A environ quatre mois des élections municipales et moins de deux ans des législatives et présidentielle, une dynamique de ruptures et d'alliances semblables à la tectonique des plaques terrestres s'est enclenchée au niveau du paysage politique. L'activité sismique est particulièrement forte ces derniers jours dans les rangs de l'opposition. Dix partis politiques ont annoncé, mardi, avoir décidé de participer aux élections municipales avec des listes communes. «Des critères objectifs seront adoptés pour garantir une large présence des compétences partisanes et des différentes composantes de la société civile et des indépendants », ont précisé ces partis dans un communiqué. «Les élections municipales permettent une large participation des citoyens pour choisir leurs représentants dans les conseils régionaux et favorisent l'émergence d'une nouvelle génération de dirigeants dynamiques et compétents capables d'apporter le plus et de relever les défis futurs», ont ajouté ces partis parmi lesquels figurent Afek Tounes, Al Badil-Ettounsi, Machrou Tounes, Al-Joumhouri, Al-Massar et Al Moubadara. Ebranlés par les résultats des législatives partielles dans la circonscription d'Allemagne remportées par un blogueur qui a damé le pion à l'ensemble des listes partisanes, les dix partis semblent avoir compris que le «chacun pour soi» n'est plus porteur. D'autant plus qu'il favorise l'éparpillement des voix qui profite souvent à des formations politiques bien structurées ou à des outsiders non encartés. L'alchimie pourrait bien fonctionner surtout que les municipales représentent un scrutin local qui ne met pas en avant des dirigeants de premier plan des partis. Reste désormais à savoir si cette alliance électorale résistera aux égocentrismes démesurés des uns et des autres lors des prochaines législatives et présidentielle. Toujours dans le camp de l'opposition, six partis de gauche ont annoncé mardi la création d'un comité de coordination, de communication et d'information pour assurer la réussite du processus d'unification des partis de gauche. Créé à l'issue d'une réunion tenue le week-end dernier, ce comité regroupe des représentants d'Al-Massar, du Parti Socialiste, du parti du travail patriotique démocratique (PTPD), du parti de l'Unité populaire, du parti Al-Thawabet et du parti Mouvement Tunisie de l'avenir ainsi que des personnalités nationales et des syndicalistes indépendants. Tentative d'unification des partis de gauche Ce comité vise à «élargir le cercle de communication et de dialogue entre les partis, les courants, les organisations et les personnalités indépendantes qui cherchent à unifier la gauche tunisienne et à identifier les mécanismes à même de permettre d'assurer la réussite du processus d'unification». Il prévoit dans ce cadre la création de commissions régionales et locales visant à mettre à pied d'œuvre le processus d'unification et à définir les axes directeurs de la pensée et de la politique générale du parti de gauche. Une conférence nationale devrait être aussi organisée le 26 janvier 2018, pour discuter ces axes directeurs et envisager les mesures pragmatiques à même de permettre de donner corps à ce parti de gauche. L'initiative de l'unification de la gauche a été lancée en septembre dernier par l'ancien ministre de la Fonction publique et de la gouvernance, Abid Briki. Ancien dirigeant de l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT), M. Brili avait alors fait savoir qu'il ne compte pas créer un parti ou un front, mais seulement un mouvement dans le cadre d'une initiative de discussion entre tous ceux qui partagent les idées de la gauche. Il avait également estimé que la Tunisie assiste à un rétablissement de l'ancien régime à travers l'alliance de Nidaa Tounes et d'Ennahdha, ce qui va à l'encontre des objectifs de la révolution. «Notre principale mission sera d'évaluer ces sept dernières années et répondre à des questions que tout le monde se pose à l'heure qu'il est. Est-ce que la révolution a abouti au rétablissement de l'ancien régime? Accepter ce rétablissement est-il la solution à la crise économique?», s'est-il interrogé. Sur un autre plan, la raclée électorale subie par Nidaa Tounes en Allemagne a poussé ce parti vainqueur des élections législatives et présidentielle de 2014 à réfléchir à une révision de ses liens avec le mouvement Ennahdha. La réunion initialement prévue le week-end dernier qui avait pour ordre du jour de rompre les amarres avec le mouvement imâmiste a été reportée à une date ultérieure. Mais la volonté de rupture semble intacte. Pourtant Nidaa Tounes et Ennahdha ont usé depuis les élections législatives et présidentielle de 2014 de tous les arguments possibles et imaginables pour justifier la politique du consensus qui a donné le tournis à leurs électeurs respectifs. Dans le sillage du divorce annoncé, l'alliance nouée entre Nidaa Tounes, Ennahdha et l'Union Patriotique Libre (UPL), plus connue sous l'appellation de la nouvelle, troïka, serait en train de se défaire, au grand dam du président de l'UPL, Slim Riahi, dont les démêlés avec la justice sont loin d'être finies.