La Banque Centrale de Tunisie vient de rendre public son analyse annuelle des échanges commerciaux de la Tunisie pour l'exercice 2017. Des chiffres qui font grincer les dents. Avec un niveau record de déficit à 15,6 milliards de dinars soit 16% du PIB, un déficit énergétique de 4 milliards de dinars et un déficit alimentaire de 1.355 MDT. Des simples mesures de rafistolage suffiront-elles à atténuer le déficit commercial et le creusement du déficit courant? Combiné à des ratios alarmants en matière de dette publique et de dette extérieure, l'élargissement des déficits jumeaux menace toute esquisse de relance pour l'économie nationale. « L'équilibre du secteur extérieur a été fortement affecté depuis 2011 par la poursuite du dérapage du déficit commercial qui a connu un niveau record en 2017 de 15,6 milliards de dinars ou 16% du PIB. Dans une conjoncture marquée par une croissance atone, la détérioration chronique de la balance commerciale pourrait avoir des incidences considérables sur la soutenabilité de la dette extérieure du pays », affirme d'ailleurs la BCT dans son analyse. Et qui dit soutenabilité de la dette extérieure laisse entendre la capacité du pays à honorer ses engagements vis-à-vis de ses principaux créanciers. La dette publique grimpe de 39,2% du PIB en 2010 à 70% du PIB en 2017 Cerise sur le gâteau, le ratio de la dette publique par rapport au PIB monte crescendo en frôlant les 70% du PIB en 2017 contre 48% du PIB en 2006 et 39,2% du PIB en 2010. A ce titre dans une dernière analyse empirique publiée par la BCT traitant de la relation entre le rendement des bons de trésor et les chocs de la politique monétaire en période de crise, a mis l'accent sur l'évolution de la dette publique tunisienne. « Au cours de l'épisode pré-révolution 2006-2010, d'énormes efforts ont été déployés pour réduire le niveau de la dette publique et réaliser l'assainissement budgétaire. Accouplé avec le renforcement de l'économie, cette consolidation a entraîné une baisse continue du ratio de la dette publique par rapport au PIB. La détérioration de l'activité économique depuis la révolution a nécessité une expansion fiscale en Tunisie. En plus de générer des déficits budgétaires importants au cours des six derniers exercices (2011-2016), le gouvernement s'est également engagé à mobiliser des fonds en monnaie locale et en devises étrangères. », note l'analyse. Les analystes notent d'ailleurs qu'en raison de l'augmentation des déséquilibres externes et budgétaires outre l'incertitude économique et l'instabilité politique, le recours aux rendements des bons de trésor aux chocs de la politique monétaire devenait insignifiant. D'où l'urgence de résorber les trois mal-nommés déficits à savoir : le déficit budgétaire, le déficit de la balance commerciale et par ricochet le déficit de la balance des paiements courants. 4 milliards de déficit énergétique en 2017 La BCT appelle à une révision profonde du modèle économique afin de remédier aux entraves structurelles qui handicapent la relance des secteurs exportateurs pourvoyeurs de devises et à haute valeur ajoutée. En effet et en dépit de la reprise notable enregistrée dans l'exportation des industries manufacturières, l'activité du secteur des mines, phosphates et dérivés s'est considérablement repliée depuis 2011 entrainant une baisse des exportations en volume d'environ 50% entre 2010 et 2017. « Un manque à gagner colossal en devises de près de 1 milliard de dollars (584 Millions de dollars en 2017 contre 1507 Millions de dollars en 2010), ce qui milite en faveur d'une solution durable de nature à éviter toute perturbation nuisant à une activité aussi stratégique pour l'économie tunisienne», souligne la BCT. Ainsi le déficit énergétique s'est élevé à 4 milliards de dinars contribuant pour près de 45% dans l'élargissement du déficit commercial global. « La flambée attendue des cours des produits pétroliers au cours de 2018 devrait accentuer ce gap énergétique, qui nécessiterait éventuellement un recours systématique à l'endettement extérieur. La mise en place d'une stratégie efficace pour la maîtrise de la consommation d'énergie tout en s'orientant vers les énergies renouvelables (solaires, éoliennes...) devrait s'ériger en priorité nationale », conclut la BCT.