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La drogue en Tunisie : « Choco, mythe ou réalité »
FLEAU
Publié dans Le Temps le 06 - 10 - 2008

Le feuilleton ramadanesque de cette année a mis le doigt sur les maux de la jeunesse dont notamment celui des stupéfiants, devenu un fléau préoccupant et inquiétant.
Préoccupant car il ne cesse de proliférer à travers toute les couches sociales et toutes les tendances, qu'il s'agisse de fervents croyants ou d'athées, de fins lettrés ou d'analphabètes et incultes.
D'aucuns y recourent pour essayer d'oublier serait-ce que l'espace d'une soirée, le carcan dans lequel ils se sentent enfermés.
D'autres y trouvent un moyen pour se donner de la contenance et de s'affirmer afin de se défouler et se libérer des multiples complexes dont ils peuvent souffrir.
Jadis, et jusqu'aux années 1970 voire 1980, les consommateurs de stupéfiants étaient considérés comme des marginaux. C'était plutôt de drogues douces qu'il s'agissait et plus particulièrement le Hashish ou tekrouri.
Avant l'indépendance, il y avait un certain laxisme de la part des autorités coloniales.
La vente du Tekrouri était libre. Ali Douagi le grand humoriste satirique déplorait dans ses multiples écrits que des jeunes se laissent emporter par la drogue (cocaïne comprise) et l'état de débauche dans lequel ils se trouvaient.
Mais c'était limité à quelques bohémiens vivant en marge de la société et constituant une infime partie. C'était l'exception qui confirmait la règle.
Quelques poètes en herbe (y compris certains parmi la bande de Taht Essour) ou quelques pseudo artistes.
Il y avait également des membres de la famille beylicale qui n'hésitaient pas à dilapider l'argent dont ils ne manquaient jamais, pour se procurer même de la cocaïne qu'ils considéraient comme un luxe réservé aux nantis.
Les autorités coloniales se complaisaient dans cette situation, où cette catégorie de personnes vaquaient à cette occupation, leur permettant de la sorte d'avoir un plus le champ libre afin de mieux exploiter les richesses du pays et diviser pour mieux régner.
Mais cela n'avait pas une envergure telle, qu'elle pouvait gagner une grande partie de la jeunesse.
Celle-ci était pourtant dans les années 1930 totalement défavorisée. Il y avait peu de diplômés, et une grande partie des jeunes souffrait du chômage.
Cependant une prise de conscience des jeunes et des moins jeunes incitait à combattre cet état de fait par tous les moyens.
Des organisations de jeunesse, telles que les boys scouts et la jeunesse destourienne avaient œuvré à combattre, aux cotés de militants, toute forme de débauche dont le responsable principal était le colonialisme.
Cette prise de conscience de la jeunesse fit que les jeunes ne se sont pas laissés gagner par la drogue, bien que les moyens d'y accéder fussent libre et faciles.
A l'aube de l'indépendance, les Tkaris étaient de vieux marginaux, qui faisaient plutôt partie d'un folklore tombé en désuétude.
L'Etat intervint quand même pour interdire définitivement et de manière catégorique et expresse l'usage des stupéfiants.
Une loi est intervenue pour punir le consommateur du Tekrouri à un an quinze jours de prison, c'était le tarif même pour celui qui cultivait de la drogue à la façon de l'époque : dans un petit pot ou dans un petit carré dans son jardin.
(Le Khochkhach était cultivé en tant que plante tranquillisante, et on en donnait même aux bébés à raison d'une cuillérée mêlée à de la bouillie pour leur permettre de dormir).

Retour en force pendant les années 1990 et aggravation de la loi
Ce retour était dû au malaise de la société, le pays ayant été ébranlé par un certain nombre d'événement qui ont fait leurs effets chez les jeunes et les moins jeunes.
Echec du système des coopératives, en 1969 jeudi noir en 1978, émeute du pain en 1984. Autant d'événements qui avaient affecté la société. Certains jeunes et même des moins jeunes cherchaient à fuir la situation en allant tenter leur chance ailleurs.
Avant les années 1980 les jeunes qui émigraient étaient pour la plupart des étudiants qui cherchaient à parfaire leur situation et retourner au pays après avoir décroché des diplômes. Ceux qui s'exilaient pour travailler le faisaient dans l'intention de gagner leur vie et avoir un meilleur avenir.
Pendant les années 1980 le trafic de drogue battait son plein dans certain pays d'Europe.
Mais le fléau de la drogue a gagné peu à peu les pays dits du Tiers-monde. Plusieurs personnes parmi nos compatriotes qui avaient émigré, étaient tombées dans le piège. Il suffisait d'y goûter pour y sombrer.
Ils y avaient en outre trouvé un moyen "facile" pour gagner beaucoup d'argent.

