Un nombre d'artistes s'organisent sur le Web et les réseaux sociaux pour tenter d'apporter du baume aux cœurs des confinés : lives en ligne, créations de poèmes et séquences théâtrales, etc. Fathi Akkari metteur en scène, acteur et formateur d'acteurs, a depuis le début du confinement offert un nombre de séquences vidéo d'animation théâtrale sur sa page Facebook. Une manière à lui d'aider les internautes à résister à l'ennui mais aussi de lutter contre cette pandémie par le biais de l'art. * LE TEMPS : Comment passez-vous votre temps en cette période de confinement? Fethi Akkari :Difficilement, comme tout le monde. Ce n'est pas agréable d'être confiné chez soi, surtout que pour ma part, je suis doublement pénalisé vu que je suis claustrophobe. Mais je peux sortir me balader un peu autour de ma maison, et des fois je vais faire des courses. J'en profite pour regarder un peu la mer, et je traverse des rues qui sont complètement désertées, car j'ai besoin de prendre un peu d'air. Mais toujours, en portant mon masque de protection. A part ça, j'en profite, avec ma compagne, dans le rire et le bonheur, pour transcender les trois imparables du confinement ; à savoir, la télévision, la cuisine, et le « farniente », pour discuter théâtre et art. Et pour créer et réaliser des projets, et surtout lire le maximum possible. * Parlez-nous de ces séquences vidéo que vous avez diffusé sur Facebook comme (hadith el maquam), et des raisons de ce choix ? Les séquences vidéo sont de deux ordres. Des séquences qui sont destinées à provoquer une réflexion théorique et des vidéos qui sont d'ordre esthétique. D'ailleurs j'étais en contact avec Monique Akkari, mon ex-femme et c'est elle qui m'a proposé la notion et le concept « du théâtre de confinement ». Et là on est en train d'évoquer les questions esthétiques que ça soulève et bien entendu la question du direct. Mais ce qui est agréable, c'est qu'on travaille maintenant sur l'idée du «Clip-Théâtre à domicile», avec des acteurs que je dirige à travers Skype. Ensuite on enregistre la matière chez nous puis on l'envoie à un cinéaste syrien qui s'appelle Samuel Sikh, qui fait le montage de ces clips-théâtre, tout cela dans les conditions de confinement et avec l'équipement dont on dispose. C'est une manière de résister à l'ennui et pour pouvoir entretenir la machine pour qu'elle ne rouille pas d'un côté et de l'autre côté pour m'entrainer afin de confronter ce phénomène. C'est la vie et c'est la pédagogie de la pontale, qui exige qu'on reste en contact avec le monde extérieur, en attendant de retrouver le désir de la spontanéité et le direct avec le spectateur. * Est-ce que le rapport à l'art qu'il soit de la poésie, du théâtre ou autres formes artistiques, change quand il est diffusé à travers les réseaux sociaux, devant un public virtuel ? Pour l'acteur il ne s'agit pas d'individus ou de visages, car le public est invisible pour l'acteur. Le spectateur est une masse noire, un volume, mais il est présent dans nos têtes, dans notre mental. Le spectateur pour l'acteur est une valeur ou une identité invisible que ce soit dans le cadre du confinement ou même sur scène. Cela ne gêne pas l'acteur mais ce qui nous manque, ce sont surtout les réactions ou les applaudissements. Mais on a appris avec le temps, à en faire abstraction, pour pouvoir, coûte que coûte, aboutir à un spectacle, quand bien même il y aurait absence de ces paramètres-là. Bien entendu le plaisir n'est pas le même, quand il n'y a pas le trac, la vraie scène, pour éprouver cette réaction humaine de la peur, qui est nécessaire pour l'acteur. Mais je pense qu'avec le temps, on s'habitue et on fait avec et puis on s'amuse…