Par définition, l'information c'est le train qui n'arrive pas à l'heure. En d'autres termes, le rôle du journaliste consiste à tâter là où ça fait mal ! Ce n'était pas ce que nous a présenté notre chaine de télévision nationale El Watania 1, payée pourtant par les contribuables tunisiens, pour être au service de l'opinion publique et non pour servir les partis politiques ou le pouvoir en place. L'intervieweur de Rached Ghannouchi n'a pas joué son rôle : il a été très complaisant et il a non seulement déçu les téléspectateurs mais il a aussi rendu un très mauvais service à son invité dont il a été non pas l'intervieweur mais le souffleur et le serviteur ! Commençons par cette révolution qui semble si chère au président du parlement ! Ennahdha a-t-il vraiment été l'auteur de la révolution tunisienne !? N'a-t-il pas volé la révolte d'une jeunesse qui voulait enfin vivre dignement et librement dans son pays !? Qu'en est-il de " la dimension sociale de la révolution" à laquelle fait allusion le Cheikh Ghannouchi !? La pauvreté a fortement augmenté, le chômage est toujours en hausse et le pouvoir d'achat des ménages ne cesse de se dégrader. Le Tunisien peine à survivre et la Tunisie agonise ! La dernière bougie du printemps arabe ! Pourquoi le journaliste ne lui pas rappelé que la dimension sociale est le parent pauvre du bilan désastreux de dix ans où Ennahdha est à la tête de la quasi-totale de tous les pouvoirs !? Le Cheikh estime que la révolution tunisienne est la seule bougie qui reste encore allumée du Printemps arabe. N'est-il pas en train de l'éteindre tant sur le plan national qu'au niveau même au sein de son mouvement Ennahdha où plus d'une centaine de militants de premier rang demandent au Cheikh de respecter les règlements internes du parti et de quitter dignement la présidence d'Ennahdha ? Toujours dans le cadre de la révolution, le président du parlement laisse croire que la Tunisie est désormais une démocratie où règne l'exercice démocratique qui signifie le consensus sur la base d'une vie commune sans exclusion aucune " L'exclusion est source de division et de tensions ", dit-il tout en rappelant l'urgence de réaliser la réconciliation nationale que son mouvement a toujours prônée. Dans ce cadre, il fait référence à la réussite de la réconciliation nationale en Afrique du Sud. Mais Ennahdha a-t-il vraiment voulu s'inspirer de l'exemple sud-africain !? Oublie-t-il que le Grand Leader Nelson Mandela avait, immédiatement, après sa libération, c'est-à-dire après 27 ans sous les verrous de l'apartheid, tendu la main à ses ex-tortionnaires !? Oublie-t-il que le régime de Ben Ali est incomparable aux horreurs et atrocités de l'Apartheid un régime de ségrégation systématique ? La réconciliation nationale... Le Cheikh se rappelle-t-il que l'Apartheid a fait 100.000 exilés Sud-africains, des milliers de prisonniers politiques, de torturés et de morts sous la torture !? Connaît-il l'histoire de Nelson Mandela lorsqu'il avait demandé à son ex-tortionnaire de venir le rejoindre à la table où il était en train de déjeuner dans un restaurant avec sa garde rapprochée dans un restaurant au centre-ville !? Lorsqu'on avait interrogé Mandela, une fois le déjeuner terminé et que l'invité était parti, qui était l'homme que vous avez appelé à venir nous rejoindre, voici la réponse de Mandela : "Cet homme était le gardien de la prison où j'étais emprisonné. Souvent, après la torture à laquelle j'étais soumis, je criais et demandais un peu d'eau. Ce même homme venait, à chaque fois, et il urinait sur ma tête..." Et quand on avait interrogé le président Sud-africain pourquoi il ne l'avait pas sanctionné, écoutons-le : " La mentalité de représailles détruit les Etats tandis que la mentalité de tolérance construit les nations" ! Quelle grandeur et quelle humanité ! Et quelle différence entre Nelson Mandela et ces petits hommes qui nous gouvernent actuellement ! Voilà ce qu'aurait rappelé l'intervieweur à son honorable invité ! Un journaliste qui dirige des entretiens avec des hommes politiques a le devoir et l'obligation de bien préparer ses dossiers pour placer ses interviewés face à leurs contradictions, leurs incohérences, leurs volte-face, leurs slogans creux et leur blablabla ! Les deux plus belles ! La plus belle est, sans doute, lorsque le Cheikh Ghannouchi a comparé la Tunisie à la Malaisie, estimant que ce pays a prospéré grâce à l'huile de palme ! Toujours selon Sidi Cheikh, les Tunisiens seront tous comme les Malaisiens une fois qu'ils seront tous propriétaires de terrains que l'Etat leur distribuera ! Les Malaisiens grâce à l'huile de palme et les Tunisiennes grâce à l'huile d'olive ! D'ailleurs, Sidi Cheikh reproche à la diplomatie tunisienne de manque de dynamisme et d'imagination puisqu'elle a été incapable de vendre nos dattes et notre huile d'olive ! En fait, il vise, bien entendu, le chef de l'Etat et son ministre des affaires étrangères puisqu'il rend hommage à la compétence et au talent de nos diplomates ! " Nous, nous sommes au service de la Tunisie qui doit être au-dessus de toute autre considération ! ", tient-il à souligner. Nous l'avons bien remarqué lorsqu'il était avec Erdogan sans même la présence du drapeau tunisien alors que le drapeau turc flottait dans le bureau du président turc ! Et, tenez-vous bien et ne décrochez pas vos ceintures : le président du parlement a rendu un vibrant hommage à Hédi Nouira à qui il a souhaité que Dieu l'accueille dans son Eternel Paradis! Il a rappelé le slogan cher au meilleur premier ministre tunisien "la production et la productivité!". Et pourtant pendant dix ans, Ennahdha et dérivés ne font que remettre en question notre histoire nationale et les héros du mouvement national et à leur tête le Combattant Suprême, le président Habib Bourguiba dont Hédi Nouira représente la meilleure incarnation! Pourquoi le journaliste de la Watania 1 ne l'a pas interrogé sur ce revirement soudain et étrange à 180 degrés, alors que Bourguiba et ses fidèles compagnons ont toujours été qualifiés par les islamistes de mécréants et de traîtres au service de la France !? Ennahdha est au pouvoir depuis une dizaine d'années. Pourquoi se réveille-t-il aujourd'hui pour rendre hommage à Hédi Nouira!? Son intervieweur était plutôt heureux de voir Sidou Cheikh lui sourire ! Essayez un peu de compter le nombre de fois a été dite et redite : " Saïdi rais El Majless!". Ce n'était pas une interview politique! C'était un monologue! La langue de bois et des réponses laconiques! Le journaliste était plutôt là pour aider Sidou Cheikh à retrouver le fil de ses idées ! M. M.