Les années 1990 le trafic de drogue se révéla au grand jour.
Dans les paquebots qui ramenaient nos émigrés rentrant au pays pour passer des vacances, plusieurs jeunes étaient trouvés porteurs de quantités plus ou moins importantes de Hashish, camouflés dans le double fond d'une valise ou dans la doublure d'un blouson.
Par la voie terrestre, des camions arrêtés à la douane s'avéraient contenir du cannabis, zatla ou autre espèce de drogue, soigneusement planqués dans le bourrelet des sièges, dans le pneu de la roue de secours, ou encore dans les parties vides du moteur.
On commençait alors à parler de trafic de drogue avec des dealers d'une part et des consommateurs de l'autre.
Le législateur intervint encore une fois par une loi de 1992 pour aggraver la peine surtout pour les dealers et ceux qui faisaient de cette activité un commerce qui leur rapportait gros.
Par cette loi, on faisait pour la première fois la distinction entre le consommateur, le distributeur et le commerçant qui agissait au sein de tout un réseau bien constitué.
Les peines prévues allaient désormais de un an pour le consommateur, à huit ans et plus pour le distributeur.
Quant au commerçant, il pouvait écoper d'une peine de 30 ans et plus s'il agissait au sein d'une bande. La brigade des stupéfiants n'y allait pas de main morte, en procédant à des ratissages systématiques, avec une vigilance de plus en plus accrue.

Les dealers à l'instar de Choco, imposent leur loi
Avec les moyens modernes, le phénomène s'est de plus en plus développé pour gagner toutes les couches de la société, des plus pauvres aux plus nantis.
La cybernétique et l'Internet, armes à double tranchant, n'ont fait que renforcer au fur et à mesure de leur développement, ce fléau.
Les rêves des jeunes à vouloir s'envoler aux pays de l'Eden était devenus des réalités.
Il suffit de pianoter sur un ordinateur pour entrer en contact avec n'importe qui et chatter sur n'importe quoi. Les navigateurs de l'Internet sont (contrairement à ceux de l'espace qui finissent par revenir sur terre) emportés au gré des vagues de cette machine magique et de ses manipulateurs filous qui savent lancer à chacun l'appât adéquat, pour les laisser à jamais soumis, sans possibilité de s'en détacher.
Des sites promettent des séjours au Canada par exemple, en garantissant toutes les formalités pour y accéder.
D'autres offrent des emplois même pour ceux qui n'ont pas de diplôme.
Un des "chocos" pris au piège a déniché un emploi en Italie. Mais il se rend compte en arrivant qu'il était là pour une mission difficile et délicate. Il est obligé de s'y plier et se trouve très vite pris dans un engrenage d'où il ne peut jamais sortir indemne le voilà rentré au pays pour les vacances, avec une 4x4 dernier cri, gourmette au poignet et chaîne cartier en or 18 carats au cou. Qu'avait-il fait pour se permettre d'avoir autant de choses aussi coûteuses ?
Tout le monde se pose la question, mais personne ne cherche à le lui demander. Ni ses amis, ni même ses proches.
A partir de là il y a deux possibilités.
-Ou bien il vient pour passer simplement des vacances et retourner au pays d'émigration.
-Ou bien il compte s'installer définitivement au pays d'origine et monter un petit projet avec le pactole qu'il a pu amasser.
Dans l'une ou l'autre, il sera devenu le maillon d'une chaîne infernale, à laquelle s'ajouteront d'autre maillons par les jeunes qui ont hâte de suivre son exemple et tenter leur chance comme il l'a fait.
Mais c'est là où le bât blesse. Le fléau gagnera ceux qui seront les plus soumis et qui auront à se ressaisir et à s'en sortir. Ce dealer qui fait le chef n'est lui-même qu'un sous-fifre. Ne faisant qu'appliquer les directives de ceux qui l'avaient initié et auxquels il devra indéfiniment savoir gré.
Ce fut par ces dealers eux-mêmes à la botte de chefs souvent cachés derrière des hommes de pailles, que les jeunes étaient de plus en plus pris au piège.
Le cours de la matière ne faisant qu'augmentant ces "chocos" avaient essayé au fil du temps de gagner les couches sociales les plus nantis, les fils à papa habitués à l'argent facile et qui avaient fini par tomber dans le piège.
L'usage des stupéfiants est même devenu un signe de modernité, à l'instar de ce qui se passe dans certains pays européens où fumer du crack du shit, ou snifer de la cocke, c'est être "in", dans le vent. Généralement les jeunes voulant tout essayer tombent dans le poly-usage c'est à dire le fait de consommer plusieurs produits à la fois, ou changer de produits selon les opportunités, du cannabis, à l'extasy en passant par l'héroïne ou la cocaïne.
En Tunisie la plupart des jeunes ont recours aux cannabis, hashish ou tekrouri.

