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Le fléau des cours particuliers atteint l'université
POINTS
Publié dans Le Temps le 20 - 10 - 2008

Du côté de l'administration : « Sévir contre de telles pratiques touchant à la dignité de notre université »
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Du côté des enseignants : « A l'encontre de l'essence même de l'enseignement universitaire basé sur la documentation, la recherche et la synthèse»
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Du côté des étudiants : « Résultat d'une politique éducative qui ne facilite pas l'encadrement »
37 % des jeunes appartenant à la tranche d'âge entre 20 et 24 ans sont des étudiants. Ce pourcentage veut dire que sur 100 élèves qui ont démarré l'enseignement de base à 6 ans, il y a de cela 14 ans, plus du tiers sont aujourd'hui à l'université. Cette proportion est respectable et dénote un accroissement notable du taux de réussite dans les différents niveaux de l'enseignement. Ce même taux était inférieur à 5 % à la fin des années 1970 et aux alentours de10 % à la fin des années 1980. Un grand bond a été effectué durant la dernière décennie qui a vu le nombre d'étudiants atteindre 370.000 et le nombre de diplômés avoisiner les 60.000 à la fin de chaque année universitaire.
Ces ratios sont certes des indicateurs de réussite mais ils sont désormais associés à deux aspects négatifs. D'une part, le savoir-faire des ressortissants de l'enseignement n'est pas très apprécié par le marché de l'emploi. Ce qui équivaut à la fameuse absence de synergie entre la formation et l'emploi. D'autre part, le fléau des cours particuliers fait des ravages. Il a déjà gangrené les enseignements primaire et secondaire où ces cours sont désormais incontournables et il commence à atteindre l'enseignement supérieur, ce qui représente un signal d'alarme par rapport à la crédibilité de l'université tunisienne.
La sensibilité de cette question de cours particuliers à l'université nous a poussé à la débattre avec tous les intervenants sur la scène universitaire pour comprendre les tenants et les aboutissants d'un tel phénomène qui constitue une spécificité tunisienne en la matière. De prime abord, tout le monde à l'université rejette ce phénomène intrus à la formation académique basée sur la documentation et la recherche scientifique nécessaire pour développer les connaissances et améliorer la capacité de synthèse chez l'étudiant. Il est également étranger à la formation professionnalisante qui vise à instruire chez l'étudiant un savoir-faire lui permettant d'intégrer facilement le marché de l'emploi.
Dans les deux cas, le rôle des enseignants consiste à encadrer cette démarche de formation. D'ailleurs, cet encadrement ne se limite pas aux heures de cours, de Travaux dirigés et de Travaux Pratiques. Il s'étend également aux divers projets de recherche soutenus par les étudiants qu'ils soient à la veille d'une Licence, d'une Maîtrise, d'un Master ou d'un Doctorat. Cette démarche fait partie des tâches de l'enseignant dans l'université et c'est, entre autres raisons pour lesquelles il ne travaille qu'un nombre réduit d'heures en salle. Le reste de son tableau de charges est destiné à l'encadrement des étudiants et à la recherche scientifique pour développer ses propres connaissances.
Ainsi conçu, l'enseignement supérieur ne laisse pas théoriquement de possibilité pour les cours particuliers. Tous les questionnements émanant des étudiants peuvent avoir des réponses chez leurs enseignants pendant l'horaire de classe ou en dehors. Or, l'amphi est surchargé. Les Travaux Dirigés et Pratiques le sont certes moins. Mais, les assistants sont pressés de rejoindre l'autre groupe qui les attend ou le professeur qui les encadre étant eux-mêmes doctorants. En plus, la majorité de ces assistants ne disposent pas de bureau où ils peuvent recevoir leurs étudiants. Ils se limitent donc à les recevoir entre deux TD ou TP et les interrogations des étudiants restent généralement suspendues ou obtiennent des réponses incomplètes et mitigées laissant ces derniers sur leur faim.

