La région du Cap Bon, principale aire de l'agrumiculture en Tunisie, fait depuis quelques mois face à une flambée sans précédent de la Tristeza des agrumes (Citrus Tristeza Virus/ CTV), une maladie virale incurable qui a déjà décimé plus de 70 millions d'arbres à travers le monde. Des centaines d'arbres, notamment des orangers greffés sur bigaradier, ont été déjà contaminés par le virus dans plusieurs localités du gouvernorat de Nabeul, dont Béni Khalled, Menzel Bouzalfa, Takelssa, Soliman et Bouargoub. «La Tristeza des agrumes, apparue pour la première fois en 2012-2013 en Tunisie, est en train de se propager terriblement dans la zone du Cap Bon. La situation devient de plus en plus inquiétante», a déclaré le président de l'Union régionale de l'agriculture et de la pêche (URAP) de Nabeul, Imed El Bey, cité par le portail spécialisé Flehetna (Notre agriculture). Le responsable a cependant déploré la nonchalance des autorités de tutelle qui ne se sont pas empressées par éradiquer cette maladie qui cause la mort brutale des agrumes contaminés malgré la mise en place d'une stratégie nationale à lutter contre le fléau depuis 2012. «Un plan de travail a été concocté avec la collaboration du ministère de l'Agriculture, de la Pêche et des Ressources hydrauliques ainsi que tous les services régionaux. Les prélèvements, les analyses et les procédures prennent beaucoup de temps et enregistrent un retard continu», a-t-il souligné. Et d'ajouter : «Malheureusement, toutes les actions n'ont pas donné leurs fruits et la situation a commencée à s'aggraver de plus en plus, à cause du retard et de l'indifférence des autorités qui n'ont pas déployé les moyens logistiques appropriés pour lutter, réellement et rapidement, contre ce ravageur. Les agriculteurs, quant à eux, manquent de moyens pour assurer la prévention face à l'émergence de plusieurs facteurs climatiques qui favorisent la propagation de cette maladie comme la sécheresse». Selon M. El Bey, la Tristeza des agrumes se propage dans d'autres régions comme Jendouba, Béja et Kairouan, ainsi que dans plusieurs autres zones. Le virus de la Tristeza des agrumes est une espèce de phytovirus du genre Closterovirus, qui affecte la plupart des espèces de plantes du genre Citrus. Cette maladie virale est le principal fléau de l'agrumiculture dans le monde. Un puceron, vecteur de la maladie Le vecteur le plus efficace de la transmission de ce virus est un puceron, Toxoptera citricida, ou puceron brun des agrumes. La transmission se fait également facilement par greffe lorsque le phloème des greffons est déjà contaminé par le virus et qu'il se trouve en contact avec le phloème de la plante greffée. Le virus peut aussi être transmis par inoculation mécanique à travers la taille des arbres. Il ne se transmet pas par les graines. En Tunisie, le CTV représente une grande menace car l'écrasante majorité des arbres d'agrumes sont greffés sur bigaradier, le porte-greffe le plus sensible à la Tristeza. Le symptôme le plus foudroyant de la Tristeza est connu sous l'appellation du «Quick Decline», mort brutale affectant orangers et mandariniers greffés sur bigaradier. On peut aussi observer des symptômes sur feuilles caractérisés par le jaunissement des nervures. La Tristeza des agrumes a déjà détruit 70 millions d'arbres d'agrumes greffés sur bigaradier dans le monde, notamment en Argentine, au Brésil, aux Etats-Unis, en Espagne et au Venezuela. S'agissant d'une maladie virale, il n'existe pas de technique curative. Les mesures de prévention consistent à limiter l'extension de la maladie en choisissant des plants certifiés qui garantissent la bonne association porte-greffe/variété et à minimiser les réservoirs d'inoculum, en arrachant les arbres malades et en les remplaçant par des associations porte-greffe/greffon tolérantes.