Le poète libanais francophone Salah Stétié est décédé à l'âge de 91 ans, ce mercredi 20 mai à Paris, laissant derrière lui une œuvre monumentale de 250 ouvrages, manuscrits, peintures, dessins, photographies et sculptures exposés au musée Paul Valéry à Sète. Né dans une famille de la bourgeoisie sunnite, le 28 décembre 1929, à Beyrouth, à l'époque du mandat français sur le Liban, Salah Stétié, dont le père était poète en langue arabe, a choisi d'écrire en français. Il a reçu le Grand Prix de la Francophonie décerné par l'Académie française en 1995 pour l'ensemble de son œuvre. Il avait été fait grand officier de la Légion d'honneur en 2015. Il a été lié à un grand nombre d'écrivains du XXe siècle, dont Pierre Jean Jouve, Henri Michaux, René Char ou Yves Bonnefoy. Parallèlement, il a mené une carrière diplomatique: il fut, tour à tour, ancien ambassadeur du Liban, notamment aux Pays-Bas et au Maroc, représentant de son pays à l'Unesco à Paris et directeur des affaires politiques et secrétaire général du ministère libanais des Affaires étrangères. Ce fut un homme qui a œuvré pour la paix dans le monde et la fraternité entre les hommes. Voici quelques vers de son poème intitulé « Paix » : La paix je la demande à ceux qui peuvent la donner/ Comme si elle était leur propriété leur chose/ Elle qui n'est pas colombe qui n'est pas tourterelle à nous ravir/Mais simple objet du cœur régulier/ Mots partagés et partageables entre les hommes/ Pour dire la faim la soif le pain la poésie/ La pluie dans le regard de ceux qui s'aiment… Personnellement, j'ai eu l'honneur de rencontrer ce grand poète lors de son passage en Tunisie dans le cadre du Festival de Poésie, « Vives Voix », dont il était président d'honneur, organisé pour la première fois, à Sidi Bou Saïd en mai 2014 où avaient participé une pléiade de poètes, musiciens et conteurs venus de quatorze pays. A cette occasion, il avait prononcé une courte allocution dans laquelle il a remercié les organisateurs de leur hospitalité chaleureuse. « Je suis très heureux, disait-il, d'être à Sidi Bou Saïd pour ce festival de poésie, c'est l'occasion de la sensibilité, de l'imagination et de la langue qui s'offre aux poètes, hommes et femmes, et une invitation à la création, dans ce magnifique cadre méditerranéen. » Sa vie était, en théorie comme en pratique, le lieu d'une interaction créatrice entre deux cultures ouvertes l'une sur l'autre, à savoir l'Orient et l'Occident. Avec la disparition de Salah Stétié, l'une des grandes figures de la poésie francophone contemporaine et homme de tolérance et d'ouverture, la Francophonie a perdu un grand esprit érudit et humaniste. Paix à son âme !