Le festival de Carthage, le festival de Sousse, de Bizerte, de Monastir, de Hammamet... plus de 300 festivals, rien qu'en été, rythmeront toute la Tunisie et tous ses gouvernorats pour permettre aux citoyens, aux commerçants et même aux touristes de voir se pays autrement et de s'épanouir ne serait-ce que le temps d'un petit spectacle. La culture, de par ses manifestations, permet non seulement une ouverture sociale, mais, aussi et surtout, une relance économique qui peut faire revivre toute une région. Cela a été constaté à plusieurs reprises et les Dunes électroniques témoignent encore de la renaissance économique qu'a connue la ville de Nafta et ses environs. Cette année, beaucoup de nouveaux festivals régionaux ont été créés et les attentes sont importantes. Toutefois, cet élan culturel à tendances économiques a été frappé de plein fouet par quelques personnes aigries qui ont lancé toute une campagne sur les réseaux sociaux où le mot d'ordre est le suivant : l'argent qu'on dépense pour la culture et les festivals doit être orienté vers les vraies priorités à savoir les médicaments, le lait et tous les autres maux dont souffre le pays. Une Tunisie qui connait en effet de rudes moments avec une crise politique et économique sans précédent ; des pénuries d'eau, d'électricité, de médicaments et même de lait paralysent le quotidien de plusieurs citoyens qui arrivent très difficilement à joindre les deux bouts. Avec la rentrée scolaire qui approche, la situation ne risque pas de connaître d'amélioration et le pire reste à venir. Dans ce chaos, les prochaines manifestations culturelles en réjouissent plus d'un sauf ceux qui ont décidé de pourrir même les plus petites lueurs d'espoir. En 2012 et 2013, lorsque la Tunisie a vu plusieurs milliers de ses enfants se convertir en djihadistes confirmés et partir combattre vers les zones de conflits, le mot d'ordre général de l'époque était presque unanime ; seule la culture et sa vulgarisation peuvent sauver la situation. Plus de trois ans plus tard, l'Etat, et mêmes quelques entrepreneurs culturels, ont décidé d'investir dans la culture et d'y croire pour nous donner une saison estivale pleine de ressort. Une saison qui débute malheureusement avec une campagne qui nous rappelle de tristes incidents ; les incendies commis contre les mausolées, les incidents de violence perpétrés contre le Palais Abdellia, les multiples agressions et les menaces de mort contre l'élite du pays, l'attentat de l'avenue Mohamed V (survenue parallèlement avec les Journées cinématographique de Carthage) et, surtout, l'attentat du musée du Bardo qui, au-delà de son caractère barbare contre les victimes, visait, aussi, à effacer la mémoire de tout un pays... Ce n'est pas parce que la situation sécuritaire tunisienne connaît une importante stabilité aujourd'hui que ce genre de campagne doit être ignoré ; l'Etat, les politiciens et les acteurs de la société civile doivent se rappeler que, quelques petites années de cela, ce genre de dénigrement a fini par mener notre pays vers un vrai chaos.