Le chef du mouvement islamiste Ennahdha a insinué le week-end denier que l'affaire Khashoggi pourrait être le catalyseur d'un soulèvement en Arabie saoudite comme l'auto-immolation de Bouazizi fut l'étincelle de la révolution en Tunisie Le ministère des Affaires étrangères tente de dissiper les nuages qui ont brouillé les relations entre la Tunisie et l'Arabie saoudite, après un parallèle, fait pas le président du mouvement islamiste Ennahdha, Rached Ghannouchi, entre l'assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi et l'auto-immolation du jeune vendeur ambulant tunisien, Mohamed Bouazizi. Dans un communiqué rendu public hier, le ministère a souligné qu' «en vertu de la Constitution de 2014 de la République tunisienne est l'unique responsable de la politique étrangère du pays, dont la mise en œuvre relève du ministère des Affaires étrangères». Il a également indiqué que les constantes de la politique étrangère tunisienne «reposent sur la préservation de la souveraineté nationale, la défense des intérêts suprêmes de notre pays, la non-ingérence dans les affaires intérieures des autres pays et l'éloignement de la Tunisie de la politique des axes et de l'alignement». Plus explicite, le ministère des affaires étrangères a également réaffirmé les relations séculaires entre la Tunisie et le Royaume d'Arabie saoudite et son souci de les développer dans l'intérêt des deux peuples frères. En ce qui concerne la position de la Tunisie dans l'affaire Khashoggi, le ministère a rappelé qu'il avait réaffirmé le 22 octobre la condamnation par la Tunisie du meurtre du journaliste et son souci de connaître les circonstances de sa disparition, tout en appelant à ne pas exploiter cet incident pour cibler la stabilité et la sécurité du Royaume. Le ministère des Affaires étrangères a aussi exprimé «la confiance de la Tunisie quant aux investigations ordonnées par le Serviteur des Deux Saintes Mosquées pour révéler toute la vérité sur les circonstances et les péripéties de cet incident». Le communiqué du ministère sonne comme un rappel à l'ordre diplomatique pour le chef d'Ennahdha, qui a insinué le week-end denier que l'affaire Khashoggi pourrait être le catalyseur d'un soulèvement en Arabie saoudite comme l'auto-immolation de Bouazizi fut l'étincelle de la révolution en Tunisie. «Cette conférence se tient dans une atmosphère qui rappelle, à bien des égards, celle de l›auto-immolation tragique de Bouazizi, et la vague de sympathie, mais aussi de ressentiment, qui ont parcouru le monde. À rapprocher de cela, le séisme provoqué par l›assassinat abominable du journaliste Jamal Khashoggi», a déclaré Rached Ghannouchi lors d'un discours prononcé devant les participants au symposium annuel de son parti tenu à Hammamet le week-end dernier. «Il (l'assassinat) a réveillé la conscience humaine qui rejette la logique des intérêts régnant entre les pays et qui veut absolument connaître toute la vérité», a-t-il affirmé. Quelques jours plus tôt, le mouvement Ennahdha a condamné «l'assassinat immonde» de Jamal Khashoggi et «incité les forces des réformes et du changement dans la région […] à défendre les valeurs de la liberté et de la dignité ». Il n'en fallait pas plus pour que le mouvement de Nidaa Tounes, ex- allié et actuel ennemi du parti islamiste, accuse ce dernier de «s'immiscer dans les relations extérieures de la Tunisie» et exprimé son «souci de consolider les relations de fraternité et de coopération avec le royaume de l'Arabie Saoudite et sa grande satisfaction pour le soutien continu de l'Arabie Saoudite à la Tunisie». En réaction à la polémique suscitée par sa position relative à l'affaire Khashoggi, le mouvement a souligné qu'il tient à «la sécurité de l'Arabie saoudite» et noté que Rached Ghannouchi, «n'a mentionné aucun pays» dans son discours prononcé le week-end dernier. Quoi qu'il en soit, cette polémique a révélé au grand jour que la Tunisie n'est pas éloignée de la politique des axes, avec des partis proches de l'axe Turquie-Qatar et d'autres plus attirés par celui formé par l'Arabie-Saoudite, les Emirats arabes unis et l'Egypte. Les temps du non-alignement semblent plus que jamais révolus. Hélas !