« Un crime est en cours au ministère de l'Environnement, et plus précisément à l'Agence Nationale de Gestion des Déchets ANGED. Nous venons d'apprendre maintenant de sources sûres que des opérations de destruction de documents importants représentant des indices sérieux sur des crimes et dépassements en relation avec des dossiers environnementaux. Ces documents seraient en relation aussi avec le dossier relatif à l'importation des déchets, lesquels impliquent plusieurs hauts responsables. Un appel au Ministère public à bouger et à arrêter la mascarade de l'impunité ». C'est, texto, le post publié hier mercredi dans la matinée par le député du Courant démocratique, Noomane El Euch, sur sa page Facebook. Le dit post est survenu quelques heures après l'annonce de la saisie par la douane d'une cargaison de 72 tonnes de seigle au port de Sousse, sur la base d'une lettre du ministère de l'agriculture assurant que la cargaison ne répondait pas aux critères phytosanitaires. Peu de temps après, on apprend que la destruction des documents au sein de l'ANGED se faisait par incinération. Reste à connaitre le dispositif anti-incendie du bâtiment, et ses cris sonores en pareilles circonstances. Sources « dignes » de foi Puisque le député en a appelé aux médias pour qu'ils assurent le suivi de cette affaire, et mettre ces scandales au grand jour, voici quelques interrogations et remarques que le député ou le parti Attayar sont tenus de nous procurer, afin de bien suivre cette affaire. Car pour les médias, dès que la Justice s'est saisie du dossier et a « bougé », en déclenchant des investigations suivies de plusieurs arrestations, et autres mesures conservatoires, la situation juridique ainsi née ne tolère aucun dérangement du judiciaire faisant le travail qui est le sien. Comme on voit mal un journaliste contestant une mesure juridique à ce stade, l'interdiction vaut tout aussi bien pour les partis politiques, en l'occurrence Attayar, lequel veut prendre ce chapitre de la lutte contre la corruption comme marque de fabrique exclusive par rapport à ses concurrents où qu'ils se trouvent, que ce soit à l'Assemblée des représentants du peuple, à Carthage, ou ailleurs. L'occasion nous est présentée avec ce genre d'agissements, pour poser à l'honorable député, débutant en communication comme cela se voit, de nous citer ou nous orienter de quelque allusion qu'il puisse nous munir, vers l'une de «ses» sources sûres, afin de permettre une meilleure évaluation de l'information, la sienne restant entachée par son alignement politique public. La deuxième question porte sur son évaluation de document, en cours d'incinération, qu'il qualifie d'emblée, et sans autre forme de procès «documents importants représentant des indices sérieux sur des crimes et dépassements relatifs aux dossiers environnementaux», sans les avoir vus ou lus ! En député jouissant d'une immunité absolue, qu'est ce qui a empêché M. Noomane El Euch, avant de jeter son post au public, de «faire le nécessaire» en alertant tout simplement le poste de police ou de la garde nationale le plus proche du bâtiment de l'ANGED ? Et sinon de prendre contact directement avec le procureur de la République du même district ? Non aux raccourcis politiciens ! Son post, ne relève-t-il pas d'une pratique, non pas de la Justice, mais de la politique à peu de frais ? Plus inquiétant encore, le fait de n'avoir contacté aucun média de la place, dont son répertoire de téléphone regorge. Pour demander aux médias de bouger, en fin de post, comme si les médias étaient le réceptacle de ses fantasmes immunisés ! Cette affaire est venue poser encore une fois, le problème de l'inculture civique qui caractérise un bon nombre de députés de l'actuelle ARP, lesquels se trompent lourdement sur l'intelligence des «autres», qu'ils soient des journalistes, des citoyens ou des responsables. Dans le cas de l'espèce, et à supposer que l'information ait été vérifiée et établie par les autorités compétentes, sa publication de cette manière brute sur les réseaux sociaux, à l'état où nous l'avons ramassée, ne dépasse pas la pêche maigre d'une assertion politicienne enrobée dans une mystification qui ne tardera pas à éveiller bien des soupçons sur son auteur. Moralité, la guerre que la Justice tunisienne vient d'amorcer contre la corruption et le crime organisé est la première vraie cause de la vraie «Révolution» tunisienne. C'est le premier processus donnant corps à la substance même du message vrai de la jeunesse qui s'était soulevée le 14 décembre 2010, au moment où le pays ne connaissait pas grand monde parmi ces pâles copies des révolutionnaires de fin 2020. A ce titre, il serait tout aussi criminel de s'interposer de quelque façon que cela puisse être, entre la Justice et la réalité qu'elle traite, avec les moyens du bord. A savoir des lois qu'il est temps de réviser, dans le sens d'une meilleure efficacité, et d'un rayon d'action qui dépasse les privilèges claniques de toute sorte, en mettant sur pied d'égalité toute personne ayant fauté. Les députés sont donc appelés à faire d'abord le travail qui est le leur et auquel ils ne cessent de manquer. Un «révolutionnaire» de l'ARP qui s'agite de la sorte, tandis que l'assemblée où il siège et dont il tire son immunité éphémère, fait tout pour enterrer vivante la Cour Constitutionnelle, ne mérite aucune apothéose. Même pas celle due à un vulgaire homme de main, payé pour sa force physique d'exécution. Les jours à venir sont chargés de travail pour la Justice. Essayer de lui brouiller les pistes de quelque façon que ce soit, rejoint les lignes de défense des cibles que cette Justice avait débusquées en temps imparti, toute relativité gardée, par rapport à ses moyens et à ses problèmes internes. Le respect de la Justice commence ainsi. Et la Justice tunisienne n'est pas si inerte qu'on a voulu nous la présenter politiquement. C'est un dragon longtemps malmené, qui se réveille. Espérons que personne n'y échappera. Puisque cette Justice a longtemps attendu les manœuvres politiciennes de « réconciliations » diverses, lesquelles se sont avérées être de simples réécritures d'une situation pourrie depuis l'indépendance du pays. J.E.H.