Le Temps-Agences - A moins de deux mois du scrutin, le processus de désignation du prochain président des Etats-Unis semble se résumer à une simple question: Barack Obama saura-t-il se faire accepter par ces millions d'Américains désenchantés, tout à fait disposés à éjecter les républicains de la Maison Blanche s'ils disposent d'une alternative alliant sécurité et compétence? Bien qu'absent de cette course, le président sortant George W. Bush est omniprésent dans la campagne. Alors qu'il atteint des records d'impopularité, il est systématiquement lié par les démocrates au candidat républicain John McCain afin, c'est de bonne guerre, qu'ils ne paraissent faire qu'une seule et même personne. "John McCain a des idées qui sont identiques à celles de George Bush", a encore souligné Obama cette semaine dans l'Ohio, rappelant que le candidat républicain avait presque toujours soutenu les positions présidentielles au Sénat, notamment sur la guerre en Irak. Sur cette question, qui lui a permis d'écarter Hillary Clinton au stade des primaires, "il a eu tort et j'ai eu raison", a-t-il martelé jeudi en Pennsylvanie. Le camp Obama entend ainsi transformer le scrutin du 4 novembre en un référendum pour ou contre la présidence Bush, tout en assimilant le camp républicain dans son ensemble à l'actuel au chef de la Maison Blanche. Le message aux électeurs est dès lors le suivant: tenez-vous prêts à congédier le président en exercice et reconnaissez que le challenger est acceptable. Si ce message parle aux consciences, le président en place -ou le candidat de son parti, dans le cas présent- a de fortes chances de perdre. Handicapé par un Bush très impopulaire et une tendance logique à vouloir faire payer tout le camp républicain pour le bilan de l'administration sortante, John McCain doit trouver une parade. Il s'efforce pour cela de garder ses distances avec le président sans s'aliéner la base républicaine, n'hésitant pas à avouer dans un spot télévisé que "nous sommes dans une situation pire qu'il y a quatre ans". Dans son discours d'acceptation, en fin de convention républicaine, McCain s'est présenté comme l'agent du changement, appelant les Américains à "se battre avec (lui)" pour donner au pays une "nouvelle direction". Reste qu'il sera difficile de faire croire aux électeurs qu'il ne fait pas partie lui aussi de "l'establishment" républicain. C'est pourquoi le camp McCain invite ces mêmes électeurs à rejeter Obama sur la base d'un critère essentiel: son aptitude ou non à assumer les plus hautes responsabilités. Si l'on en croit le sénateur de l'Arizona, âgé de 72 ans, contre 47 ans pour son rival, peu importe le ressentiment que suscitent Bush et le Parti républicain, les Américains doivent s'apercevoir qu'Obama manque d'expérience et est trop imprévisible pour qu'on lui fasse confiance. De fait, calculent les pro-McCain, les électeurs pourraient être amenés à voter John McCain sans enthousiasme, mais ce serait préférable à un vote démocrate ou à une abstention... Cela fait maintenant des mois que les républicains s'emploient à réduire l'expérience politique d'Obama, qualifiant d'insuffisant son bilan de sénateur de l'Illinois. Sarah Palin, la colistière de McCain, a tourné en ridicule le travail communautaire qu'avait accompli à Chicago le futur candidat démocrate à sa sortie de l'université. "Il n'a jamais rien dirigé", a renchéri cette semaine le maire de New York Rudolph Giuliani devant les délégués républicains à Saint Paul. "Ce n'est pas le moment de faire un essai sur le tas".