Alors que le dialogue sur la réforme des régimes de sécurité sociale se poursuit au sein de la commission de la protection sociale qui regroupe des représentants des divers partenaires sociaux (Gouvernement, UGTT, UTICA), le gouvernement envisage d'introduire des mesures spécifiques visant à renflouer les caisses sociales dans la loi de finances 2018. La première mesure concerne l'instauration d'une contribution sociale généralisée (CSG) ou bien d'une TVA sociale. Selon des sources proches du ministère des Affaires sociales, le choix entre ces deux mécanismes financement de la protection sociale n'a pas été encore fait. La CSG est un impôt qui devrait être prélevé sur les revenus d'activité (salaires, primes et indemnités diverses...), les revenus de patrimoine et les revenus de placement. La TVA sociale est, quant à elle, un mécanisme prévoyant l'augmentation du taux de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de quelques points supplémentaires pour que les recettes additionnelles générées par cette hausse puissent financer les dépenses de sécurité sociale. La deuxième mesure envisagée par l'exécutif est l'instauration de nouvelles taxes affectées au financement de la sécurité sociale. Ces taxes concerneraient plusieurs produits et services non essentiels comme le tabac, les boissons alcoolisées, les jeux par SMS et les paris sportifs. L'idée de taxes sur les produits non essentiels qui émane de l'UGTT, s'inspire de l'expérience française, où plus de 50 taxes sur des produits non essentiels ou superflus sont reversées au financement des caisses sociales. A titre d'exemple, seuls 20% des recettes de la vente des cigarettes en France vont dans les poches des buralistes et des fabricants de tabac. Le reste, soit 80% environ, va à l'Etat. Il reversé à des organismes de protection sociales, dont les caisses de sécurité sociale et la Caisse nationale d'assurance-maladie. Le projet de réforme des régimes de sécurité sociale présenté par le gouvernement lors des dernières réunions de la commission tripartite de la protection sociale prévoit, d'autre part, le relèvement obligatoire de deux ans de l'âge du départ à la retraite et une augmentation de trois années supplémentaires pour les fonctionnaires qui le souhaitent ainsi que la révision du mode de calcul de la pension de retraite et la révision à la hausse des cotisations des employés et des employeurs. 2,5 actifs financent la pension d'un retraité Ce projet prévoit également la mise en place d'une stratégie de lutte contre le travail «au noir» et l'amélioration de la gouvernance des caisses et le durcissement des procédures de recouvrement des créances des caisses sociales auprès des entreprises. A elles seules, les créances de la CNSS auprès des entreprises sont aujourd'hui estimées à plus de 4600 millions de dinars. Le déficit total des caisses sociales a atteint 1181 millions de dinars en 2016 contre 664 millions en 2015. Cette situation est tellement peu reluisante que l'Etat était obligé d'injecter 800 millions durant l'année écoulée pour permettre aux deux principales caisses de sécurité sociale de continuer à honorer leurs engagements. La détérioration continue des équilibres financiers des caisses sociales trouve essentiellement son origine dans les mutations démographiques et socio-économiques qu'a connues la Tunisie au cours des dernières décennies : vieillissement de la population, hausse de l'espérance de vie, propagation des emplois précaires, saturation du marché de l'emploi, multiplication des plans sociaux et des départs à la retraite anticipée. Le ratio moyen actifs/retraités pour les deux caisses sociales (nombre de salariés en exercice qui financent grâce à leurs cotisations les pensions des retraités dans le cadre du de financement basé sur la répartition et la solidarité entre les générations, NDLR) a, en effet, baissé à une vitesse vertigineuse. Au niveau de la Caisse Nationale de Retraite et de Prévoyance sociale (CNRPS), ce ratio est passé de 7 actifs pour 1 retraité en 1991 à 2,5 actifs pour 1 retraité actuellement. Pour la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS), ce ratio est de 3,8 actifs pour 1 retraité.