L'hémicycle ressemble, de plus en plus, à une arène, avec des combats de gladiateurs du verbe acerbe, ce qui lui fait perdre toute son aura et son prestige. Noc des prestigieux élus ne lésinant pas sur les moyens usant d'un langage bas-de-gamme, ordurier même, injuriant, insultant, diffamant et manquant de civisme. Les élus du peuple sont revenus, jeudi dernier, à leurs pêchés mignons qu'ils n'avaient délaissé que pour quelques jours, seulement, après la bataille rangée, lors du débat sur la prolongation du mandat de l'Instance Vérité et Dignité. Mais cette fois-ci, la confrontation est allée plus loin et aurait pu dégénérer ce qui a acculé le bureau de l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) à réagir et à dénoncer le discours de haine et le recours à la violence physique et politique dans l'enceinte du parlement. Le bureau de l'ARP s'est réuni donc jeudi, sur fond de déclarations houleuses faites récemment par les deux députés Ali Bannour (démissionnaire d'Afek Tounes) et Imed Daimi (Groupe démocrate). Les membres du bureau ont examiné la possibilité d'organiser une rencontre entre le vice-président du parlement Abdelfattah Mourou et les deux députés pour contenir l'affaire. A noter que le bureau de l'ARP a examiné une plainte déposée par Ali Bannour contre Imed Daimi. Dans une déclaration accordée à la radio privée Shems FM, Bannour a indirectement laissé entendre qu'il était pour un putsch militaire, considérant que les partis politiques sont à l'origine de la crise que vit le pays. Intervenant lors de la plénière de mercredi consacrée à l'examen du code des collectivités locales, le député Imed Daimi a qualifié cette déclaration de très de grave et de totalement inadmissible, appelant le parlement à réagir. Selon Daimi, la déclaration de Bannour est un franc appel à renverser le régime politique instauré par la Constitution. Il s'agit, selon ses dires, d'un crime qui fait partie d'un plan manigancé de l'extérieur pour saper la démocratie naissante du pays. Pire encore il a appelé « à pendre » de la pire des manières et à « disperser dans les quatre points du pays les membres de celui qui veut saper notre démocratie », donc indirectement le député Bannour en question. Dès lors face à ce qui se passe à l'ARP, a-t-on le droit, maintenant, de blâmer le citoyen dans son comportement, sa violence... au moment où nos illustres députés lui montrent la voie la plus simple pour eux, celle de la violence, afin de faire entendre leurs voix. L'appel, sans retenue, d'Ali Bannour à un putsch militaire est un acte inconséquent et inconscient, surtout qu'il fait-fi des règles démocratiques et des lois qui régissent le pays, en appelant à la prise de pouvoir par les militaires. Mais, ce qui est pire, encore, c'est la réaction de l'autre député et l'échange d'insultes et d'accusations entre les deux élus, ce qui est une aberration pour ceux qui sont sensés ériger des lois et les faire respecter, alors qu'ils n'arrivent, même pas, à respecter la déontologie et le prestige des lieux où ils débattent. Il est, certainement, temps, de mettre fin à ces dérives, quitte à imposer des sanctions contre les contrevenants et à leurs dérapages, et d'appliquer des mesures rigoureuses et, surtout, la loi, pour faire éviter au peuple ces langages orduriers qui ne font pas honneur au pays et qui désespèrent les citoyens. Nombre d' institutions de l'Etat et leur prestige sont bafoués à bout-de-bras et on se demande jusqu'où on va laisser dégénérer les choses, avec les atteintes successives au prestige de cet Etat qui n'arrive pas à imposer le respect?