Il n'y a pas de tabous, dans une démocratie, une vraie. Et à plus forte raison aux Etats-Unis où les électeurs votent un idéal, pour l'homme (ou la femme) qui saura l'incarner, les rassurer; qui saura encore et toujours cultiver le nombrilisme de ces citoyens appartenant à la plus puissante nation au monde et qui saura surtout être franc. Les Américains ont horreur du mensonge. La conduite dévergondée des jeunes (pas plus dévergondés qu'ailleurs, en fait), la drogue, la prostitution, le business exacerbé, les connexions entre argent et politique, la criminalité et la liberté pour chacun, garantie par le deuxième amendement de disposer d'une arme à feu..., tout cela n'est que l'une des facettes de cette Amérique, hétéroclite, communautaire, diversifiée, multi-confessionnelle et multi-ethnique, mais qui reste profondément puritaine. Les Américains sont en fait profondément pieux. Profondément croyants. Conservateurs même puisque partout le prix de l'honneur, c'est le sang. Le libertinage apparent n'est qu'une forme d'exubérance d'une nation unique dans sa façon d'être et dans ses schémas de pensée. Mais l'Amérique profonde est autrement tenace dans ses convictions. On eut dit que la Reine Victoria s'est trompée de lieu de naissance. La conscience américaine ne pardonne pas le mensonge. Une cachotterie est assimilée à un mensonge . Et nous parlons bien sûr des mensonges des hommes politiques. Nixon avait été réélu grâce à une manipulation, qu'il n'avait pas avouée, mais qui a été révélée par deux journalistes du Washington Post. Il avait eu beau mettre fin à la guerre du Vietnam, le cauchemar des Américains, envoyer Armstrong sur la Lune, l'affaire du Watergate l'a éclaboussé et puisqu'une démocratie, une vraie, a ses mécanismes propres, Nixon fut tout bonnement destitué. Tout près dans le temps, Clinton y échappa de peu et il n'aura dû son salut qu'à un aveu et une demande de pardon au peuple américain et à l'intervention télévisée de Hillary, l'épouse trompée. Qu'une fille de 17 ans soit enceinte au 5ème mois, celà n'a rien d'anormal dans cette Amérique libérale où l'on vit en concubinage, où les enfants naturels représentent le 1/3 des naissances chaque année. Mais le hic, le scandale même, vient de ce que cette fille se trouve être la fille de Sarah Palin, ex-Reine de beauté (et elle a de beaux restes) et qui s'est convertie au puritanisme pur et dur, fustigeant la contraception, l'éducation sexuelle et les filles mineures. A son "investiture" colistière lors de la convention démocrate, elle réaffirmait ces principes sacro-saints et, en parfaite symbiose avec John Mc Cain, elle se déclarait résolument opposée aux programmes de prévention de grossesse adolescente, cautionnant en revanche les programmes d'abstinence dans les écoles. Mc Cain a sans doute voulu jouer sur le conservatisme épidermique des Américains, ce côté religieux avec une famille nombreuse (la sienne) et une famille tout aussi nombreuse que celle de sa colistière. Un bon père de famille ferait un bon président. Les Républicains ont toujours cultivé cette forme très sensible, sécurisante des apparences. Et en plus c'est le parti qui décline le plus vers la religion, vers le conservatisme et une certaine forme d'intégrisme qui a fait dire à Bush que Dieu lui avait ordonné d'envahir l'Irak et de dépecer l'"Axe du mal". Les Républicains instrumentalisent cette forme de conservatisme comme pour montrer que le libertinage est inhérent aux Démocrates ne ratant aucune occasion de rappeler les frasques de Kennedy, son histoire avec Marilyn ou encore cette goutte de sperme tachant la robe de Monica Lewinsky. L'ennui c'est que tout finit pas se savoir. Bristol, jeune fille de 17 ans, enceinte de cinq mois aura sa place dans l'histoire du parti républicain. Le problème ce n'est pas elle. Ce n'est pas sa mère. Ce n'est pas Mc Cain non plus... Les Américains ont horreur qu'on leur mente. Tout est là.