* La réalité est là, les données disponibles mais « sous déclarées ». L'art de voiler la face en somme. Les infections sexuellement transmissibles sont-elles préoccupantes en Tunisie ? Un constat confirmé d'une manière ou d'une autre. C'est ce qui a été soulevé vendredi après-midi par le Pr.Mohamed Chakroun, Chef de service des maladies infectieuses à l'hôpital Fattouma Bourguiba de Monastir lors du cercle de la population et de la santé de la reproduction organisé par l'Office National de Famille et de la Population (ONFP). Le sujet a été amplement présenté par le spécialiste car le thème débattu à cette occasion « Femmes et enfants face aux IST et le VIH » est étroitement lié à la question. Reste à dire que les données sur les IST sont disponibles mais sous déclarées. Est-ce encore un sujet tabou ?
« L'urbanisation et l'explosion démographique, l'émancipation culturelle et la libération des mœurs, la maturation sexuelle précoce et le mariage tardif » ont fait de sorte que les Tunisiens sont de plus en plus exposés aux infections sexuellement transmissibles plus particulièrement quand ils ne se protègent et ne veillent pas à leur santé. Jusqu'à présent, les données reflétant l'état des lieux n'ont pas été dévoilées explicitement pour attirer l'attention quant à l'importance et à l'ampleur de cette question. Toutefois elles existent. Le Pr Chakroun a même signalé qu'elles sont « sous déclarées ». S'agit-t-il ainsi d'un sujet tabou, un tabou de plus ?
Partant du fait que la moitié des jeunes âgés entre 18 et 29 ans sont sexuellement actifs et que 80 % de cette population ont des relations irrégulières avec des partenaires occasionnels, il importe donc de mettre en lumière et de présenter le constat en la matière. Car les statistiques ou les données ont entre autres pour rôle et pour objectif de dénombrer les faits comme ils permettent d'élaborer des modèles et de prévoir des solutions efficaces à ce problème. Ces informations contribueront également au changement d'attitude de cette population qui a des relations sexuelles faiblement protégées et même non protégées. D'ailleurs, presque la moitié des filles se soucient ou exigent de leurs partenaires d'utiliser le préservatif lors d'un rapport sexuel plutôt par crainte d'une grossesse non désirée que pour se protéger le cas échéant contre les maladies ou les infections sexuellement transmissibles. Pour preuve, 42 % d'entre elles s'adonnent aux pilules contre 40 % qui utilisent le préservatif.
Multiplication des voyages Mais ce n'est pas tout. Il existe d'autres éléments qui ne manquent pas d'importance et qui sont véhiculaires d'une manière ou d'une autre des IST. Le spécialiste parle dans ce cadre de l'impact direct de la « multiplication des voyages » et de l'ouverture sur l'extérieur. Les Tunisiens les moins avertis sont en train de payer les frais de la mondialisation, car ils sont confrontés aux dangers auxquels ils ne prêtent pas d'attention faute de sensibilisation et par négligence. Toujours dans le même ordre d'idées, Pr. Chakroun a parlé d'une autre population qui est largement exposée à ces infections et qui en est responsable dans une deuxième phase. Il a signalé à ce propos que « la prostitution déclarée et clandestine se développe ». Un constat certes, alarmant d'où l'urgence à cibler de manière étudiée cette frange de la société à travers des mesures spécifiques et de manière étudiée. Notamment, la sensibilisation et la prise en charge sociale permettraient de limiter l'impact très lourd des infections transmises par cette population. Il importe également de multiplier les campagnes de sensibilisation essentiellement celles qui sont destinées au public tenté par ces aventures. D'ailleurs, les associations œuvrant dans le domaine sont appelées plus que jamais à passer à une vitesse supérieure et à procéder de façon méthodique afin de limiter ce fléau aux conséquences lourdes, notamment lors de la saison estivale, période qui s'accompagne très souvent d'aventures et de soirées bien arrosées.