines des fonds en question. Et d'ajouter qu'il est possible que « le virement puisse passer inaperçu s'il est fait à travers des noms ou des sociétés connus », tout en supposant que l'officier, dont parle le colonel Al Mesmari, doit détenir plusieurs comptes bancaires et que, logiquement, les banques devaient s'apercevoir des mouvements et des transits d'argent, mais « la tentation reste partout et la corruption existe » selon M. Saïdane. Et de conclure que, désormais, c'est au tour de la BCT de bouger, d'une manière impérative afin de procéder aux vérifications qui s'imposent et de dévoiler toute la vérité sur les différentes transactions financières des banques avant d'insister sur le fait que « la suppression desdites opérations financières est impossible et qu'une enquête minutieuse devrait permettre de faire toute la lumière quant aux sociétés ou individus impliqués dans ces transactions bancaires. Bien entendu et encore une fois, si les dires du colonel libyen s'avèrent bien fondées. Car, à vrai dire, le timing de ces révélations paraît peu innocent et assez douteux en dépit des données trop précises fournies avec des chiffres, des noms, des lieux et des dates. Mais les services de sécurité et, plus particulièrement, les autorités judiciaires, qui sont appelées à réagir d'une manière urgente, semblent traîner les pieds, alors que le bon sens veut qu'on agisse rapidement afin d'en avoir le cœur net. Oui ou non les données révélées par le responsable militaire libyen sont-elles fausses ou exactes ? C'est comme ça qu'on coupe court aux rumeurs ou bien on confirme les présumés soupçons... Il est temps pour que la magistrature démontre, au moins une fois, qu'elle répond présente pour donner un gage de confiance et rassurer les justiciables que leurs affaires et dossiers se trouvent entre de bonnes mains. Le brulant dossier des associations Dans le même ordre d'idées de la guerre contre la corruption et contre ceux qui portent atteinte à la sûreté de l'Etat, il est urgent d'ouvrir le dossier des associations, un monde lugubre et opaque où ces organismes jonglent avec les dizaines de milliards sans avoir des comptes à rendre à personne, puisque selon l'aveu même des membres gouvernementaux, sur près de 18 mille associations, quelques dizaines seulement ont fait des déclarations sur leur situation financière. Or, rien que Tunisia Charity, un « satellite » de Qatar Charity, présente un puzzle aux pourtours sombres. Présidée par Abdelmonaem Daïmi, frère d'Imed Daïmi (décidément !), cette association reçoit des dizaines et des dizaines de milliards de la l'organisation mère qui est inscrite sur la liste des associations terroristes par les pays du Golfe ! Autrement dit, il est plus qu'urgent que la justice prenne les devants pour ouvrir une enquête sur les comptes et les sources de financement de cette association qui agit dans la clandestinité ou presque. Et si ces milliards sont en train d'allers vers les terroristes ? L'hypothèse est plus que plausible sans que la justice ne daigne bouger le petit doigt pour faire démêler les imbrications de ces milliers d'associations. La BCT n'est pas exempte de tout reproche. On aurait bien aimé lire quelques communiqués faisant la lumière sur les transactions effectuées par ces associations, notamment celles qui usent de la couverture de bienfaisance. Au fait et dans le même ordre d'idées, l'opinion publique s'interroge encore et toujours sur l'identité du candidat à la présidentielle de 2014 qui aurait reçu, selon le rapport de la Cour des comptes, un versement en devises de l'étranger se chiffrant à quelques millions de dinars ! Pourquoi ce point demeure le secret le mieux gardé en Tunisie alors que les fuites ont touché tous les domaines ? A ce point, cette personne est intouchable ?! En tout état de cause, les observateurs et les experts financiers sont persuadés que si Youssef Chahed veut réussir un autre coup de maître en matière de lutte anti-corruption, il doit s'en prendre à bras-le-corps à cette « pieuvre » des associations tout en commençant par Tunisia Charity dirigée, comme par enchantement, par le frère d'Imed Daïmi. Les Tunisiens en font un point d'honneur !...