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Le lourd tribut des martyrs pour l'indépendance
Publié dans Le Temps le 09 - 04 - 2020

La Tunisie commémore aujourd'hui le 82ème anniversaire des événements du 9 avril 1938. Ces événements ont marqué le début d'un long combat pour l'indépendance acquise grâce aux sacrifices de nombreux martyrs tombés pour que la Tunisie vive souveraine et libre. Le souvenir de ces hommes qui ont versé leur sang pour le pays, semble avoir disparu de la mémoire des Tunisiens. Une petite leçon d'histoire s'impose, pour que le souvenir de ces sacrifices ne disparait pas
Les premiers affrontements avec les Français ont eu lieu à Bizerte le 8 janvier 1938. Ce jour-là, une manifestation néo-destourienne avait voulu se rendre au contrôle civil de la ville pour protester contre l'expulsion vers l'Algérie du secrétaire de la cellule, Hassan Nouri. Débordés, les policiers tirent, tuant sept militants et en blessant une dizaine.
Habib Bourguiba entame alors, dès la fin du mois de janvier et jusqu'en mars, une tournée des cellules destouriennes, en Tunisie, afin de mobiliser ses troupes en perspective d'une répression annoncée comme imminente. Il lance même des appels au refus de l'impôt et de la conscription et exhorte ses partisans à répondre à la répression par la résistance et l'agitation. Les étudiants de l'université Zitouna sont incités à faire grève, ce qui provoque le renvoi de 108 d'entre eux pour activités au sein du Néo-Destour, formation de comités estudiantins liés au Néo-Destour et associations illégales. Mais si les militants suivent leur chef aveuglément, il n'en est pas de même des dirigeants du parti qui veulent éviter l'épreuve de force. Le conseil national réuni le 15 mars adopte une motion modérée malgré les manœuvres de Bourguiba pour imposer sa ligne radicale.
Les tournées de propagande maintenues
Passant outre les, interdictions du résident général, la campagne est ouverte le 28 mars, en l'absence de Bourguiba tombé malade, par un rassemblement à Medjez el-Bab, dans un local trop petit pour accueillir toute l'assistance qui doit se masser sur les trottoirs. D'autres réunions suivent avec toujours autant de succès, à Goubellat le 29 mars, à Souk El Arba (Jendouba) et au Sers le 30, à Sbiba et Haïdra le 1er avril, à Kalaâ Djerda (Kalaâ Kebira), le 2 avril et à Thala le 3 avril.
Devant la virulence des discours proférés, le gouvernement réagit à partir du 3 avril. Slimane Ben Slimane et Youssef Rouissi sont arrêtés à Souk El Arba à la veille du rassemblement qu'ils devaient tenir à Oued Meliz. Les orateurs qui les remplacent sont à leur tour arrêtés malgré la mobilisation de la foule qui se heurte aux policiers.
Pour dénoncer ces arrestations, un rassemblement populaire est organisé dans les locaux du Néo-Destour à Tunis le 5 avril. Un appel à manifester et à fermer toutes les boutiques est lancé pour le 8 avril par Salah Ben Youssef. Il prévient également l'assistance qu'il est convoqué le lendemain au tribunal avec Hédi Nouira et Mahmoud Bourguiba en vue de leur arrestation.
Les trois hommes sont en effet placés sous mandat de dépôt suite aux propos tenus lors de la réunion de Medjez el-Bab. Ils sont inculpés d'incitation à la haine raciale, d'attaques contre les droits et les pouvoirs de la République française en Tunisie et d'avoir provoqué au crime, au meurtre et au délit de violences et voies de fait. Le même jour, des réunions enflammées se tiennent dans les locaux du parti. Une délégation conduite par Tahar Sfar se rend auprès d'Ahmed II Bey à Hammam Lif pour lui demander son soutien. Mais le monarque leur demande de revenir le 9 avril pour recevoir sa réponse. Pour accentuer la pression sur le souverain, des manifestations sont organisées devant son palais toute la journée du 7 avril. D'autres se déroulent le même jour à Sousse, Mahdia, Sidi Bouzid et au Kef.
Les régions s'embrasent
Dès le matin du 8 avril, les hommes du Néo-Destour, armés de manches de pioches, veillent à l'application du mot d'ordre de la grève. À 10 heures, toutes les boutiques et tous les marchés de Tunis sont fermés. Des soldats français sont dépêchés sur les principales places de la ville et prennent position à 13 heures, en prévision d'une manifestation annoncée par le Néo-Destour.
À 14 h 30, une grande manifestation conduite par Mongi Slim et Ali Belhouane s'ébranle du quartier de Halfaouine et se dirige vers le siège de la résidence générale. Une autre manifestation, dirigée par Abdelaziz El Matri, part de Bab Menara et Bab Jedid et fait sa jonction avec la première à Bab El Bhar, non loin de la résidence générale. Devant une foule de 8 000 personnes, Matri prend la parole en déclarant aux manifestants qu'« en protestant par cette grandiose manifestation, nous faisons non seulement un acte légitime, mais nous accomplissons un devoir sacré » avant d'inviter la foule à rentrer chez elle. Le discours de Belhouane est beaucoup plus virulent : « Maintenant, c'est la lutte sans fin […] Que la police et l'armée se servent de leurs armes si elles veulent et on verra de quoi le peuple sera capable». Toutefois, lui aussi appelle la foule à se disperser tout en annonçant l'organisation d'une nouvelle manifestation pour le 10 avril.
