Cinq jours après l'attribution, le 10 mai 2018, des autorisations pour la réalisation de 10 centrales de 1 Mégawatt (4 projets) et 10 MW (6 projets), et la signature des contrats d'achat d'énergie par la STEG, le ministère de l'Energie, des Mines et des Energies renouvelables a lancé deux appels à candidature de pré-qualification pour la réalisation en concession de 8 autres centrales totalisant 1000 MW. Le premier appel d'offres est destiné aux promoteurs de centrales solaires photovoltaïques (5) d'une capacité totale d'environ 500 MW, et le second pour ceux des centrales éoliennes (3) d'une capacité totale d'environ 500 MW. "C'est la première fois que la Tunisie lance des projets de cette envergure. Ca permet de réduire le déficit énergétique, de développer la sécurité de l'approvisionnement en énergie dans notre pays et de booster la croissance", s'est félicité, le ministre de l'Energie, Khaled Kaddour. En effet, la Tunisie a adopté, en 2016, une stratégie de transition énergétique prévoyant la mise en place des conditions d'une mutation "progressive et équilibrée" du modèle énergétique actuel. Cette stratégie ne prévoit pas une déconnexion brutale du réseau conventionnel, mais plutôt, la diversification des sources d'énergie, la promotion du solaire et de l'éolien en particulier, et une meilleure exploitation des gisements d'efficacité énergétique. A long terme, le pays prévoit, dans le cadre de ses engagements pour le climat, de parvenir à asseoir les piliers d'une économie verte, à l'horizon 2050. Cet objectif et bien d'autres en matière d'énergie, auraient pu être atteints beaucoup plus tôt, si la Tunisie avait pris au sérieux la question de la dépendance énergétique et saisi l'opportunité des énergies alternatives, en particulier le solaire. Le déficit énergétique ne laisse pas de choix Cette mue vers les énergies renouvelables, dont le contexte mondial est plus que jamais favorable (baisse des coûts du solaire PV sur le marché mondial, facilités de l'accord de Paris sur le climat...), n'est plus une option pour la Tunisie, dont environ 97% de ses besoins en électricité proviennent du fossile (gaz et pétrole). Consciente de ce problème et son impact négatif sur les finances publiques, la BCT a recommandé, au cours du premier trimestre 2018, la mise en place d'un programme d'efficacité énergétique qui s'articule autour de la diversification des sources en l'occurrence l'exploitation des énergies renouvelables (solaires, éoliennes, etc...), la rationalisation de la consommation et l'accélération des investissements dans les domaines de prospection et de développement. Alors qu'à l'échelle internationale, le coût de fonctionnement des technologies solaires photovoltaïques a diminué de plus de 80% depuis 2009 et devrait connaître une chute de 59% d'ici 2025, faisant du solaire photovoltaïque le mode de génération d'électricité le moins coûteux qui soit, selon l'agence internationale de l'énergie renouvelable (IRENA). La Tunisie pourrait bien profiter de cette tendance baissière pour investir davantage dans le solaire PV et, partant, parvenir à réduire son déficit énergétique, devenu structurel et exorbitant pour atteindre 1,382 Milliards de dinars (MD), durant le premier trimestre de 2018, selon la BCT. Le pays gagnerait, également, à alléger le fardeau des subventions à l'énergie (produits pétroliers et électricité), qui devrait coûter à l'Etat, cette année, 3 milliards de dinars en contre 1,5 milliard de dinars prévus dans le budget de l'Etat pour l'année 2018, et ce en raison de la hausse du prix du baril, selon le ministre chargé des réformes économique Taoufik Rajhi. Des résistances à vaincre En 2015, quand l'Assemblée des Représentant du Peuple (ARP), s'apprêtait à adopter la loi sur la production d'électricité à partir des énergies renouvelables, des sit-in avaient eu lieu devant le siège du parlement en protestation contre cette loi. Les membres du syndicat de la STEG (Société Tunisienne de l'Electricité et du Gaz), seul producteur et gestionnaire du réseau électrique en Tunisie, étaient catégoriquement opposés à ce projet. Ils ont protesté contre cette loi, craignant pour leurs emplois et inquiets de voir leur réseau concurrencé par l'autoproduction, d'autant que le coût de l'électricité autoproduite pourrait être inférieur à celui acquis auprès du réseau électrique national. "En dépit de cette opposition, le parlement a fini par adopter cette la loi le 15 avril 2015, avec une unanimité "relative" ( 87 pour, 7 contre et 12 abstentions) et des décrets de loi ont été soumis à une consultation nationale", a rappelé le président de la commission parlementaire de l'Energie, de l'Industrie et des Ressources naturelles, Ameur Larayedh. D'après lui, la promotion des énergies renouvelables fait, désormais, l'objet de consensus entre les trois pouvoirs exécutif, législatif et politique. "Un Etat qui n'est pas autosuffisant en énergie, son indépendance demeure relative", a lancé le député et président de la commission Energie à l'ARP.