Une montée de la délinquance chez les jeunes.
Tous ces psychotropes donnent au consommateurs une sensation d'extase et des hallucinations menant au trouble du caractère. Certains jeunes deviennent violents et facilement irritables.
A la moindre contrariété ils usent des grands moyens allant jusqu'au meurtre.
Ce trouble du comportement fait que le consommateur se sent toujours invulnérable. Il affronte toutes les situations et provoque n'importe qui pour prouver qu'il est le plus fort.
Ses relations avec le sexe opposé sont faussés dès le départ. Pour lui, la femme est d'abord un objet de plaisir, et pour assouvir ses désirs il peut aller jusqu'au viol.
Quant aux "chocos", la femme à leurs yeux est un bien qu'ils peuvent posséder par tous les moyens, grâce à leur argent.

Le monde des "chocos" un château de carte.
En réalité les dealers sont eux-mêmes très vulnérables, étant à la merci d'un retour de situation.
Car les plus grands qui les utilisent peuvent renoncer d'un jour à l'autre à leurs services. Ils peuvent même les éliminer physiquement quand ils sentent qu'ils ont failli quelque peu à leurs engagements ou qu'ils commencent à constituer une menace pour eux. Les " chocos" se retrouvent d'un jour à l'autre sans aucun soutien et dans l'impasse.
Dans le meilleur des cas ils finissent en prison avec de lourdes peines.
Des " chocos " repentis ? ça existe aussi, mais il est toujours difficile pour eux de remonter la pente.
•Les moyens pour s'en sortir et endiguer le flot.
-Rectifier le tir et limiter les dégâts :
En conjuguant les efforts de tous les intervenants de la société civile, à commencer par la cellule familiale, puis les organisations éducatives et sociales et pour finir l'administration.
Les parents doivent essayer de se rapprocher davantage de leurs enfants et de les écouter afin d'essayer de les comprendre pour les diriger sur la meilleure voie possible.
C'est valable à tous les niveaux sociaux, qu'il s'agisse de fortunés ou de gens modestes. Certes la question matérielle y est pour quelque chose, mais c'est aux parents de savoir se comporter selon les circonstances.
Ce qui compte c'est le suivi et l'ouverture des parents envers leurs enfants pour ne pas les livrer à eux-mêmes. Il faut aussi habituer les enfants à se révéler aux parents et leur dire ce qu'ils ont sur le cœur.
Le dialogue est le meilleur moyen de créer une ambiance familiale saine.
Les milieux sociaux, les organisations et les intervenants ne peuvent que prendre la relève et continuer sur la même voie.
Quant à l'administration, c'est-à-dire les autorités. Son rôle est d'apporter les éléments adéquats afin d'éviter la dérive de certains jeunes.
•Préventivement : en faisant appel à des spécialistes : psychologues, juristes, médecins, ergonomes, éducateurs afin de procurer les moyens adéquats qui permettent d'éviter aux jeunes de tomber dans cette tare.
•Coercitivement : en intervenant à côé des peines privatives de liberté par des moyens de substitution afin d'amener ceux qui ont déjà plongé de se ressaisir.
L'expérience a jusque-là donné, que les peines les plus lourdes n'ont pas été de nature à faire renoncer les consommateurs invétérés de continuer sur la même voie. C'est d'ailleurs pour cette raison que le législateur tunisien est intervenu, à côté des lois aggravant les peines pour les dealers, en préconisant des moyens intermédiaires permettant aux consommateurs de se ressaisir.
L'institution du centre de Jbel El s'inscrit dans cette option.
Les jeunes consommateurs condamnés à une peine de prison, iront désormais dans ce centre au lieu d'aller dans un centre de détention. C'est un moyen efficace et qui ne cesse depuis sa création de donner ses fruits.
En fait il faut lancer la bouée de sauvetage à tous ces jeunes désœuvrés afin de leur permettre de remonter la pente.
Ce n'est pas chose facile, mais on peut y arriver en conjuguant les efforts de tous les intervenants de la société tout en maintenant la vigilance nécessaire afin d'éviter la prolifération des "chocos" et de parvenir à éradiquer le mal à la racine.
Ouvrir un dialogue permanent avec les jeunes et briser le silence, afin de les libérer de leurs multiples complexes dans lesquels ils étaient restés longtemps cloîtrés. Car, punir ne suffit pas. L'emprisonnement n'est, d'ailleurs, pas le meilleur moyen de dissuader ou de guérir les petits consommateurs.


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