Les maux des études supérieures
Il est certain que l'enseignement supérieur comporte actuellement davantage d'embûches que les autres niveaux d'enseignement, notamment pour les matières scientifiques où l'université est synonyme de recherche approfondie malgré les allègements introduits dans les programmes. L'université introduit en effet à une nouvelle approche éducative basée sur la recherche, l'observation et la synthèse. Lesquelles actions doivent être l'émanation de l'étudiant lui-même. Le rôle de l'encadreur se limite, comme son nom l'indique, à accompagner cette recherche pour l'optimiser et à aider les étudiants à tirer les conclusions adéquates des différents travaux entamés.
Telle est théoriquement la mission du corps enseignant. Mais, en pratique, il peut se retrouver face à un nombre impressionnant de travaux de recherche et de questions auxquels il ne peut pas répondre vu son temps limité. Le nombre d'étudiants par enseignant avoisine les 20 et une telle moyenne élevée ne permet pas, surtout avec le régime « LMD » disposant de trois paliers de recherche, d'assurer un bon encadrement à l'université. Les étudiants en Licence préparent une recherche de fin d'études, ceux du Master et du Doctorat aussi. Ces différents travaux sont encadrés par des enseignants. Il y a à imaginer le volume d'encadrement qui en découle.
Une autre donnée mérite d'être prise en considération, c'est que près de 50 % des cours sont assurés par des détachés, des contractuels et des vacataires qui ne sont pas, généralement, concernés par cet encadrement étant des enseignants de français, d'Anglais, etc...
Il ne faut pas non plus ignorer la problématique de la recherche-documentation chez l es étudiants. Ces derniers ne parviennent pas en effet à accéder aux documents nécessaires pour les aider dans leurs recherches sur les thèmes de leurs questionnements. Un tel manquement n'aide pas à développer l'acquisition de la connaissance académique chez ces futurs chercheurs. Du coup, l'étudiant ne trouve pas l'environnement adéquat pour développer sa vocation à la recherche en l'absence de la documentation et en l'indisponibilité, et parfois même l'incompétence, de l'encadreur.
Un autre facteur a un apport non-négligeable dans l'émergence du phénomène de cours particuliers à l'université. C'est la faiblesse du niveau des étudiants, eux-mêmes. Laquelle faiblesse est sensible notamment dans les ISET, les universités de l'intérieur du pays et même à Tunis dans les branches où les étudiants ont été affectés au dernier tour d'orientation. La massification de l'enseignement supérieur a sensiblement influé sur le niveau des étudiants.
Donc, l'université souffre de trois maux : enseignants submergés et manquant de logistique, documentation inexistante ou difficilement accessible, niveau général faible.
Face à ces difficultés, les réactions des étudiants n'ont pas été conformes mais plutôt pragmatiques. Chacun a réagi suivant ses prédispositions et ses moyens.
Parmi les solutions préconisées, une catégorie d'étudiants a opté pour les cours particuliers.
Que pensent les différents intervenants de cette solution ?
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Du côté de l'administration : « Sévir contre de telles pratiques touchant à la dignité de notre université »
Les textes de loi et les circulaires organisant la vie universitaire sont clairs en matière du tableau de charge des enseignants. Tout travail des enseignants en dehors de l'université est expressément autorisé par l'administration. D'ailleurs, même l'enseignement dans les universités privées doit passer par une autorisation préalable de l'autorité de tutelle. Donc, l'administration s'oppose catégoriquement à l'instauration des cours particuliers : « il n'est pas admissible qu'un enseignant dispense des cours particuliers à des étudiants. Ceci touche à la dignité de notre enseignement supérieur et à sa vocation de recherche et de synthèse », affirme-t-on du côté du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de la Technologie.
L'administration se place en garant de la vocation de l'université : « Si l'enseignant du supérieur travaille un volume horaire réduit dans l'amphi, la salle ou le labo, c'est parce qu'il a pour seconde tâche d'encadrer les étudiants dans leurs recherches et d'effectuer lui-même de la recherche ».
L'administration se veut même intransigeante : « Tout dépassement est sanctionné selon les lois en vigueur et nous ne sommes pas prêts à refaire dans l'enseignement supérieur les expériences des enseignements primaire et secondaire »

