A l'initiative d'un collectif d'institutions d'enseignement et de recherche relevant du ministère de la Justice et des Droits de l'homme et du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de la Technologie, un Colloque international de deux jours sur la codification ou l'unification du droit des affaires en Tunisie en un code unique s'est ouvert, hier, à Tunis, avec la participation d'éminents professeurs universitaires, de hauts magistrats et de grands juristes de Tunisie et de certains pays frères et amis du pourtour méditerranéen appelés à présenter, au terme de leurs travaux, des recommandations à même d'aider à la réalisation de ce projet dans les meilleures conditions. Le thème est d'une actualité brûlante et selon les intervenants dans la première séance, la tâche est ardue et mérite d'être entourée de toutes les précautions indispensables pour atteindre, sans faux-pas, les objectifs visés, en l'occurrence l'amélioration du climat des affaires en Tunisie, conformément aux exigences du nouveau contexte national et international marqués par la libéralisation, l'ouverture et la mondialisation.
La codification est un acte civilisationnel En effet, comme l'a fait remarquer M. Béchir Tekkari, ministre de la justice et des droits de l'homme, à l'ouverture du Symposium, la promulgation d'un Code législatif procède d'un acte de refondation à portée culturelle et civilisationnelle, car, a-t-il dit, plus qu'un simple regroupement de textes épars et dispersés, un Code représente et reflète une certaine conception du monde et une intention de renouveau politique. Et c'est dans cet esprit que la Tunisie se trouve, aujourd'hui, dans une phase de codification, a noté M. Zouhayer Skander, directeur du Centre des études juridiques et judicaires relevant du ministère de la justice et des droits de l'homme, qui participe à l'organisation du Colloque aux côtés de l'Institut supérieur de gestion de Tunis, de l'Institut du transport et de la logistique de Sousse et de l'association tunisienne du droit maritime. D'ailleurs, dans son allocution, le ministre a passé en revue les mesures et initiatives successives prises, par le gouvernement, au cours de ces vingt dernières années, pour moderniser, enrichir et actualiser la législation tunisienne dans tous les domaines et plus particulièrement, en ce qui concerne le droit des affaires, et illustrées, entre autres, par les nombreux amendements apportés au Code du commerce , pourtant un texte d'inspiration purement tunisienne puisqu'il date de 1960, au Code des obligations et de contrats qui date de 1906 et autres textes anciens, parallèlement à la promulgation de nouveaux Codes comme le Code d'incitation aux investissements, le Code de l'arbitrage, le Code relatif à la protection de la propriété intellectuelle, la loi relative à la protection du consommateur et la concurrence. Au même moment, de nombreuses initiatives de modernisation et d'actualisation ont été prises en faveur de divers aspects de la législation tunisienne et qui se sont traduites notamment par les mesures relatives à la pratique du commerce électronique. Cependant, autant le ministre de la justice et des droits de l'homme que d'autres intervenants dont le professeur Othman Ben Fadhel, professeur de droit privé à l'Université de Tunis, dans une communication intitulée « l'expérience tunisienne en droit commercial et des affaires », ont relevé que les activités économiques et commerciales et le monde des affaires, en général, en Tunisie restent régis par une multitude de codes, de lois et de conventions internationales, de sorte que le droit du commerce et des affaires en Tunisie est constitué de textes dispersés qui lui ôtent la cohérence nécessaire pour y voir clair et s'y situer aisément, et qui vont, dans certains cas, jusqu'à se contredire, créant, ainsi, de véritables failles juridiques. Pour mieux réussir cette codification ou cette unification projetée dudroit des affaires en Tunisie, les organisateurs ont, donc, jugé utile d'inviter, outre l'élite des participants tunisiens, d'éminents universitaires et juristes français et marocains pour présenter l'expérience de certains pays en la matière, parmi lesquels le professeur Rémy Cabrillac, professeur de droit à l'Université de Montpellier, en France, invité à présenter le droit commercial français, ainsi que le rapport final du Colloque, Mme Sylvaine Peyruzetto, professeur de droit à l'Université de Toulouse, invitée à parler de l'expérience européenne en matière d'unification du droit des affaires , et le professeur Mohamed Msalha, professeur à la Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales, de l'Université Hassen II de Mohammadia, au Maroc, invité à présenter l'expérience marocaine en matière du droit des affaires.
L'exigence de souplesse A cet égard, le ministre de la justice et des droits de l'homme a insisté sur la nécessité de veiller à ce que la codification préserve la souplesse du droit et des dispositions législatives et ne soit pas une cause de sclérose et d'immobilisme, car à travers cette codification et cette unification, l'intention est de redonner à la règle générale le rôle qui est le sien en la matière et qui s'est un peu émoussé dans le sillage de la spécialisation et de la technicité des textes spécifiques. Un juste milieu doit, donc, être trouvé entre les exigences de l'unité et de la durabilité visée par la codification et celles de la souplesse, du changement et de la diversification continue, justifiées par la nature même du monde des affaires et de l'économie, à notre époque. Il a rappelé les performances réalisées par la Tunisie, dans ce domaine et qui lui ont valu d'occuper, des rangs honorables et d'avoir des distinctions à l'échelle internationale, car, la nature des législations en vigueur dans les pays considérés entre en ligne de compte dans leur classement et leur couronnement. Aussi, ce projet d'unification peut être réalisé soit dans un Code unique, soit dans le cadre de quelques Codes, à la fois, afin que l'entreprise accomplisse parfaitement les objectifs fixés.