Les trois présidents doivent mettre de côté leurs égos et s'intéresser au sort du pays Il n'est plus question de gérer la concurrence sur la scène politique en appelant au chaos, mais par la force de proposition, par des programmes et des visions claires La députée de Machrou Tounès, Khawla Ben Aïcha, livre ci-après au journal Le Temps son point de vue sur la situation politique, économique et sociale, ainsi que sur les perspectives d'avenir, pour la nouvelle année qui sera marquée par des élections présidentielle et législatives, très importantes pour l'avenir du pays Le Temps : Pour revenir sur la réunion qui a eu lieu à Carthage avec le président de la République, est ce que l'Etat a donné l'image qu'il faut? Khawla Ben Aïcha : Oui, une belle image de l'Unité de l'Etat et c'est ce qui est censé être la règle générale en toutes circonstances et encore plus en ces temps difficiles économiquement et socialement. Il était temps que les trois présidents prennent leurs responsabilités, mettent leurs égos et différends de côté et s'essayent autour de la même table pour trouver des solutions et ouvrer pour l'intérêt général, celui du pays et des citoyens. La présence des présidents de l'UGTT et de l'UTICA, ainsi que celle des partis et blocs parlementaires soutenant le gouvernement est tout aussi important et symbolique et renforce cette image d'unité, de travail collectif et de priorisation des actions. Maintenant, il est certain que l'image seule reste insuffisante et qu'elle doit être accompagnée de décisions et d'actions concrètes pour venir à bout de la crise actuelle et pour surtout redonner confiance et retisser le lien entre l'Etat et les citoyens qui se sentent lésés et marginalisés en raison des tractations politiques entre les uns et les autres . Quel bilan faites-vous pour 2018 sur le plan politique? Comment évaluez-vous la situation économique du pays? L'année 2018 aura été une année riche en rebondissements et en action sur la scène politique : une année électorale avec la tenue des élections municipales, une année de chamboulements et de changements de coalitions et de majorités avec la naissance d'un nouveau bloc parlementaire à l'assemblée, le dernier remaniement ministériel, le passage du parti ayant remporté les élections législatives et présidentielle à l'opposition, la participation de notre parti à la nouvelle équipe gouvernementale ... Malheureusement ces chamboulements n'ont pas un bon impact sur le plan économique et social et bien que sur le plan macroéconomique les chiffres s'améliorent (quand on parle d'une légère amélioration des finances publiques), on ne peut pas en dire autant sur le plan microéconomique en termes d'amélioration du pouvoir d'achat du tunisien et de sa qualité de vie et c'est ce qui importe le plus aux yeux des citoyens, car leur unique indicateur économique reste leur couffin Comment s'annonce 2019 ? Quel appel lancez-vous aux Tunisiens ? C'est une année qui s'annonce difficile économiquement, socialement et politiquement. Avec les échéances électorales, les rivaux politiques deviennent de plus en plus agressifs et se croient tout permis et ça en arrive malheureusement parfois et très souvent à des pratiques peu responsables et peu éthiques. C'est également une année qui s'annonce difficile sur le plan social avec tous les mouvements sociaux que nous voyons éclater dans les régions. Toutefois, nous ne pouvons pas blâmer les citoyens de s'indigner face aux difficultés que vivent certains et, à raison, aux appels de grèves lancés par certains syndicats. J'espère vraiment que nous arriverons à trouver une solution et à signer une trêve sociale, car le pays ne pourrait pas supporter une dégénération sécuritaire et sociale. Nous sommes en démocratie aujourd'hui et j'en appelle tout aussi bien aux citoyens qu'aux politiques de respecter cette démocratie et de s'exprimer dans le cadre constitutionnel et légal qui y sont liés. J'en appelle à ceux qui cherchent, aujourd'hui, à faire tomber le gouvernement en leur disant que nous ne sommes plus en dictature, qu'il n'est plus question de faire chuter des régimes ou des gouvernements par des Révolutions, mais par les Urnes et via le processus démocratique que représentent les élections. J'en appelle aux partis politiques en leur disant qu'aujourd'hui Il n'est plus question de gérer la concurrence sur la scène politique en appelant au chaos et en provocant des émeutes mais par la force de proposition, par des programmes et des visions claires, par le travail de terrain et de réelles prises de positions qui seront exposées aux citoyens et aux électeurs qui auront le fin mot de l'histoire... J'en appelle finalement à tous mes concitoyens en Tunisie comme à l'étranger à être et rester vigilants, à être attentifs et rationnels, à vérifier les informations qui leurs sont communiqués et ne pas céder aux rumeurs et fausses information véhiculées parfois, à être actifs et non passifs dans l'opération des changements et améliorations que nous souhaitons tous voir et à protéger notre beau pays et notre jeune démocratie de celles et ceux qui veulent en faire un mauvais usage Quel est l'état de santé de Machrou Tounès à la veille des élections 2019. Compte-t-il former un bloc avec la nouvelle coalition et d'autres partis? Machrou Tounès continue d'évoluer et de progresser que ce soit sur le plan national , puisqu'aujourd'hui nous participons au gouvernement et avons toujours un groupe parlementaire influent sur le plan régional et local à travers nos structures et les activités que nous continuons à organiser : meetings , conférences , cycles de formations , actions sociales ... Nous restons bien évidemment attachés à l'une des idées fondamentales ressortie lors de notre congrès constitutif en juillet 2016 et qui est le rassemblement de cette famille politique centriste qui reste malheureusement toujours éparpillée. Nous restons encore et toujours ouverts à toute initiative dans ce sens, nous avons d'ores et déjà un accord écrit avec le bloc parlementaire de la coalition nationale au sujet d'une coordination des actions et votes concernant des dossiers importants à l'assemblée (signé également avec le groupe parlementaire de Nidaa Tounès en juin dernier). Pour ce qui est du plan politique, nous sommes toujours en pourparlers avec les différents acteurs de la scène, y compris les formations qui n'ont toujours pas vu le jour autour d'un projet commun dont la forme et les grandes lignes n'ont pas encore été définies. Mais Machrou Tounès est en pleine forme, continue son expansion et son travail sur le terrain et se prépare aux prochaines échéances électorales du mieux qu'il peut, tout en mettant dans ses propriétés sa contribution et sa responsabilité dans l'amélioration de l'action gouvernementale et parlementaire