Du côté des enseignants : « A l'encontre de l'essence même de l'enseignement universitaire basé sur la documentation, la recherche et la synthèse»
Les enseignants contactés ne nient pas l'existence de ce phénomène. Ils constatent qu'il sévit particulièrement dans les filières scientifiques. Les enseignants expliquent ce phénomène par le fait que : « les étudiants orientés à ces filières ne sont pas bien formés dans les matières de base telles que les mathématiques, la chimie ou les sciences physiques. Les bons éléments en ces matières ont été orientés vers les filières dites nobles comme la médecine, la pharmacie, la médecine dentaire, les écoles préparatoires d'ingénieurs, etc. Donc, ces branches se retrouvent avec des éléments très moyens qui ne parviennent pas à bien maîtriser leurs programmes respectifs. Du coup, ils se rabattent sur les cours particuliers avec la complaisance de certains collègues qui n'ont pas de scrupules ».
Interrogés sur leur avis sur ces cours, les enseignants interrogés expliquent : « C'est à l'encontre de l'essence même de l'enseignement supérieur basé sur la documentation, la recherche et la synthèse. L'étudiant est censé résoudre seul les difficultés rencontrées. Le rôle de l'administration consiste à préparer la logistique telles que les bibliothèques, les revues scientifiques, le nombre suffisant d'enseignants et de laboratoires, les instruments scientifiques de recherche, etc. Le rôle des enseignants, c'est d'orienter et d'encadrer ce travail scientifique pour développer les compétences des étudiants en matière de documentation, de recherche et de synthèse. L'encadreur oriente ses étudiants vers les livres et les documents nécessaires pour leurs travaux de recherche. Il commente leurs plans et il les aide dans leurs synthèses. Le travail de l'encadreur est de tirer ses étudiants vers l'avant tout en leur apprenant les ficelles de la recherche. Ce n'est pas de l'apprentissage. C'est plutôt un développement des compétences »
Concernant leur prise de position, les enseignants, et notamment les chercheurs, condamnent ce nouveau fléau : « les cours particuliers n'ont pas leur raison d'être à l'université. Ils ne peuvent qu'engendrer la léthargie que l'université ne peut réussir que grâce au dynamisme de la recherche. Nous condamnons avec véhémence cette tendance »
Or ces condamnations n'empêchent pas que des enseignants faussent compagnie à leurs collègues et répondent à l'appel de l'argent en dépit des vocations académiques de l'université.

Du côté des étudiants : « Résultat d'une politique éducative qui ne facilite pas l'encadrement »
« Vous croyez qu'on préfère avoir des cours particuliers ? Loin de là, ceux qui les suivent y ont été obligés faute d'alternative. D'une part, il y a un manque flagrant de documentation. Les bibliothèques ne sont pas bien fournies en revues scientifiques et en livres. Les espaces sont exigus et l'emprunt des documents est très restreint. D'autre part, les enseignants ne sont pas disponibles. On ne les retrouve pas en dehors des heures des TD ou des TP. Est vraiment chanceux l'étudiant qui peut obtenir une petite demi-heure avec son encadreur, surtout en phase de recherche de la documentation. Donc, les cours particuliers ont constitué une alternative, pour ceux qui en ont les moyens, afin de palier ces défaillances dans l'encadrement. Les étudiants ne les ont jamais cherché. Ils y ont été contraints », c'est sur ce ton que les étudiants contestent les accusations qui se rabattent sur eux comme étant à la source de cette dérive. Ils poursuivent : « Nous saisissons cette occasion pour lancer un appel afin d'améliorer les conditions des bibliothèques dans les établissements supérieurs et de les doter de moyens suffisants pour aider les étudiants dans leurs recherches »


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