«Voix vives», le festival de poésie installé à Sète, en France, et qui nous a rendu visite au village bleu et blanc de la banlieue nord, a été clôturé samedi dernier. Les vingt-cinq poètes originaires de tous les pays de la Méditerranée n'ont pas manqué d'émouvoir le public avec leur art du langage, moderne ou classique, lyrique, engagé, spirituel, narratif ou descriptif. Feed-back des organisateurs : Marianne Catzaras, poète gréco-tunisienne, coordonnatrice du festival pour la Tunisie, et Raouf Dakhlaoui, président de la délégation spéciale de la Mairie de Sidi Bou Saïd. Quels ont été, selon vous, les points forts ou les moments forts du festival? Marianne Catzaras : A mon avis, tout a bien fonctionné : le choix des poètes et des musiciens, le choix des lieux, des artistes...D'ailleurs, tout s'est fait comme par miracle et en très peu de temps. La mairie et Ennejma Ezzahra (le Centre des musiques arabes et méditerranéennes) ont été merveilleux, disponibles et coopératifs... Raouf Dakhlaoui : Le festival, dans son ensemble, a représenté un grand moment. Dès la séance inaugurale, au Jardin de la mairie de Sidi Bou Saïd, la valeur des poètes a été impressionnante. L'ambiance générale était très émouvante et souvent poignante. M. C. : Et puis quelle réponse plus juste que la poésie pour un pays qui traverse des moments délicats de son histoire... Quelle plus belle invitation pour tisser des liens entre les peuples, construire des passerelles et ouvrir les maisons les plus éloignées... R. D. : Chaque poète était unique en sa manière d'être et de déclamer les vers. Les poètes français et italiens avaient un rythme effréné. Le contenu de leur poésie était concis et allait droit au cœur... M. C. : Notre objectif était également de pouvoir rassembler les langues. La poésie œuvre dans chaque mot, chaque phrase, chaque respiration... C'est une bataille permanente. Et quand les poètes commencent à parler, toutes les animosités se taisent. Comment étaient les poètes arabes ? R. D. : La plupart d'entre eux allaient vers une poésie classique, réglementée et codifiée, mais combien émouvante. Salah Stétié, le poète franco-libanais, président d'honneur du festival, était, quant à lui, comme un poisson dans l'eau. Cela se voit que c'est un monsieur rompu à l'exercice du public. Il ne déçoit jamais. Sa poésie est simple, accessible et profonde. En l'écoutant, on se sent plus intelligent. M. C. : Comment ne pas succomber à la voix de Salah Stétié ou à la poésie de la Libanaise Vénus khoury–Ghata ? Comment ne pas avoir la gorge qui se serre en écoutant cette polyphonie de Mohamed Ghozzi, (le Tunisien), Patrick Dubost, (le Français), Amel Moussa ou Ghada Nabil, l'Egyptienne? En ces deux journées du 23 et du 24 mai 2014, Sidi Bou Saïd était devenu un jardin ouvert à tout le monde, entre mer et ciel. R. D. : Venus Khoury-Ghata, quelle grande dame ! Chaque fois qu'elle parlait, j'avais les larmes aux yeux. Après sa performance du samedi, en début de soirée, je n'étais plus capable d'écouter qui que ce soit. A vous entendre, le festival était une parfaite réussite. Qu'en est-il du public ? Etait-il suffisamment nombreux ? R. D. : En effet, je pense que le festival était tout à fait réussi. L'organisation était très au point, pas de couac. Les poètes, autant que les musiciens, étaient à la hauteur de l'évènement. Quant au public, à notre grand bonheur, il a répondu à l'invitation en étant nombreux. M. C. : Beaucoup de gens nous ont félicités, des initiés aussi bien que des badauds et des commerçants. Pouvez-vous estimer le nombre des spectateurs? R. D. : Le nombre de spectateurs est difficile à évaluer, mais je ne pense pas me tromper en avançant le chiffre de trois à quatre mille participants. Quel a été le point faible du festival, d'après vous ? M. C. : ll n'y avait que des moments forts et j'ai du mal à vous en citer un en particulier. Je dirais quand même que nous aurions dû programmer une journée de plus. Mais nous manquions de moyens. R. D. : Je pense que la médiatisation est la seule chose qui ait cloché. Mauvaise stratégie de communication de notre part ou manque d'intérêt des médias, allez savoir ! Toujours est-il que le festival n'a pas été assez couvert par les journalistes. Est-ce qu'il y aurait une deuxième édition de Voix vives ? M. C. : Nous espérons pérenniser la manifestation avec le soutien des institutions locales et nationales. R. D. : Les organisateurs du Festival, qui sont l'association Libre Culture de Sète, en France, et la Mairie de Sidi Bou Saïd sont assez satisfaits du déroulement de la manifestation. Ce qui est motivant pour la préparation de l'édition 2015. Le seul problème qui se pose est, bien entendu, d'ordre financier. Cette année, ce sont les Français qui ont supporté le plus gros des dépenses. Pour assurer une nouvelle session, il faudra redoubler d'efforts et trouver des financements, du côté tunisien. Propos recueillis