Malgré les multiples appels au report lancés par des partis politiques, la date des élections municipales, qui a été fixée par l'Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE) au 17 décembre 2017, est finalement maintenue. Le dépôt des candidatures se déroulera entre le 19 et le 26 septembre 201. Les partis et les listes indépendantes ont déjà commencé depuis plusieurs semaines à s'activer pour remporter le maximum de sièges lors de ce premier scrutin local depuis la révolution. Tous les observateurs s'accordent cependant à dire que seuls les grands partis bien structurés et implantés sur l'ensemble du territoire auront la possibilité de présenter des listes dans toutes les circonscriptions électorales. C'est que chaque parti qui souhaite participer dans l'ensemble des circonscriptions (350 municipalités existantes) est tenu de présenter 7200 candidats ! De plus la constitution des listes s'avère très complexe. La loi électorale relative aux municipales impose en effet une parité horizontale et verticale en plus d'une représentativité de 30% de jeunes sur les listes, ce qui nécessite 175 femmes tête de listes et quelques 3600 femmes candidates au total. Le financement public ne sera pas cette fois-ci accordé aux listes candidates avant le vote. Et seules les listes ayant obtenu au moins 3% des suffrages exprimés auront le droit au financement. Bien que le nombre total des partis agréés s'élève à plus de 200, les observateurs s'attendent à ce que deux partis seulement, en l'occurrence Nidaâ Tounes et le mouvement Ennahdha, soient capables de présenter des listes dans les 350 circonscriptions. Les partis de moindre taille se contenteront de présenter des listes dans les grands centres urbains et les villes à forte densité démographique. Les petites formations seront, quant à elles, obligées de présenter des listes dans quelques municipalités uniquement ou à soutenir des listes indépendantes. «Dans l'état actuel des choses, le mode de scrutin et les dispositions de la loi électorale ne favoriseront que les grands partis très structurés, bien implantés sur l'ensemble du territoire», estime la présidente de l'Association tunisienne pour l'intégrité et la démocratie des élections (ATIDE), Leila Chraïbi, en allusion à Nidaâ Tounes et à Ennahdha qui bénéficieraient de toutes les chances pour dominer les prochains conseils municipaux. Et d'ajouter : «le mode de scrutin choisi pour les prochaines élections municipales, qui a été déjà expérimenté à l'échelle nationale lors des législatives et des présidentielle, et dans le cadre duquel il s'agit moins de voter pour un homme que pour un parti, est loin d'être recommandé pour des élections à l'échelle locale dans la mesure où il ne bénéficie qu'aux partis et exclut pratiquement les indépendants ». Eparpillement des voix Mme Chraïbi note que ces élections qui représentent uns scrutin dit de proximité auraient pu constituer une chance inouïe pour les listes indépendantes. «Un mode de scrutin uninominal aurait en effet permis à des personnes compétentes, très respectées et connues pour leur intégrité à l'échelle locale d'accéder au poste de maire sans forcément être encartées », a-t-elle indiqué. Elle pense aussi que le seuil électoral de 3% causera un grand éparpillement des voix. «Des centaines de milliers de voix risquent de se perdre en raison du mode de scrutin retenu », a-t-elle prévenu. D'autres observateurs estiment cependant que les surprises sont possibles surtout que des alliances commencent à se nouer entre des partis appartenant à la même tendance idéologique ou prônant une ligne politique commune tandis que plusieurs autres, dont Afek Tounes et Machrou Tounes, ont ouvert leurs listes aux indépendants bénéficiant d'un certain rayonnement dans leurs régions. Selon l'ISIE, l'opération d'inscription des électeurs qui a eu lieu du 19 juin au 10 août a permis de porter sur le registre électoral quelque. 562.746 électeurs supplémentaires. 5.373 845, est le nombre total des inscrits dans le registre électoral: 2.559.953 sont des femmes (47,64 %,) et 2.813.892 sont hommes (52,36 %). Le nombre des jeunes inscrits âgés entre 18 à 21 ans s'est, quant à lui, limité à 175.826 et ne représentent que 3,27%, du total des inscrits. Plusieurs facteurs expliquent l'inquiétante faiblesse des inscriptions sur les listes électorales. D'abord, la période d'inscription choisie n'est pas adéquate dans la mesure où elle coïncide avec la fin du mois de ramadan, la période d'examens, les fêtes et les vacances d'été. Ensuite la campagne de sensibilisation relative à cette opération d'inscription a été lancée très en retard. De plus les partis et les organisations nationales ne se sont impliqués dans l'opération de sensibilisation que très tardivement. A cela s'ajoute la désaffection des jeunes, dont les aspirations n'ont pas été satisfaites par les divers gouvernements qui se sont succédé depuis la révolution, à l'égard des élections en général.