«Elle se fait harceler au travail? Elle doit s'estimer heureuse d'avoir trouvé du travail, elle!», «Une mineure se fait agresser? Elle grandira et elle oubliera». Derrière ces phrases une campagne de sensibilisation qui se veut percutante et derrière ces mots, autant de maux, souvent tus et des vies brisées. De génération en génération, la violence faite aux femmes a trop souvent été banalisée en Tunisie comme dans le monde. Aujourd'hui, les consciences s'éveillent et les mentalités changent graduellement. Un petit pas pour la femme, un grand pas pour l'Humanité. Ayant fait leur apparition il y a quelques jours dans les rues de Tunis, ces affiches aux messages sexistes ont été à l'origine d'une vive polémique notamment sur les réseaux sociaux. Il s'agit en fait du teasing de la campagne «Faddina», organisée par le Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA) dans le cadre de la lutte contre les violences faites aux femmes et dénonçant la banalisation des clichés et des stéréotypes. Mais cet avant-goût de la campagne principale n'a pas fait l'unanimité. Selon les interprétations personnelles de chacun, certains y ont vu un bad buzz et d'autres un excellent coup de communication. Or, l'idée était justement de confronter le Tunisien lambda au sexisme et à l'absurdité voire même à la cruauté de ses propres propos, sans fards ni détours. Pari réussi donc, puisque les messages affichés ont suscité de multiples réactions, même si certains ont usé, là encore, des mots crus et des termes inappropriés pour exprimer leur avis. C'est dire que la violence, aussi bien verbale que physique, est une spirale infernale qui n'épargne personne et qui témoigne de l'incapacité de certains à s'affirmer en tant qu'individus et d'émettre une opinion sans passer par la case cris, coups et insultes. De par le monde, les femmes et les enfants sont les premières victimes de violences. En Tunisie et selon une étude du CREDIF établie en 2016, près de 53.5% des femmes concernées par l'enquête affirment avoir subi une forme de violence dans l'espace public entre 2011 et 2015. Au fil des années, des campagnes de sensibilisation ont été lancées et une nouvelle loi intégrale sur la lutte contre la violence faite aux femmes a été adoptée par l'ARP en juillet 2017. Le ministère de la Famille, de la Femme et de l'Enfance et, à l'occasion de la Journée Internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, célébrée le 25 novembre de chaque année, vient d'annoncer le lancement d'un programme national de 16 jours d'actions pour lutter contre ce phénomène. Oui, mais... Ce fléau ne disparaîtra complètement que le jour où les mentalités changeront vraiment et que les femmes ne seront plus considérées comme inférieures aux hommes ou encore comme femmes-objets et surtout le jour où elles ne se sous-estimeront plus et oseront dénoncer toute personne qui ose leur faire du mal, à commencer leurs proches.