Rien n'avait été prévu pour le 9 avril. À 10 heures, la délégation conduite par Tahar Sfar qui avait rencontré le bey le 6 avril se présente au Dar El Bey pour recevoir sa réponse par la voix du grand vizir Hédi Lakhoua mais le souverain refuse de prendre position. À l'issue de la rencontre, Ali Darghouth se lance dans un discours appelant les contestataires à « continuer à se réunir jusqu'à obtenir satisfaction ». Ces derniers se dirigent vers la maison de Bourguiba pour y recevoir des instructions.
À 11 heures, El Matri est convoqué à la résidence générale où Guillon l'informe qu'il a décidé de s'opposer par tous les moyens à la manifestation du 10 avril en imposant l'état de siège si cela était nécessaire. El Matri se rend alors chez Bourguiba, toujours malade et alité dans son domicile à Bab El Allouj pour le supplier d'annuler la manifestation. Cependant, celui-ci s'emporte et lui crie : « Il faut bien que le sang coule ! Oui, il faut que le sang coule ! »
Les combats à Tunis le 9 avril
À 11 heures 15, Belhouane est avisé, par un mandat de comparution, qu'il est convoqué à 15 heures pour être entendu par un juge d'instruction au sujet des propos tenus la veille. La nouvelle se répand rapidement et, lorsqu'il arrive au palais de justice, une foule de plusieurs centaines de personnes occupe les trottoirs du palais et les rues adjacentes. Dans le même temps, des attroupements se forment sur les places Bab Menara, Bab El Allouj et Bab Souika. Contrairement aux manifestations encadrées par le service d'ordre du Néo-Destour, personne n'est là pour gérer cette affluence inattendue dans une ville chauffée à blanc. Des renforts de police et de troupes sont demandés en urgence.
Pour permettre à la voiture cellulaire de se frayer un chemin jusqu'au palais, les agents chargent la foule à coups de matraques pendant que les manifestants répondent par des jets de pierre. Des coups de feu éclatent, tirés par des policiers qui parviennent à dégager l'avenue Bab Bnet. Mais d'autres manifestants, perchés sur les pentes du cimetière situé derrière le palais de justice, lancent des pierres sur les voitures conduites par des Européens avant d'être délogés par les forces de l'ordre qui n'hésitent pas à recourir à leurs armes.
Des bagarres éclatent aussi à Bab El Allouj où les manifestants lapident les voitures qui passent et accueillent les forces de police par des jets de pierre. La place est à peine dégagée que l'émeute reprend à Mallassine. L'armée utilise alors des automitrailleuses pour venir à bout des émeutiers dans ces deux quartiers.
Mais les bagarres reprennent de plus belle à Bab Souika où des tramways sont attaqués et renversés. Un peloton d'agents de police à cheval renforcé par une section de zouaves intervient en faisant usage de ses armes mais il faut plusieurs charges pour venir à bout des manifestants qui ripostent en jetant des pierres et des pavés.
Un lourd bilan
À 16 heures, la place de la Kasbah est envahie par une foule hurlante armée de gourdins, de matraques, de planches et de moellons. Les voitures qui passent sur le boulevard Bab Bnet sont lapidées, des pierres brisent les carreaux de la direction des Finances. Deux sections de zouaves interviennent pour dégager les manifestants qui occupent la place et le boulevard Bab Menara. Ils font usage de leurs armes pendant que les émeutiers se défendent à l'arme blanche. Il faut plusieurs charges et l'intervention des automitrailleuses pour que le calme revienne enfin vers 19 heures après quatre heures d'émeutes.
Le bilan est lourd : on relève 22 morts et près de 150 blessés, la majorité d'entre eux ayant entre 21 et 28 ans. Il y a même trois enfants de dix, douze et quinze ans, corroborant les rapports de police qui parlent de nombreux enfants parmi les émeutiers. Beaucoup d'entre eux viennent de classes sociales défavorisées (journaliers et chômeurs) ou sont des ruraux récemment arrivés. Cinq d'entre eux ne seront d'ailleurs jamais identifiés31.
L'état de siège est proclamé à 19 heures dans le contrôle civil de Tunis et à Sousse. Il est par la suite étendu à celui de Grombalia.
Le lendemain, Bourguiba et douze de ses camarades, dirigeants du parti, sont arrêtés. Tahar Sfar et Bahri Guiga, bien qu'appartenant à la tendance modérée, sont eux aussi arrêtés les 22 et 24 avril. Le Néo-Destour est dissout le 12 avril, ses locaux fermés, ses documents confisqués et la presse nationaliste suspendue. De nombreux militants sont arrêtés. Lorsque l'état de siège est levé en août 1938, ils sont 906 à être toujours détenus.


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