Heureusement pour Hichem Méchichi que la composition de son futur gouvernement se fait en plein mois d'août ! Le citoyen tunisien devient un autre être aux mois de l'été, partagé qu'il est entre les vacances, la séance unique, les plages, les mariages et le rassemblement des familles dont les enfants sont oisifs. Ainsi le stress de la composition du nouveau gouvernement n'est pas vraiment visible ! Cependant, tout le pays est au fond accroché aux fenêtres des bureaux de Dar Dhiafa ou le chef de gouvernement désigné reçoit, palabre et consulte, s'il ne se permet pas des fois une petite escapade, comme le weekend dernier, pour rencontrer le cheikh des islamistes chez un ministre nahdhaoui. Les gens, qui semblent désintéressés et préoccupés par leur quotidien estival, avouent aussi leur inquiétude quant à la situation du pays qui va à la dérive. Des informations de tous genres et souvent de fake-news, circulent à longueur de journée sur le réseau social vedette en Tunisie, le Facebook, ajoutent au stress ambiant. Il faut bien se l'avouer, former un gouvernement avec l'équilibre des forces existant au sein du parlement tunisien est une galère ! Méchichi s'emploie, certes, à dédramatiser et essaie tant bien que mal à voir la moitié du verre pleine, rien n'y fait. Les islamistes ont encore proclamé leur exigence, après le Conseil de la Choura de dimanche dernier, appelant à former un gouvernement politique « qui respecte les équilibres au sein du parlement ». C'est-à-dire un gouvernement où ils feront avec leurs alliés El Karama et Qalb Tounes la pluie et le beau temps. Pendant ce temps-là, le bloc Démocratique (Attayar et Echaab) maintient son forcing pour un gouvernement sans les islamistes. Méchichi doit en plus composer avec Le Président de la république. On sait que celui-ci ne veut pas de Qalb Tounes sous n'importe quel prétexte. On sait également que le Président, épaulé en cela par l'UGTT, l'UTICA et les experts économiques, cherche à monter un gouvernement de compétences plus ou moins neutre afin de se consacrer aux problèmes économiques et obtenir du parlement une mise en sourdine des problèmes politiques, le temps de redresser un tant soit peu les indicateurs principaux de l'économie du pays. Plusieurs observateurs font remarquer que les partis politiques, avec tous leurs inconvénients sont le pivot de la vie démocratique. Ce qui est vrai, surtout dans une alternance fragile comme la nôtre. Continuer à stigmatiser les partis et à monter en épingle leurs querelles et leurs petites magouilles ne sert en rien la construction politique du pays. En plus des échéances se précisent où on aura encore besoin d'eux, comme les élections régionales. Ainsi, Méchichi doit inventer sa solution. Une solution d'autant plus aléatoire qu'il ne peut se prévaloir que de la confiance du Président de la République qui l'a choisi. L'ingéniosité serait qu'il réussisse à se faire accepter par les partis, sans devenir leur otage, et ceci nous amène tout droit vers un gouvernement ou la matrice serait technocrate mais où il y a aussi quelques noms politiques pour faire passer la pilule aux partis. A remarquer que ceux-là n'ont pas beaucoup de solution car autrement et si Méchichi échoue, ils se retrouvent devant les électeurs ! Et ça beaucoup d'entre eux ne le veulent absolument pas.