S'il est un sujet qui fâche et qui divise, c'est bien la peine de mort, aussi bien en Tunisie qu'ailleurs. Entre ceux qui défendent le droit à la vie et ceux qui estiment que certains criminels n'ont pas le droit de vivre vu la cruauté de leurs actes, le débat fait rage et les avis se font pluriels. Parmi les ONG qui en font leur cheval de bataille, Amnesty International qui vient de publier son rapport annuel sur la peine de mort dans le monde. Du nouveau pour la Tunisie ? Si le sujet continue toujours de diviser la société, la Constitution de 2014 a statué sur le droit à la vie pour chacun. Pourtant, dans certaines situations extrêmes, des juges continuent de condamner à mort des criminels. En 2017, pas moins de 25 jugements de condamnation à la peine capitale ont été prononcées par des tribunaux et jusqu'à la fin de l'année dernière, pas moins de 77 condamnés à mort croupissaient en prison sans trop savoir si la sentence allait être exécutée ou non. C'est que depuis 1991, aucune condamnation à mort n'a été appliquée. Un bon point pour la Tunisie selon Amnesty International, mais ce n'est pas assez, estiment les responsables du bureau national de l'Organisation en Tunisie. En effet, pour eux, l'abolition effective de la peine de mort est la seule garantie pour un total respect de la loi et de la vie humaine. Sans ça, ces efforts restent vains car la vie de ces condamnés reste tributaire de la bonne volonté des décideurs politiques. Dans une lettre adressée au Président de la République, Béji Caïd Essebsi, Amnesty International affirme que depuis l'Indépendance, pas moins de 135 condamnations à mort ont été exécutées en Tunisie, par pendaison ou par fusillade. Seules 6 exécutions ont eu lieu sous le régime de Ben Ali quand les 129 autres se sont déroulées à l'époque de Bourguiba. L'ONG rappelle également que le pays a ratifié bon nombre de chartes et de traités internationaux relatifs au respect des Droits de l'Homme et à la prévention de la torture et des peines dégradantes et inhumaines. En parallèle, une nouvelle loi antiterroriste prévoyant la peine de mort dans certaines situations a été promulguée. Pour Amnesty International, il y a là une totale contradiction avec la Déclaration universelle des Droits de l'Homme adoptée le 10 décembre 1948. A l'occasion de la publication de son rapport annuel pour l'année 2017, l'Organisation plaide sa cause après du Président de la République et l'appelle à abolir définitivement la peine de mort pour consolider les efforts démocratiques et droits-de-l'hommistes consentis jusque là. Dans le reste des pays du Maghreb, Amnesty International a enregistré en 2017 pas moins de 27 condamnations à mort en Algérie et 15 au Maroc. Pour des raisons bien évidentes, il est très difficile de connaitre les vraies statistiques en Egypte, pays qui devient de plus en plus hermétique et allergique aux valeurs démocratiques et encore moins en Libye où le chaos règne en maître depuis des années maintenant. A plus large échelle, Amnesty International réitère son inquiétude quant au nombre constamment élevé de condamnations à mort et d'exécutions dans certains pays comme la Chine, l'Iran, l'Arabie Saoudite, l'Irak et le Pakistan. En 2017, l'ONG a recensé pas moins de 993 mises à mort dans 23 pays contre 1032 exécutions en 2016. La Chine se place en tête de ce funeste classement tout en sachant que ce pays classe les condamnations à mort comme secrets d'Etat et qu'il est quasiment impossible de savoir combien de personnes sont exécutées chaque année dans ce pays où les mises à mort sont bien souvent publiques et prennent l'allure d'un show auquel assistent des milliers de curieux. Cruelle réalité !